Pour la première fois, des chercheurs ont pu étudier une éjection de masse coronale ou CME jaillissant d’une autre étoile que le Soleil. Cette observation ouvre la voie à la caractérisation de ces phénomènes émanant d’autres étoiles dans la Galaxie.


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    OU Andromedae, appelée aussi HR 9024, intrigue les astronomesastronomes depuis de nombreuses années. L'intense luminositéluminosité dans le rayonnement X de cette géante rougegéante rouge qui tourne très vite sur elle-même semble provenir de sa couronne où tout indique qu'elle est le théâtre de grandes éruptions.

    Dans une étude qui vient de paraître dans Nature Astronomy, une équipe de chercheurs a pu épingler une véritable éjection de masse coronale (en anglais, Coronal Mass Ejection ou CME), comme le Soleil peut en produire, sauf que dans le cas de HR 9024, elles sont, comme on peut le deviner, plus impressionnantes.

    L'auteure principale de l'article, Costanza Argiroffi, de l'université de Palerme, souligne que l'événement qu'ils ont pu disséquer grâce aux données collectées par l'instrument HETGS (High-Energy Transmission Grating Spectrometer) installé sur le télescope spatial Chandratélescope spatial Chandra, est en accord avec leurs prédictions. Celles-ci, pourtant, s'appuient « sur l'observation de l'environnement solaire où les éruptions les plus extrêmes sont 100.000 fois moins intenses dans le rayonnement X ».

    En outre, les chercheurs ont constaté que la vitesse de l'éruption de HR 9024 est en deçà de ce à quoi ils s'attendaient à voir, ce qui voudrait dire que même si le processus est analogue aux CME solaires -- mais ce sont « des versions à plus grande échelle » --, le champ magnétique de l'étoileétoile étudiée semble « moins efficace » cependant pour les accélérer.

    Puissante éruption solaire du 10 septembre 2017. Classée X8,2, elle a été observée par le satellite Hinode dans le rayonnement X. © Jaxa, Nasa, Hinode, SAO, MSU, Joy Ng
    Puissante éruption solaire du 10 septembre 2017. Classée X8,2, elle a été observée par le satellite Hinode dans le rayonnement X. © Jaxa, Nasa, Hinode, SAO, MSU, Joy Ng

    La première éruption « extrasolaire » étudiée en détail

    C'était un puissant flashflash dans le rayonnement X qui a trahi l'évènement : ce dernier s'est déroulé dans la couronne de HR 9024, à 450 années-lumièreannées-lumière de la Terre (il y a donc 450 ans). Les chercheurs ont pu suivre le mouvementmouvement ascendant et descendant d'une bouffée de plasma -- chauffée entre 10 et 25 millions °C -- et mesurer sa vitesse de déplacement : de 360.000 kilomètres par heure à 1,5 million kilomètres par heure. L'équipe a aussi pu inférer que la masse de cette débauche de particules chargées atteignait près d'un milliard de tonnes, ce qui représente 10.000 fois la masse de la plus grande CME du Soleil jamais enregistrée.

    Mais « le point le plus important de notre travail [...], commente l'auteure principale de l'étude, est que nous avons constaté, après l'éruption, que le plasma le plus froid -- "seulement" 3,8 millions °C -- sortait de l'étoile à une vitesse constante d'environ 300.000 kilomètres par heure. Ces données correspondent exactement à ce à quoi on aurait pu s'attendre pour la CME associé à l'éruption ».

    Voir aussi

    Des éruptions solaires simulées par ordinateur avec succès


    Une éruption observée sur une étoile !

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 20 décembre 2007

    La performance est comparable à celle qui permettrait de détecter depuis la Terre les empreintes de pas d'Armstrong sur la LuneLune. Les astronomes de l'Eso ont en effet reconstruit l'emplacement  des éruptions à la surface d'une étoile. Problème : elles ne semblent pas associées aux taches de sa surface.

    L'étoile BO Microscopii est une jeune étoile, âgée de 30 millions d'années environ et située à 150 années-lumière. Elle tourne particulièrement rapidement sur elle-même, ce qui lui a valu le surnom de Speedy Mic. En effet, sa période de rotationpériode de rotation n'est que de 9 heures seulement alors que sa masse correspond à 90 % de celle de notre Soleil, qui lui tourne sur lui-même en 26 jours environ (il ne s'agit cependant que d'une moyenne pour ce dernier qui  possède en réalité une rotation différentielle, plus rapide à l'équateuréquateur que vers les régions des pôles).

    Speedy Mic tourne donc 66 fois plus vite que notre Soleil et, comme on pouvait s'y attendre, son champ magnétique est aussi beaucoup plus intense que celui de notre étoile dont on pense qu'il est généré par un effet dynamoeffet dynamo similaire à celui opérant sur Terre. Ce champ magnétique intense doit avoir des répercussions sur l'équivalent des taches solairestaches solaires à la surface de Speedy Mic. On sait que celles-ci sont des lieux où le champ magnétique est plus fort à la surface du Soleil.

    Une étoile laboratoire pour comprendre l'enfance du Soleil

    Notre étoile devait elle aussi tourner plus rapidement sur elle-même à sa naissance. Par conséquent, étudier BO Microscopii, avec sa masse proche de celle du Soleil, c'est probablement un bon moyen pour comprendre à la fois l'enfance du Soleil et les connexions entre champ magnétique, rotation et activité d'une étoile sous forme d'éruptions et de taches.

     
    La distribution des taches, en noir et orange,  est asymétrique et concentrée aux latitudes moyennes. Les cartes représentent la surface de l'étoile à différents moments de sa période de rotation, comme indiqué par les chiffres supérieurs. Le cercle bleu montre l'emplacement d'une éruption, détectée en octobre 2006. Cliquez pour agrandir
    La distribution des taches, en noir et orange,  est asymétrique et concentrée aux latitudes moyennes. Les cartes représentent la surface de l'étoile à différents moments de sa période de rotation, comme indiqué par les chiffres supérieurs. Le cercle bleu montre l'emplacement d'une éruption, détectée en octobre 2006. Cliquez pour agrandir

    Les astronomes ont donc entrepris d'étudier la surface de Speedy Mic mais la résolutionrésolution nécessaire pour détecter des taches directement serait telle qu'il faudrait disposer d'un miroirmiroir de 400 km de diamètre !

    Les obstacles sont faits pour être contournés et c'est pourquoi des images ont pu être obtenues indirectement grâce à la technique de l’imagerie par effet Doppler. Avec le spectrographespectrographe UVES du VLTVLT, les astronomes ont pris 142 spectresspectres de Speedy Mic et, en étudiant les décalages Doppler causés par la rotation de l'étoile, ils ont pu reconstruire une image de sa surface indiquant la présence de taches.

    La surprise est venue de la détection d'éruptions à la surface de BO Microscopii par XMM-NewtonXMM-Newton, le télescope spatial de l'Esa. Les bouffées de rayons Xrayons X émises ont duré quatre heures chacune environ. Ces éruptions ressemblent beaucoup à celles que l'on observe sur le Soleil mais avec deux différences importantes. Les bouffées X sont une centaine de fois plus énergétiques que celles des plus grosses éruptions solaireséruptions solaires. La seconde originalité est que, contrairement au cas du Soleil, les éruptions de Speedy Mic ne sont pas associées à la localisation des taches. Sur le schéma ci-dessus, le cercle bleu montre l'emplacement d'une éruption détectée en octobre 2006 et ne coïncide pas avec les taches représentées en noir et orange.

    Les astrophysiciensastrophysiciens espèrent mieux comprendre notre Soleil grâce à Speedy Mic, et peut-être mieux appréhender les risques que les colères solaires peuvent faire peser sur notre civilisation technologique.