Les scientifiques cherchent à mieux comprendre la chimie atmosphérique dans l’environnement arctique. Ils veulent en savoir plus sur les rétroactions entre les microbes marins et le climat arctique.


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    Le sulfure de diméthylesulfure de diméthyle, un gazgaz produit par le plancton marin, favorise la formation d'aérosols. Des chercheurs d'une équipe internationale impliquant l'UMI Takuvik (CNRS / Université Laval) ont rapporté des données de télédétection suggérant que les émissionsémissions de ce gaz dans l’Arctique ont augmenté d'environ 13 gigagrammes de soufresoufre par décennie depuis 1998, une augmentation de 33 % par décennie. Ceci s'explique par la diminution de la couverture de glace de mer dans l'Arctique. La perte totale de glace au cours de l'été pourrait entraîner une augmentation par 2,4 des émissions par rapport aux taux actuels, ce qui pourrait ralentir le réchauffement climatique en cours. 

    À mesure que la couverture de glace de mer dans l'Arctique diminue en raison du réchauffement climatique, l'activité du phytoplancton marin augmente, tout comme les émissions de gaz des microbesmicrobes marins. L'un de ces gaz, le sulfure de diméthyle (DMS), est la principale source naturelle de soufre atmosphérique dans les régions peu influencées par les émissions terrestres et anthropiques, comme l'océan Arctique en été. Dans ces conditions, les réactions chimiquesréactions chimiques du DMS dans l'atmosphère entraînent la formation de nouvelles particules atmosphériques (aérosols) qui contribuent à la formation des nuagesnuages, modifiant leur capacité à réfléchir la lumièrelumière solaire, et à isoler l'océan des pertes de chaleurchaleur dans l'atmosphère. S'agissant de deux effets climatiques opposés, l'estimation précise des émissions naturelles de soufre est nécessaire pour clarifier lequel des deux processus est dominant à l'échelle régionale et à quelle période de l'année, bien que dans l'ensemble de l'Arctique, on estime que l'effet refroidissant est dominant.

    Flux total de DMS pendant la saison estivale. Les contours indiquent les étendues maximales (mars, moyenne 2003-2016) et minimales (septembre, 2003 et 2012) de glace. © Insu
    Flux total de DMS pendant la saison estivale. Les contours indiquent les étendues maximales (mars, moyenne 2003-2016) et minimales (septembre, 2003 et 2012) de glace. © Insu

    La télédétection fait apparaître d'importantes variations

    Dans cette étude, les émissions de DMS dans l'océan Arctique ont été quantifiées pour la première fois, entre 1998 et 2016, à l'aide de la télédétection de la biomassebiomasse phytoplanctonique (concentration de chlorophyllechlorophylle) et de variables physiquesphysiques (y compris la lumière incidente, la température de surface de l'océan et la couverture de glace). L'étude fait état d'une tendance à la hausse rapide d'environ 33 % par décennie, en raison de la perte de glace de mer. Les auteurs estiment aussi que la perte totale de glace de mer de l'Arctique en été, qui pourrait se produire dans les prochaines décennies, augmenterait les émissions de DMS de 2 à 3 fois par rapport aux taux actuels. Au-delà de l'augmentation liée à la perte de glace, l'étude rapporte des variations considérables d'une année à l'autre. Il s'agit d'une conséquence des variations de la productivité du plancton, selon les régions où les retraits de glace sont plus vastes chaque année. Cette variabilité des émissions, qui ne peut être étudiée que par télédétection, n'est pas prise en compte dans les modèles climatiquesmodèles climatiques actuels.

    Émissions de DMS (ensemble de l’Arctique) et séries temporelles de la surface libre de glace (moyenne de chaque été). Les diagrammes montrent les pourcentages par secteur (voir carte) pour les années sélectionnées. © Insu
    Émissions de DMS (ensemble de l’Arctique) et séries temporelles de la surface libre de glace (moyenne de chaque été). Les diagrammes montrent les pourcentages par secteur (voir carte) pour les années sélectionnées. © Insu

    Le rôle du plancton dans le climat futur de l'Arctique

    Les données présentées dans cet article sont utilisées par les chercheurs qui étudient les phénomènes atmosphériques pour mieux comprendre les détails de la chimiechimie atmosphérique dans l'environnement arctique. Mais le rôle des émissions marines de DMS dans le futur climatclimat de l'Arctique dépendra non seulement du retrait des glaces et de la productivité du plancton, mais aussi des espècesespèces de phytoplanctonphytoplancton présentes et de leur réponse aux changements de l’écosystème. En plus, les émissions naturelles de soufre sont en concurrence avec les émissions anthropiques. Des études précédentes ont rapporté une diminution des émissions de soufre liées à la production d'énergieénergie aux pays industrialisés. Néanmoins, des nouvelles émissions en raison de l'industrialisation croissante de l'Arctique, de l'augmentation du transport maritime et de l'extraction du pétrolepétrole pourraient compenser cette tendance. Enfin, les résultats de cet article aideront à comprendre les rétroactionsrétroactions entre les microbes marins et le climat arctique et à prévoir leurs trajectoires futures sous la pressionpression des changements globaux.