Faudrait-il reconsidérer l’histoire géologique de Mercure ? Une nouvelle étude suggère que la planète aurait pu un jour présenter certaines conditions d’habitabilité. En témoigne la présence de vastes glaciers de sel cachés sous sa surface hostile.


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    Lorsque l'on parle de planète pouvant ou ayant pu abriter la vie, Mercure semble totalement hors jeu. Surchauffée par le Soleil dont elle n’est espacée que de 46 millions de kilomètres, cette petite planète aride et sans atmosphèreatmosphère est en effet bien loin de présenter les conditions nécessaires à l'émergenceémergence de la vie.

    En surface tout du moins. Car les choses pourraient être bien différentes en profondeur. C'est ce que suggère une nouvelle étude publiée dans la revue The Planetary Science Journal. De nouvelles données qui viennent perturber notre vision de la zone considérée comme habitable dans les systèmes planétaires et élargir notablement le champ des possibilités en astrobiologieastrobiologie.

    Mercure est la plus proche planète du Soleil. Elle se situe hors de la zone habitable du Système Solaire (schéma non à l'échelle). © Daniel Roberts, Pixabay
    Mercure est la plus proche planète du Soleil. Elle se situe hors de la zone habitable du Système Solaire (schéma non à l'échelle). © Daniel Roberts, Pixabay

    Des glaciers de sels libérant des éléments volatils

    Sa distance par rapport au Soleil place Mercure hors de la zone habitable, qui pour notre Système solaire se situe entre VénusVénus et Mars. Avec plus de 400 °C en plein soleil, aucune chance en effet de trouver de l'eau liquide. Pourtant, on sait aujourd'hui que certaines planètes pourraient présenter des conditions d'habitabilité favorables malgré un environnement de surface extrêmement hostile. Les océans cachés des luneslunes glacées de JupiterJupiter et de SaturneSaturne en sont de parfaits exemples. Mais à part un énorme noyau de ferfer et une fine enveloppe silicatée, Mercure ne cache aucun océan d'eau liquide. Alors, où les scientifiques ont-ils bien pu trouver des conditions potentiellement aptes à avoir pu abriter la vie ?

    Le noyau de Mercure est énorme. Sa surface cratérisée et sans atmosphère la fait par contre ressembler à la Lune. © <em>Goddard Space Flight Center</em>, Nasa
    Le noyau de Mercure est énorme. Sa surface cratérisée et sans atmosphère la fait par contre ressembler à la Lune. © Goddard Space Flight Center, Nasa

    Eh bien, dans des glaciersglaciers... de sel ! Alors que l'on pensait que la croûtecroûte de Mercure était totalement dénuée de tous composants volatils, le passage de la sonde Messenger entre 2011 et 2015 a fait voler en éclat cette certitude. Du soufresoufre, du chlorechlore, du sodiumsodium et du potassiumpotassium avaient en effet été détectés à la surface de la planète. Des éléments volatils semblant émaner de la subsurface et laissant penser à la présence d'un « réservoir » caché dans le sous-sol de la planète.

    Un milieu plus favorable à la vie dans le sous-sol de Mercure ?

    La nouvelle étude révèle d'ailleurs que ces niveaux riches en éléments volatils pourraient être bien plus vastes qu'on ne le pensait précédemment. Les résultats suggèrent en effet que les émanations d'éléments volatils sont plus importantes dans des zones de terrain très chaotique, dont la morphologiemorphologie rappelle celle des glaciers martiens. L'analyse de ces terrains, notamment au niveau des pôles, montre qu'il s'agirait de grands dépôts de sel ayant emprisonné des éléments volatils au moment de leur formation. Enfouis pendant plus d'un milliard d'années dans le sous-sol de Mercure, ces glaciers très spécifiques auraient ensuite été exposés à la surface grâce aux impacts d'astéroïdesastéroïdes.

    Les terrains chaotiques de <em>Borealis Chaos</em>, au niveau du pôle Nord de Mercure. Les cratères <em>Raditladi</em> et <em>Eminescu</em> révèlent la présence possible de glaciers de sel. © Nasa
    Les terrains chaotiques de Borealis Chaos, au niveau du pôle Nord de Mercure. Les cratères Raditladi et Eminescu révèlent la présence possible de glaciers de sel. © Nasa

    Il existe des analogues terrestres à ce genre de glacier, notamment les dépôts salins et arides du désert d’Atacama au Chili. Or, nous savons que de tels environnements peuvent représenter des niches aux conditions d'habitabilité favorable pour des organismes extrémophiles.

    De nouvelles perspectives en astrobiologie

    Sur la base de modélisationsmodélisations, les chercheurs suggèrent que ces glaciers se seraient formés lors de l'effondrementeffondrement d'une atmosphère primordiale éphémère et chaude tout au début de l'histoire de Mercure, avant l'épisode du Grand Bombardement tardif. L'eau de l'atmosphère, émise par l'activité volcanique, aurait ainsi condensé en surface durant les longues et froides périodes nocturnesnocturnes que connaît la planète en raison de sa lente rotation sur elle-même. Ce scénario suggère donc la présence temporaire, il y a environ 4 milliards d'années, de mers peu profondes et très salées. L'évaporation rapide qui a suivi et la perte de l'eau dans l'espace auraient alors entraîné la formation de ces immenses dépôts de sel au sein de la croûte.

    Une nouvelle histoire géologique qui pourrait donner à Mercure et à ses analogues ailleurs dans la GalaxieGalaxie un nouvel attrait dans la recherche de vie extraterrestre.