A peine Hubble vient-il de reprendre du service qu’il a peut-être déjà fait une remarquable découverte. Un groupe de galaxies observé avec la toute nouvelle caméra Wide Field Camera 3 semble se trouver très loin, à 13,1 milliards d’années-lumière, un record de distance. En bonus, le taux de formation stellaire y apparaît paradoxal.

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    Sans doute pour rattraper le temps perdu par les quelques mois qu'ont nécessité la mise à niveau de HubbleHubble, les astrophysiciensastrophysiciens et les cosmologistes ont déjà déniché des galaxies si anciennes que si l'on rapporte l'âge de l'Univers observable à celui d'un adulte, les images obtenues le montrent à l'âge d'environ 4 ans !

    D'habitude, la distance, et en fait la période dans l'histoire de l'Univers, se mesure, lorsque l'on considère des milliards d'années-lumière, à l'aide du fameux décalage spectral vers le rouge. En effet que si l'on prend un ballon quadrillé représentant l'espace en expansion avec des galaxies situées à chaque intersection du quadrillage, une sinusoïde dessinée sur la surface du ballon verra sa longueur d'onde augmenter avec le temps.

    Ainsi, pour tout observateur situé dans le cosmoscosmos à l'intérieur d'une galaxie, et bien que les galaxies elles-mêmes soient fixes et ne participent pas à l'expansion, plus la lumière observée vient d'une région lointaine, plus son temps de trajet aura permis à l'expansion d'en augmenter la longueur d'onde.

    C'est pourquoi tous les observateurs auront l'impression d'être au centre d'un Univers que fuient les galaxies, avec un décalage spectral ressemblant à celui de l'effet Dopplereffet Doppler et augmentant avec la distance. Il n'en est bien sûr rien et seule entre en jeu l'expansion de l'espace qui est une prédiction presque inévitable de la relativité généralerelativité générale quand on considère le cosmos à suffisamment grande échelle.

    A des distances de quelques milliards d'années-lumière seulement, il est aussi possible de relier certains aspects des images des galaxies, comme leurs couleurscouleurs, à leurs distances. On dispose donc d'un autre moyen pour estimer des distances cosmologiques. Mais plus on considère des distances importantes, plus l'incertitude sur la mesure de la distance des objets célestes croit.

    En l'occurrence, la Wide Field Camera 3 (WFC3) vient de fournir des images encore peu distinctes d'une vingtaine de galaxies dont 16 sont très probablement à 12,9 milliards d'années-lumière mais 5 autres pourraient bien établir un nouveau record de distance. Selon certains chercheurs, la lumière de ces 5 galaxies proviendraient en effet d'une période où l'Univers observable n'était âgé que de 600 millions d'années !

    Des séries d'images dans le visible et l'infrarouge des 16 galaxies situées à 12,9 milliards d'années-lumière. Crédit : Oesch <em>et al.</em>, STScI, Nasa, Esa

    Des séries d'images dans le visible et l'infrarouge des 16 galaxies situées à 12,9 milliards d'années-lumière. Crédit : Oesch et al., STScI, Nasa, Esa

    Pas assez de jeunes étoiles

    Que le record de distance soit battu reste donc encore à confirmer mais d'ores et déjà, quelque chose intrigue les cosmologistes. Pendant les premières centaines de millions d'années de l'existence du cosmos observable, la théorie du Big BangBig Bang veut que le taux de formation des étoilesétoiles soit important. Il en découle que le flux de rayons ultravioletsultraviolets émis par les jeunes étoiles devait lui aussi être conséquent et à l'origine d'une réionisationréionisation partielle de l'hydrogènehydrogène du milieu interstellaire. Ce dernier était devenu neutre lorsque les atomesatomes se sont formés environ 380.000 ans après la naissance de l'Univers.

    Or, les images fournies par la WFC3 ne concordent pas avec cette théorie. Les observations en infrarougeinfrarouge conduisent pour ces galaxies lointaines à un taux de formation stellaire de 0,0025 massemasse solaire par an, ce qui est ridicule si on le compare au taux de J1148+5251, une galaxie plus jeune de quelques centaines de millions d'années seulement. Ce taux doit se traduire par un faible nombre de jeunes étoiles et donc un faible flux de rayonnement ultraviolet.

    Il y a donc une énigme si l'on veut expliquer la réionisation.

    Toutefois, les galaxies observées étant les plus lumineuses et les plus massives, il se pourrait, et la théorie de la formation des galaxies l'implique, qu'en réalité, il n'y ait majoritairement à cette époque reculée que des galaxies nainesgalaxies naines destinées à fusionner pour créer des galaxies comme la Voie lactéeVoie lactée. Ce serait alors ces dernières qui produiraient le plus d'étoiles et donc le plus de rayonnement ultraviolet.

    Herschel devrait nous aider à y voir plus clair. En attendant, deux articles sur cette découverte existent sur ArxivArxiv.