Curieuse nouvelle pour cette Journée mondiale de la maladie de Parkinson : le mannitol, entrant dans la composition de chewing-gums sans sucre ou de certaines confiseries, pourrait devenir un traitement. Du moins, des mouches (un bon modèle pour cette pathologie) présentant de sévères troubles moteurs ont retrouvé grâce à lui une locomotion presque normale.

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    En cette Journée mondiale de la maladie de Parkinson, vendredi 12 avril, il est opportun de rappeler que cette neurodégénérescence, la deuxième plus fréquente dans le monde, reste incurable. Les patients, victimes de troubles moteurs, vivent un calvaire, et seuls leurs symptômes peuvent être atténuésatténués par des médicaments ou des techniques plus invasives comme la stimulation cérébrale profonde.

    Comme la plupart des molécules testées se montrent inefficaces pour arrêter la progression de la maladie, les chercheurs en explorent de nouvelles, en espérant trouver la perle rare. Des scientifiques de l'université de Tel Aviv pourraient être bien tombés sur elle. Pourtant, ils n'ont pas chercher cette moléculemolécule très loin à l'aide d'outils informatiques surpuissants : ils sont allés la prendre dans les chewing-gums.

    Une molécule presque biblique

    Le mannitol est une molécule originellement retrouvée dans le frêne à fleurs (Fraxinus ornus), surnommé aussi frêne à manne. En effet, le sirop qu'on en extrait ressemblerait à la manne, la nourriture des Hébreux durant l'exode dans le désertdésert, selon l'Ancien Testament ou le Coran. Des bactéries, des champignonschampignons, des alguesalgues ou d'autres plantes le synthétisent également. L'Homme n'est pas capable de produire naturellement cet édulcorant, mais les chimistes en ont trouvé la recette.

    Cette molécule sert souvent d'édulcorant dans les chewing-gums sans sucre ou certaines confiseries. Le mannitol est aussi approuvé par certaines agences sanitaires pour éliminer les excès de liquideliquide et faire baisser les pressionspressions internes, notamment au niveau crânien. Il est aussi en mesure de traverser la barrière hématoencéphalique, structure préservant le cerveau des toxinestoxines et des pathogènespathogènes.

    La maladie de Parkinson apparaît suite à la destruction progressive des neurones de la <em>substantia nigra </em>(ou subtance noire), une structure cérébrale profonde, par l'agglomération d'alpha-synucléine mal conformée. Le mannitol pourrait éviter cela. © Heidi Cartwright, Wellcome Images, Flickr, cc by nc nd 2.0

    La maladie de Parkinson apparaît suite à la destruction progressive des neurones de la substantia nigra (ou subtance noire), une structure cérébrale profonde, par l'agglomération d'alpha-synucléine mal conformée. Le mannitol pourrait éviter cela. © Heidi Cartwright, Wellcome Images, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Chaperonner l’alpha-synucléine par le mannitol

    Le mannitol aurait aussi une autre propriété : il jouerait le rôle de chaperonne. Dans les cellules, ces molécules s'assurent que les protéinesprotéines naissantes sont bien formées et adoptent la conformationconformation tridimensionnelle idoine, celle qui leurs confère leurs fonctions. Une étape indispensable, car un défaut de conformation peut engendrer une maladie : c'est le cas de Parkinson.

    En effet, dans cette neurodégénérescence, une protéine, l'alpha-synucléine, se forme mal et s'accumule dans les neuronesneurones d'une région du cerveaucerveau appelée substantia nigrasubstantia nigra, ce qui à terme détruit les cellules nerveuses et entraîne des troubles moteurs.

    Les scientifiques ont voulu tester l'efficacité du mannitol pour empêcher la formation de ces agrégats d'alpha-synucléine, comme ils l'ont expliqué lors de la présentation de leur étude sur la mouche drosophiledrosophile, à la conférence annuelleannuelle de la Genetics Society of America se tenant à Washington entre le 3 et 7 avril. Ils ont décrit leur expérience, prouvant l'intérêt de la molécule et la nécessité de recherches complémentaires.

    Des drosophiles guéries de la maladie de Parkinson

    Les drosophiles constituent un modèle animal de choix dans la maladie de Parkinson, car des mutations peuvent induire chez elle une pathologiepathologie similaire à la neurodégénérescence humaine. Les auteurs ont testé les insectesinsectes sur leurs capacités de locomotion. Il s'agissait de comptabiliser le pourcentage de mouches capables de grimper 1 cm sur une surface verticale dans un temps de 18 secondes.

    Les expérimentations ont été réalisées tous les jours pendant 27 jours. Quelque 72 % des mouches normales réussissaient l'exercice, contre 38 % des drosophiles mutantes, preuve de la sévérité de leurs troubles moteurs. Mais celles nourries à l'état larvaire par du mannitol atteignaient des scores presque normaux, puisque 70 % d'entre elles passaient le test avec succès. Des analyses de coupes de cerveaux ont même révélé que malgré les mutations, les agrégats d'alpha-synucléine avaient diminué de 70 % par rapport aux drosophiles malades mais non traitées par le mannitol.

    Or, entre aider des mouches mutantes à grimper sur une surface verticale et traiter la maladie de Parkinson, il reste un très long chemin à parcourir. La prochaine étape consiste à évaluer les effets de l'édulcorant chez la souris.