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Vue d'artiste du dispositif, tel qu'un astronaute l'aurait devant les yeux, montrant l'écran au poignet, des balises radio (beacons), un avant-poste (outpost) et le module de descente (lander) © Kevin Gecsi, courtesy of Ohio State University
Le 6 février 1971, Alan Sheppard et Ed Mitchell quittent le module lunaire Antares de la mission ApolloApollo 14 pour s'élancer à l'assaut du Cone Crater. Les géologuesgéologues leur ont assigné cet objectif à cause de l'âge de cette formation, plus de quatre milliards d'années, ce qui en fait un excellent lieu de récolte d'échantillons, propres à raconter la prime histoire de la Lune.
Emplis d'enthousiasme, les deux astronautes marchent d'un bon pas de montagnard pour rejoindre l'autre versant du cratère, où doivent se trouver les roches les plus anciennes. Il suffit, après avoir atteint le pied de la pente, de monter 120 mètres pour atteindre le sommet... Les hommes réalisent vite que l'entreprise sera difficile. Comme ils l'avaient remarqué la veille durant leur première sortie, l'environnement lunaire est riche d'illusions d'optique.
Parce qu'il n'existe pas de repères de dimensions connues (des arbresarbres par exemple), parce que l'horizon est bien plus proche que sur la Terre et enfin parce que, sans atmosphèreatmosphère, les différences de luminositéluminosité du sol sont énormes entre les zones éclairées (aveuglantes) et les endroits à l'ombre (obscurs), le relief et les distances s'évaluent mal. Là où les astronautes voient une vaste étendue plate, ils découvrent parfois « une ondulation qui monte et descend en de longues vaguesvagues douces et trompeuses », qui « font plutôt penser à la surface d'un océan », comme le racontera Alan Sheppard dans le livre écrit avec Deke Slayton (Ils voulaient la Lune, éditions J'ai Lu, 1996). Après une heure et demie de lutte sur la pente recouverte d'une poussière fine qui glisse sous leurs bottes comme du sablesable, les deux hommes doivent abandonner à 25 mètres du sommet et redescendre (non sans avoir tout de même prélever au burin quelques cailloux qui seront datés à quatre milliards d'années).
La Lune, un milieu trompeur
Les missions ultérieures, jusqu'à Apollo 17, démontreront combien il est difficile de se repérer sur le sol lunaire, pour des marches de quelques kilomètres ou pour des excursions motorisées. Le problème n'est pas anecdotique et impose de mettre au point un système de navigation fiable pour le programme Constellation qui devrait amener des hommes sur notre satellite vers 2020. Des équipes y travaillent actuellement et notamment celle de Ron Li, directeur du Mapping and Civil & Environmental Engineering & Geodetic Science Laboratory (Ohio State University).
Son laboratoire a déjà à son actif la réalisation de logicielslogiciels de navigation utilisés par Spirit et OpportunityOpportunity, les deux rovers qui cheminent sur la planète Mars depuis janvier 2004. En décembre dernier, la Nasa cherchait un lieu susceptible de servir de refuge d'hiverhiver pour les rovers, où les robotsrobots seraient à peu près à l'abri des ventsvents. Pour Spirit, l'analyse par l'équipe de Ron Li a montré que le rover risquait de ne pas atteindre l'abri prévu avant les premiers froids. Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont utilisé des images enregistrées par le rover lui-même complétées par celles prises depuis l'espace par la caméra HiRise (High Resolution Imaging Science Experiment) embarquée sur la sonde MRO (Mars Reconnaissance OrbiterMars Reconnaissance Orbiter).
C'est ce même principe de cartographie réalisée à partir de plusieurs sources qui pourrait être mis en œuvre sur la Lune. Baptisé Lunar Astronaut Spatial Orientation and Information System (LASOIS), le dispositif n'utiliserait pas nécessairement de satellites (en tout cas pas de satellites spécialisés dans le positionnement comme ceux de la constellationconstellation GPSGPS) mais des émetteurs-récepteurs au sol, installés sur le module de descente, les installations fixes, les véhicules et les scaphandres des astronautes.
Dans ce schéma, le système d'échanges radioradio servira d'abord aux communications mais aussi à la navigation. Les éléments mobilesmobiles (les hommes et les véhicules) seront équipés de capteurscapteurs de mouvementsmouvements ou de centrales à inertieinertie, permettant de suivre leurs trajectoires. Les informations seront transmises à un système central qui dressera peu à peu la carte en trois dimensions de l'aire où évolue l'équipe d'astronautes. Ces derniers disposeront sur leur combinaison d'un écran qui affichera une carte, montrant précisément l'endroit où ils se trouvent.
Le projet, sous la direction de Ron Li, dispose d'un budget de 1,2 million de dollars et l'équipe compte mettre au point un prototype en deux ans, qui sera testé dans le désertdésert de Mojave avant d'être confié pour essais à la Nasa.