Selon des chercheurs de l’Université du Michigan, si l’on ne comprenait pas exactement comment se formaient et se déplaçaient les dunes de sable sur Mars et sur Terre, c’est parce qu’on avait négligé une force essentielle de l’Univers : la force électrique.

au sommaire


    Champ de dunes martiennes. Crédit : Nasa

    Champ de dunes martiennes. Crédit : Nasa

    On sait que Pierre-Gilles de Gennes affectionnait particulièrement la physique des milieux granulairesgranulaires, comme celle des dunes de sablessables. Le processus de formation et de propagation de celles-ci fait intervenir ce qu'on appelle la saltation des grains de sable.

    Sous l'action du ventvent, ceux-ci décollent du sol, prennent de la vitesse avant de retomber plus loin et d'heurter éventuellement un autre grain de sable en le faisant décoller. Lequel à son tour pourra en mettre un autre en mouvement et ainsi de suite.

    Le mécanisme est simple et facilement mis en équation. Toutefois, lorsque l'on effectue des mesures, on découvre que la réalité ne correspond pas exactement aux prédictions. Les quantités de grains de sable mises en mouvement et la hauteur atteinte lors d'un saut en fonction de la vitesse du vent sont respectivement plus grandes et moins importante. Ennuyeux si l'on veut comprendre dans les détails nombre de phénomènes...

    Ainsi, ce déplacement par petits bonds (la saltation) joue-t-il un rôle-clé, non seulement dans la formation des dunes, comme sur Mars, mais aussi dans l'érosion éolienneéolienne et le transport des sédimentssédiments dans les océans. Surtout, ce phénomène est directement relié à la quantité de poussières minérales, formant des aérosolsaérosols, injectées dans l'atmosphèreatmosphère. Or, celles-ci interviennent sur Terre dans les bilans d'absorptionabsorption de la lumière par l'atmosphère, et comme germesgermes de nucléationnucléation pour la formation des nuagesnuages.

    Ce ne sont donc pas seulement les dunes martiennes et terrestres qui seraient mieux comprises avec une bonne modélisationmodélisation de la saltation des grains de sable. Nos prévisions sur l'évolution du climatclimat pourraient aussi devenir plus précises.


    Un champ de dunes sur Mars. Cliquez pour agrandir. Crédit : Nasa/JPL/Cornell

    Devant les désaccords entre la théorie et l'expérience, Nilton Renno, professeur dans le département des sciences de l'espace, des océans et de l'atmosphère, et qui travaille sur la mission martienne Phoenix, a décidé d'introduire les forces électriques dans les équations modélisant la saltation.

    L'idée n'est pas nouvelle, et l'on sait bien que, sous l'action des forces de frottement, des particules finesparticules fines peuvent s'électriser, et même produire des éclairséclairs comme dans le cas des panaches volcaniques. C'est en mesurant les champs électriqueschamps électriques dans les tourbillonstourbillons de poussières en Arizona que Renno a eu la surprise de découvrir des champs électrostatiquesélectrostatiques plus élevés que ce que l'on imaginait.

    Avec son étudiant de thèse, Jasper Kok, il a alors réussi, le premier, à donner une modélisation satisfaisante de l'effet de saltation en introduisant des forces électrostatiques. Ainsi, lorsque le sol est humide, et sous l'action des forces de frottement, ce dernier se charge positivement alors que les grains deviennent chargés négativement.

    Schéma représentant la distribution des charges sur une dune et la force électrostatique s'ajoutant à la force de gravité pour un modèle de saltation des grains de sable. U(z) est le profil de la vitesse du vent avec l'altitude. Crédit : Jasper Kok

    Schéma représentant la distribution des charges sur une dune et la force électrostatique s'ajoutant à la force de gravité pour un modèle de saltation des grains de sable. U(z) est le profil de la vitesse du vent avec l'altitude. Crédit : Jasper Kok

    La présence d'un champ électrostatique augmente alors la quantité de grains de sable participant au processus de saltation d'un facteur deux, mais diminue la hauteur atteinte par ceux-ci. Et cette fois-ci les expériences sont en accord avec les observations !

    Renno s'attend à des phénomènes plus spectaculaires sur Mars où de véritables décharges électriques pourraient se produire dans les dunes lorsque le vent souffle. Des champs électriques importants sont en effet prédits par leur théorie dans l'environnement martien. Ceux-ci provoqueraient l'apparition de grandes quantités de peroxyde d'hydrogèneperoxyde d'hydrogène, en d'autres termes de l'eau oxygénée, néfaste à la vie telle que nous la connaissons. De fait, du peroxyde d'hydrogène, a bien été découvert sur Mars... Un élément qui appuie avec force la thèse des dunes électriques.