Pourquoi vaut-il mieux se faire vacciner qu'être infecté par le SARS-CoV-2 ? Quelques éléments de réponse dans cet article.
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Alors que la campagne de vaccination démarre en France, la méfiance envers le vaccin ne cesse de s'accroître selon un récent sondage d'opinion. En effet, moins de la moitié de la population française serait prête à se faire vacciner contre la Covid-19. Dans les discours dominants, sont évoqués des risques de modifications du génome, la peur de ce qui se trouve à l'intérieur du vaccin ou encore, tout simplement, de potentiels effets indésirables sur le long terme.
Nous pourrions rentrer dans les détails techniques de pourquoi la modification du génome par le vaccin n'a qu'une chance infinitésimale d'arriver chez un individu. Nous pourrions retracer toute la chaîne de fabrication et d'homologation du vaccin. Nous pourrions retranscrire les résultats des récentes études cliniques qui démontrent une sécurité par rapport au placeboplacebo à court terme et dire pourquoi il y a peu de risque de voir des effets graves subvenir à plus long terme. Mais, tout cela passerait sans doute à côté de l'objectif qu'il faut atteindre : informer simplement pour rapidement inciter la population à préférer le vaccin plutôt que l'infection au SARS-CoV-2.
Revenir aux fondamentaux
Dans un récent billet de blog, Tania Louis, docteure en biologie moléculaire, médiatrice scientifique et auteure de l'ouvrage La folle histoire des virusvirus publié aux éditions humenSciences, appelle à revenir aux fondamentaux de la vulgarisation et de la médiation scientifique. Surtout, elle rappelle qu'il faut sans cesse s'adapter au sujet que l'on vulgarise, au public auquel on s'adresse et à l'objectif que l'on vise.
Ici, le sujet est la vaccinationvaccination contre la Covid-19, le public auquel on s'adresse est la population française et l'objectif est de transmettre des informations scientifiques à cet égard ; autrement dit, que la probabilité que le vaccin modifie notre génome est infime comparativement à la probabilité que l'infection y parvienne ; qu'un vaccin est un produit pharmaceutique soumis à énormément de tests et de contrôles et qu'il n'est tout simplement pas possible de tricher sur sa composition ; et que les essais cliniquesessais cliniques ont récemment démontré que les effets secondaires desdits vaccins étaient relativement similaires à ceux d'un vaccin placebo (avec l'efficacité sur la forme symptomatique de la maladie en plus).
Tu ne mentiras point
Il est toujours un petit peu nécessaire d'enjoliver et de simplifier la réalité des concepts et des interactions scientifiques complexes lorsqu'il s'agit de vulgariser les résultats de la science. Surtout lorsque l'on s'adresse à un public aussi large que la population française. L'exercice de la médiation est éminemment plus simple lorsque l'on est dans la réalité physiquephysique avec un petit groupe de personnes dont on peut évaluer le niveau de connaissances et avec lesquels on peut interagir. Pour autant, le vulgarisateur le sait, il ne faut pas tronquer le réel. C'est là tout le défi.
Pourtant, comme nous l'avons tous remarqué -- et Tania fait le même constat dans son billet de blogblog --, on a vu beaucoup de scientifiques affirmer de façon péremptoire qu'il était strictement impossible que le vaccin modifie notre génome. Pourtant, cela est faux. Et Tania use d'une métaphore particulièrement élégante pour en rendre la compréhension accessible à tous :
« Si l'ADNADN, le support de l'information génétiquegénétique, était la version officielle d'une chanson que vous écoutez chez vous, l'ARN messagerARN messager serait la version que vous fredonnez en vous baladant dans la rue. Il y a un lien entre les deux mais c'est l'ADN qui conduit à la production de l'ARN. Dans l'absolu, il n'est pas impossible que l'artiste d'origine vous croise dans la rue, vous entende fredonner, trouve votre interprétation super et vous invite à enregistrer une nouvelle version de la chanson, c'est-à-dire que l'ARN messager finisse par modifier l'ADN. Mais c'est quand même hautement improbable et il y a des tas d'autres choses qui ont plus de chances de vous arriver si vous fredonnez dans la rue. Comme de croiser un passant dont le regard moqueur vous inciterait à vous arrêter (ce qui peut être mis en parallèle avec la courte duréedurée de vie des ARN messagers). Tout comme il y a des tas d'autres choses qui ont influencé la version d'origine de la chanson et qui influenceront ses futures versions officielles, mais qui n'ont rien à voir avec votre fredonnement. »
Tu rempliras ton objectif
Mais, comme le fait remarquer Tania Louis, cette information seule ne remplit pas l'objectif visé. Au contraire, elle pourrait accroître la méfiance envers la vaccination. Ce qu'il faut donc faire par la suite, c'est expliquer pourquoi la probabilité d'une modification du génome est extrêmement plus élevée avec l'infection virale qu'avec l'inoculation du vaccin. Et pour cela, cette simple phrase qui clôture l'article de Tania Louis suffit :
« Le vaccin consiste à injecter un ARN messager, dans une zone du corps, et une fois ces moléculesmolécules détruites, le stock n'est pas renouvelé. L'infection par le virus aboutit à la production de plusieurs ARN messagers différents, simultanément dans différents organes, et le stock d'ARN est renouvelé en continu par les cellules infectées. Quelle que soit la probabilité qu'un ARN messager modifie l'ADN de la cellule dans laquelle il se trouve, ce risque est beaucoup plus élevé pour les ARN messagers viraux produits en cas d'infection que pour l'ARN messager injecté pour la vaccination. Ce n'est donc pas une raison de préférer le risque d'infection à la vaccination. »
Faisons appel aux personnes expertes en médiation scientifique
En l'espace de deux paragraphes, Tania a rendu accessible des concepts complexes de biochimiebiochimie humaine et de science médicale, sans pour autant les mentionner et les détailler explicitement. Mais, rappelez-vous : ce n'était pas l'objectif.
Et c'est de lui que tout découle comme nous l'explique Tania : « Pour concevoir un contenu pédagogique (atelier, conférence...)), la méthode est toujours de commencer par identifier clairement le message pédagogique qu'on veut faire passer (ici : "la balance bénéfice/risque de ces vaccins est manifestement très positive"). Tout le reste (arguments, déroulé, exemples...) découle de l'objectif pédagogique et doit être globalement dirigé vers lui. C'est une démarche qui est a priori évidente pour les médiateurs et autres professionnels de la culture scientifique (et à mon avis familière aux journalistes aussi) mais qu'on a tendance à oublier quand on a le neznez dans le guidon et qu'on répond sans recul à des sollicitations, comme cela a été le cas ces derniers mois. »
Elle pointe aussi le manque de sollicitation envers les experts du domaine de la culture et de la pédagogie scientifique lors de cette crise : « Cette démarche pédagogique est une chose à laquelle les chercheurs ne sont pas forcément formés, eux à qui on demande plutôt des présentations exhaustives. La plupart du temps, ce n'est pas un problème mais, sur ce sujet-là, je trouvais que ça coinçait. Au-delà du détail du raisonnement et de ce cas particulier, je pense que la communauté de la culture scientifique n'a vraiment pas été assez sollicitée pendant cette crise sanitairecrise sanitaire, que ce soit pour produire des supports pédagogiques avec l'aide d'experts ou pour former les experts intervenant dans les médias ou sur les réseaux sociauxréseaux sociaux à la vulgarisation et au "media training". Avec le lancement des campagnes de vaccination en France, dans un contexte d'inquiétude globale des citoyens, ce serait vraiment dommage de continuer à se passer de cette expertise pédagogique. Il faut instaurer un dialogue bienveillant et réellement bidirectionnel entre les citoyens et les experts. Alors, faisons appel aux personnes dont le métier est justement de créer et d'animer ce genre d'échanges. »
La rédaction vous conseille vivement la lecture du billet de blog de Tania Louis, qui dissipera sans l'ombre d'un doute vos inquiétudes sur la vaccination.