Les scientifiques ont beaucoup étudié les glaces de l’Arctique et leur dynamique. Moins celles de l’Antarctique. Mais aujourd’hui, grâce à un important travail de reconstruction, des chercheurs présentent des données qui remontent jusqu’au début du XXe siècle. Elles montrent des schémas inédits, signes selon eux, que « quelque chose de dramatique est en cours ».


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    L'Antarctique reste un continent difficile à étudier. Jusqu'alors, les scientifiques manquaient, par exemple, d'une image détaillant l'étendue de la glace de mer dans la région sur l'ensemble du XXe siècle. Mais des chercheurs de l’université de l’Ohio (États-Unis) viennent de publier des données qui permettent enfin d'en savoir plus sur l'évolution de la banquise antarctique. De quoi confirmer que le phénomène d'augmentation de son étendue observé par satellite depuis le début des années 1980 est unique.

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    Surchauffe de l'Antarctique et de l'Arctique en décembre

    Les chercheurs ont fait un gros travail de reconstitution. À partir, d'une part, de données enregistrées au fil du temps par un petit nombre de stations météorologiques, de rapports d'observations humaines et d'échantillons de carottes de glace et de sédiments océaniques. Et d'autre part, de données météorologiques historiques dans des endroits plus éloignés de l'Antarctique. Car il existe un lien étroit entre l'étendue de glace de mer et la variabilité climatique régionale ou à plus grande échelle. Résultat : des informations disponibles non plus sur une région spécifique de l'Antarctique ou à un moment particulier de l'année, mais bien sur l'ensemble du continent et au cours des quatre saisons.

    Le travail de précision des chercheurs de l'université de l'Ohio fait apparaître, du côté de l'Antarctique, depuis 1979, une tendance à une lente augmentation globale de la surface de glace de mer, alors même que celle-ci était plutôt sur le recul depuis le début du XXe siècle. Puis une anomalieanomalie en 2016 et 2017 avec une étendue de glace de mer qui diminue soudainement. Pour finalement rebondir à la mi-2020 et se retrouver encore à nouveau inférieure à la moyenne en ce début 2022.

    Des mécanismes qui restent à comprendre

    Les chercheurs estiment que ces variations dans l'étendue de la banquise antarctique marquent des changements dans notre système climatique. Des changements inédits au moins sur les 150 dernières années environ. Et même s'ils n'expliquent pas, pour l'instant, le retrait soudain observé en 2016, ils estiment qu'il est le signe que « quelque chose d'assez dramatique est en cours ».

    Les dernières données rassemblées devraient toutefois permettre de mieux comprendre les changements qui s'opèrent sur la banquise. Des changements importants car si la fontefonte de la glace de mer n'influe pas sur le niveau de la mer, elle peut avoir des conséquences pour les écosystèmesécosystèmes et la biodiversitébiodiversité.

    Rappelons en effet que les manchots et les phoques qui vivent là sont un peu comme les ours polaires de l'ArctiqueArctique. Ils dépendent de manière critique de la quantité de glace de mer présente. Par ailleurs, la circulation océanique, y compris la formation d'eau dense qui peut couler au fond de l'océan, est, elle aussi, liée aux variations de la banquise. Et « des changements dans l'océan autour de l'Antarctique peuvent avoir des implications mondiales », prévient Ryan Fogt, géographe à l'université de l'Ohio, dans un communiqué.