Coup sur coup, une étude chinoise et une annonce faite au cours d’une conférence de presse semblent confirmer que le virus de la grippe A(H7N9) serait bien transmis à l’Homme par les oiseaux. Mais du côté des experts internationaux, on reste vigilant et partagé entre inquiétude et espoir.

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    Après trois semaines d'investigations, les enquêtes scientifiques menées sur la grippe A(H7N9) commencent à livrer les premières informations. Pour autant, ces éléments, aussi rassurants qu'inquiétants, ne sont que préliminaires. Et demandent encore de longues recherches avant que la situation ne soit vraiment éclaircie.

    Ce que l'on sait, c'est que ce virus H7N9 existait préalablement chez les oiseaux, tandis qu'il n'avait jamais été observé chez l'Homme. Évidemment, les volatiles sont devenus les principaux suspects dans cette affaire. Mais parmi les 108 êtres humains tombés malades, certains (les chiffres précis sont difficiles à obtenir) ont expliqué ne pas avoir été au contact de volailles. Or, à part quelques exceptions, les spécialistes ont noté très peu de cas possibles de transmission interhumaine. Y aurait-il un troisième vecteur de la maladie, comme le porc ?

    Un début de réponse vient d'être fourni dans The Lancet, avec une étude menée par une trentaine de chercheurs chinois. Ces auteurs ont comparé les virus retrouvés chez quatre patients avec ceux retrouvés chez des oiseaux vendus sur un marché dans la province du Zhejiang, au sud de Shanghai. D'après leurs analyses, les deux souches sont très proches, et le virus humain ne se compose que de fragments d'origine aviaire. Les faits semblent avérés : la maladie s'est transmise de la volaille à l'Homme.

    Fermer les marchés pour contrôler l’épidémie de grippe ?

    Cette conclusion semble en accord avec les résultats obtenus par une équipe internationale envoyée par l'OMS. Les chercheurs viennent d'annoncer leurs résultats lors d'une conférence de presse. De leur côté, l'enquête a montré que le virus se transmettait bien plus facilement de l'oiseauoiseau à l'Homme que le H5N1, un autre virus de la grippe aviaire apparu à Hong Kong en 2001. Pour eux, le scénario le plus probable est donc celui de l'infection depuis la volaille, d'autant que de nombreux échantillons positifs ont été récoltés chez des oiseaux retrouvés dans des marchés.

    Le virus de la grippe A(H7N9) possède les traces d'une virulence modérée chez les oiseaux. En revanche, il se montre très agressif chez l’Homme, bien qu'il ne semble pas encore tout à fait adapté à notre espèce. © Cynthia Goldsmith, CDC, DP

    Le virus de la grippe A(H7N9) possède les traces d'une virulence modérée chez les oiseaux. En revanche, il se montre très agressif chez l’Homme, bien qu'il ne semble pas encore tout à fait adapté à notre espèce. © Cynthia Goldsmith, CDC, DP

    Les êtres humains seraient exposés surtout au cours de ces ventes. La preuve : lorsque le marché de Shanghai a été fermé à la suite des premiers cas constatés, le nombre de nouveaux malades dans la mégapole a aussitôt baissé.

    Leurs analyses révèlent également que le virus se retrouve très peu dans les fermes avicoles. En revanche, quelques oiseaux infectés de ces fermes arrivant sur un marché peuvent facilement contaminer leurs voisins et la grippe peut se répandre assez vite. Le problème, à notre échelle, c'est que pour les volatiles, la maladie est bénigne et les symptômes difficiles à voir. Il devient délicat de détecter la présence du virus chez les oiseaux.

    Les volailles sont-elles la seule source de la grippe A(H7N9) ?

    Pour autant, alors que les premiers éléments s'accordent à montrer que l'on a trouvé un coupable, la prudence reste de mise. Bien que la fermeture des marchés, comme à Shanghai, soit une mesure qui semble porter ses fruits, il faut voir si cela pourrait se généraliser. Rien n'assure que le virus ne trouvera pas une nouvelle voie pour infecter l'Homme. De plus, la possibilité d'un autre vecteur n'est pas encore complètement écartée.

    Ce mercredi, l'épidémie vient de toucher un autre pays : Taiwan. Un habitant de Taipei a déclaré la grippe trois jours après être revenu de Chine. Lui aussi n'a pas le souvenir d'avoir eu un contact rapproché avec des volailles. Comment aurait-il été infecté ?

    H7N9, l’un des virus de la grippe les plus inquiétants

    De l'avis des experts, il est encore trop tôt pour connaître l'étendue de la menace pour la santé publique ou savoir comment contrôler les risques. Une situation inquiétante, car avec un taux de mortalité de l'ordre de 20 % d'après les premières estimations (chiffre qui pourrait être revu à la baisse), certains spécialistes disent déjà du H7N9 qu'il est l'un des virus de la grippe les plus mortels parmi ceux connus.

    Sa capacité à devenir pandémique partage encore les scientifiques. Les signatures génétiques du virus laissent supposer une réplicationréplication et une transmission efficaces, en plus d'une forte virulence chez les mammifèresmammifères. En effet, la majorité des malades ont nécessité une hospitalisation, et 22 décès sont avérés. L'épidémiologie laisse également entrevoir des similarités avec la grippe saisonnière (celle qui sévit chez nous l'hiverhiver), capable de toucher une grande partie de la population. En revanche, quelques indicateurs sont au vert : l'âge moyen d'infection, au-delà de 60 ans, suggère que le virus n'est malgré tout pas encore bien adapté à l'Homme. Cela pourrait encore changer...

    Pour faire face à une éventuelle pandémiepandémie, le laboratoire suisse Novartis a annoncé être en train de développer un vaccin. Les essais cliniquesessais cliniques pourraient même commencer d'ici 6 à 8 semaines. Quelle sera la situation épidémiologique mondiale à ce moment-là ?