Si planète 9 (ou planète X) il y a, le déplacement de cet astre sombre, repérable dans l'infrarouge a peut-être été enregistré par le télescope spatial Wyse. Mais pour dénicher ces traces, infimes, dans les milliers de clichés existants, il faudrait une puissance informatique démesurée. Alors la Nasa fait appel aux internautes, du moins à ceux qui comprennent l'anglais, avec le programme Backyard Worlds: Planet 9.

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    Il y a un an, Mike Brown et Konstantin Baytgin, du Caltech, annonçaient que les anomaliesanomalies des trajectoires d'une demi-douzaine d'objets transneptuniens récemment découverts peuvent s'expliquer par la présence d'une neuvième planète. Née comme les huit autres il y a plus de 4,5 milliards d'années, elle nous serait toujours demeurée cachée car trop éloignée et trop sombre.

    Beaucoup d'astronomesastronomes sont partis à sa recherche ces derniers mois, les uns s'employant à composer un portrait-robot, les autres à inférer les régions du ciel où elle peut se cacher. Des chercheurs emmenés par Alessandro Morbidelli, de l'observatoire de Nice-Côte d'Azur, ont par ailleurs montré que l'existence de cet astre pourrait aussi expliquer la curieuse inclinaison de 6° du plan de l’orbite des planètes (l'écliptiqueécliptique) autour du Soleil par rapport à son équateuréquateur.

    Mais il faut savoir ratisser large car cet objet dont le profil serait comparable à celui d'une super-Terresuper-Terre ou d'une mini-Neptune, 5 à 20 fois plus massive que la Terre pour un diamètre estimé à quatre fois celui de notre planète, se baladerait dans les confins de notre Système solaire jusqu'à 1.200 fois la distance entre la Terre et le Soleil (1.200 UA ou unités astronomiques) et, au plus près, à environ cinq fois la distance entre la Terre et PlutonPluton (200 UA).

    Si elle existe bel et bien, sa balade autour de notre étoile lui prendrait quelque quinze millénaires. Aussi, il est extrêmement difficile de discerner son déplacement, très lent, par rapport au fond étoilé. D'autant plus que, rappelons-le, sombre et froid (sa température est estimée à -226 °C), l'astre rayonne davantage dans l'infrarougeinfrarouge que dans le visible. Toutefois -- mais cela dépend notamment, à cette distance, de la taille de l'objet --, il a très bien pu être enregistré par le satellite Wise (Wide-field Infrared Survey Explorer) lors de ses sondages de la voûte céleste entre 2010 et 2011.


    Teaser pour le projet Backyard Worlds. © Nasa

    Cherchez la neuvième planète avec Backyard Worlds: Planet 9

    N'importe quel internaute anglophone peut désormais partir sur les traces de l'hypothétique planète 9 -- aussi désignée planète X. En effet, grâce au programme Backyard Worlds: Planet 9 mis en place par la NasaNasa (des tutorielstutoriels sont disponibles), tout un chacun est invité à contribuer à l'effort des astronomes pour débusquer cet astre obscur supposé caché par-delà NeptuneNeptune (et les broussailles, à l'arrière-plan, de multitudes d'étoiles), simplement en donnant de son temps pour analyser les nombreuses séquences issues de la base de donnéesbase de données de Wise. En d'autres termes, il s'agit de trouver un objet qui serait plus petit qu'une aiguille -- et dont son existence n'est même pas certaine -- dissimulée dans une gigantesque botte de foin plongée dans les ténèbres... La tâche est immense mais pas impossible, aussi plus on est nombreux à chercher, mieux c'est.

    Il suffit donc de guetter les objets en mouvementmouvement sur chacune des images du ciel présélectionnées. C'est un travail que pourraient accomplir les ordinateursordinateurs, mais que ceux-ci se laissent plus facilement duper par des artefacts, surtout dans des régions surpeuplées d'étoiles comme la Voie lactéeVoie lactée. C'est pourquoi la Nasa préfère s'en remettre à l'œilœil humain, plus apte à distinguer un corps qui se déplace d'un simple défaut. En somme, c'est « une version du XXIe siècle de la technique employée par l'astronome Clyde Tombaugh pour trouver Pluton en 1930 [cela faisait 87 ans le 18 février, NDLRNDLR] », résume la Nasa.

    « Il y a un peu plus de quatre années-lumièreannées-lumière entre Neptune et Proxima du Centaure, l'étoile la plus proche de nous, rappelle le directeur du projet, l'astrophysicienastrophysicien Marc Kuchner, du Goddard Space Flight CenterGoddard Space Flight Center de la Nasa, et une grande partie de ce vaste territoire est inexplorée. » Les chercheurs s'attendent aussi à d'autres découvertes, au-delà des frontières du Système solaire, comme des naines brunes, tapies dans notre voisinage. « [Elles] se forment comme des étoiles mais évoluent comme des planètes, les plus froides étant un peu comme JupiterJupiter », explique Jackie Faherty, astronome au Musée américain d'Histoires naturelles de New York, partenaire avec la Nasa, l'UC Berkeley, l'Arizona State University, le Space Telescope Science Institute et la collaboration Zooniverse, de Backyard Worlds.

    Qui sait, l'un d'entre vous en sera peut-être le découvreur ? En tout cas, la Nasa compte sur nous. Si elle est trop petite pour être repérée sur les observations de Wise, beaucoup d'astronomes pensent qu'elle sera à la portée des nouvelles générations de télescopestélescopes qui vont bientôt sortir de terre comme le LSST (Large Synoptic Survey TelescopeLarge Synoptic Survey Telescope) au sommet du Cerro Pachón, au Chili en 2022. Les plus optimistes, comme Brown et Baytgin, tablent, quant à eux, sur une découverte dans les trois années à venir voire avant...