Si aujourd’hui, les agences spatiales visent officiellement la Lune, elles ont déjà le regard tourné vers Mars. Mais pour installer durablement une colonie sur la Planète rouge, il faudra envisager de la terraformer. Des chercheurs envisagent quelques solutions pour y arriver.


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    La terraformation. Il en est souvent question en science-fiction. Mais pour la science tout court, imaginer mettre l'idée en œuvre - transformer un environnement pour le rendre habitable par les humains - reste aujourd'hui encore difficile. Pourtant, les scientifiques estiment que si nous souhaitons coloniser Mars, par exemple, il faudra sérieusement l'envisager. Un premier pas, selon une équipe internationale incluant le scientifique en chef de la Nasa, James Green, serait de reformer autour de la Planète rouge un bouclier magnétique perdu, ou presque, depuis longtemps.

    Le saviez-vous ?

    Pour permettre aux colons humains d’évoluer sur Mars sans avoir besoin de combinaisons pressurisées, il faudrait aussi réussir à faire monter la pression atmosphérique qui règne sur place. Au-delà de celle qui correspond sur Terre, celle qui règne à la limite d’Armstrong. Une altitude d’environ 19.000 mètres à laquelle la pression est inférieure à 0,07 atmosphère. À cette pression, l’eau peut bouillir dès 37 °C. De mauvais augure pour celle qui circule dans nos yeux, par notre salive ou encore dans nos poumons. Sous une pression inférieure à celle qui règne à la limite d’Armstrong, nous serions rapidement transformés en bouillon de chair humaine. Peu ragoûtant…

    Le champ magnétique qui entoure la Terre nous protège en effet de la plupart des particules chargées à haute énergie qui nous arrivent du Soleil. Il les dévie et les empêche ainsi d'atteindre la surface. Il nous protège également plus largement des effets du vent solaire sur l'atmosphèreatmosphère. Car ce dernier a la fâcheuse tendance à littéralement décaper les atmosphères non protégées. C'est ce qui semble d'ailleurs être arrivé à Mars. Son atmosphère autrefois épaisse s'est progressivement appauvrie.

    Le champ magnétique de notre Terre est créé par effet dynamoeffet dynamo. Par des mouvementsmouvements du noyau de fer au cœur de notre Planète. Mais le noyau de Mars est trop petit et pas assez chaud pour ça. Alors, les chercheurs ont pensé à d'autres idées. S'il n'est pas possible de créer un flux de particules chargées dans les profonds de la Planète rouge, pourquoi ne pas envisager d'en créer un... autour de Mars ?

    Les chercheurs imaginent qu’un tore de plasma pourrait créer un champ magnétique protecteur autour de Mars. © Ruth Bamford, STFC
    Les chercheurs imaginent qu’un tore de plasma pourrait créer un champ magnétique protecteur autour de Mars. © Ruth Bamford, STFC

    Un champ magnétique grâce à Phobos

    Pour cela, les chercheurs comptent sur PhobosPhobos. Phobos est la plus grande des deux lunes de Mars. Toute modestie gardée. Car les astronomesastronomes fixent son plus grand diamètre à moins de 30 kilomètres. Mais c'est aussi celle des deux luneslunes de Mars qui orbiteorbite au plus près de la Planète rouge. Sur une trajectoire relativement circulaire, à quelque 6.000 kilomètres du sol martien seulement.

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    Mars : vidéo inédite de la lune Phobos

    Ce que les chercheurs suggèrent, c'est que les particules qui constituent le sol de Phobos puissent être ionisées puis accélérées. Elles pourraient ainsi, le long de l'orbite de la lune, créer une sorte de tore de plasma. Qui donnerait lui-même naissance à un champ magnétique suffisamment puissant - selon les astronomes, il n'y aurait pas besoin de bien plus que ce que peut générer un aimantaimant assez classique, mais à répéter tout autour de la planète - pour protéger les colons humains qui pourraient vouloir s'installer à long terme sur Mars.

    Parmi les difficultés, la quantité d'énergie nécessaire à l'opération. Les chercheurs estiment qu'il faudrait au moins autant d'énergie pour cela que ce qui a été consommé sur Terre en 2020. Et pour résoudre ce problème-là, ils espèrent bien pouvoir compter sur la fusion nucléaire. Une source d'énergie qui pourrait, de toute façon, s'avérer indispensable à la colonisation.

    Le plan est donc des plus audacieux. Les obstacles sont nombreux. Mais pour les chercheurs, il est temps de se poser sérieusement la question. Parce que quand nous serons prêts à aller sur Mars, il faudra aussi être prêt à proposer des solutions innovantes.


    Mars : la Nasa propose de la rendre habitable en recréant son champ magnétique

    Lors d'un récent colloque de la Nasa, des chercheurs ont proposé une idée ingénieuse pour terraformer Mars : créer un bouclier magnétique artificiel pour supprimer l'érosion de son atmosphère.

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco paru le 07/03/2017

    Cette illustration suggère l’environnement humide de Mars voici 4 milliards d’années. La toute jeune planète devait renfermer suffisamment d’eau liquide pour que l’intégralité de sa surface en soit couverte, sur une hauteur d’environ 140 m. Il semble plus probable toutefois que l’eau liquide se soit constituée en un océan occupant près de la moitié de l’hémisphère nord de la planète. En certaines régions, sa profondeur pouvait dépasser 1,6 km. © ESO, M. Kornmesser
    Cette illustration suggère l’environnement humide de Mars voici 4 milliards d’années. La toute jeune planète devait renfermer suffisamment d’eau liquide pour que l’intégralité de sa surface en soit couverte, sur une hauteur d’environ 140 m. Il semble plus probable toutefois que l’eau liquide se soit constituée en un océan occupant près de la moitié de l’hémisphère nord de la planète. En certaines régions, sa profondeur pouvait dépasser 1,6 km. © ESO, M. Kornmesser

    Bien que située dans la zone d'habitabilitézone d'habitabilité du Soleil, Mars est différente de la Terre. La pressionpression de son atmosphère est en effet très faible (elle représente 1/160e de celle de la Terre) et elle contient 95,32 % de CO2, seulement 2,7 % d'azoteazote et 0,13 % d'oxygèneoxygène. La température moyenne à sa surface est basse elle aussi : - 53 °C. L'eau ne semble exister sur le sol que sous forme de glace. Toutefois, tout indique que dans un passé lointain, il y a environ quatre milliards d'années, la planète était bien plus accueillante, avec des océans, une atmosphère plus dense et plus chaude grâce à un effet de serreeffet de serre.

    C'est en perdant son champ magnétique que Mars aurait dilapidé son atmosphère (et une grande partie de son eau). La cause ? L'érosion provoquée par les vents solaires, si l'on en croit les données fournies par la sonde Maven de la Nasa. Ces deux conditions, absence de champ magnétique entretenue par une dynamo interne qui ne fonctionne plus depuis longtemps et l'absence d'une atmosphère épaisse, ont fait de notre voisine un monde froid et aride dont la surface est soumise au bombardement délétère des rayons cosmiquesrayons cosmiques. Cela n'a pas pour autant découragé l'humanité qui espère bien coloniser un jour la Planète rouge. Certains espèrent même la terrarformer en faisant fondre les massesmasses de glace sècheglace sèche et d'eau qui recouvrent ses pôles.

    Une illustration du concept de la création d’une magnétosphère artificielle pour Mars. © Nasa, J.Green
    Une illustration du concept de la création d’une magnétosphère artificielle pour Mars. © Nasa, J.Green

    Un bouclier magnétique au point de Lagrange L1 de Mars

    Mais cette seconde Terre ne saurait durer. En effet, la faible gravitégravité de Mars et, toujours, l'érosion de son atmosphère la rendraient de nouveau inhospitalière en quelques milliers d'années seulement. Cela serait même définitif car elle aurait perdu ses dernières réserves en eau et en gaz carboniquegaz carbonique.

    Toutefois, un groupe de chercheurs vient de proposer une solution révolutionnaire à ce problème lors du colloque de la Nasa Planetary Science Vision 2050 qui s'est déroulé à Washington. Le concept semble tout droit sorti de la science-fiction, ou pour le moins, s'il n'est pas aussi fou que celui de la sphère de Dysonsphère de Dyson ou de l'Étoile de la Mort de Star Wars, il est du calibre des stations spatialesstations spatiales de Gerard O'Neill. Il ne s'agirait pas moins que de placer au point de Lagrange L1 du système Mars-Soleil un objet qui se comporterait comme un dipôle magnétique, ou en terme moins technique, un aimant. Simulations numériquesSimulations numériques à l'appui, ils auraient montré qu'une magnétosphèremagnétosphère artificielle pourrait ainsi être déployée et serait capable de protéger de l'érosion du vent solaire ce qui reste de l'atmosphère de Mars. Cela pourrait prendre la forme d'une sorte de ballonballon gonflable en mesure de générer des champs magnétiques dont l'intensité serait de 1 à 2 teslasteslas.

    Reste que l'on ne dispose pas d'une évaluation précise du dispositif qui serait capable de générer un tel champ et on peut sans doute imaginer qu'il nécessiterait une source d'énergie importante. D'où viendrait-elle ? Du rayonnement solairerayonnement solaire avec des cellules photovoltaïquescellules photovoltaïques ? On ne sait pas non plus comment il est envisagé de la construire ni quel serait le coût d'une telle entreprise. Cela reste en tout cas un bel exercice intellectuel à poursuivre et, qui sait où l'humanité en sera d'ici un siècle avec la technologie de la fusion contrôlée et l'exploitation robotiquerobotique des astéroïdes ?