En Angleterre, une adolescente de 15 ans atteinte de mucoviscidose a été traitée par phagothérapie pour une infection à Mycobacterium résistante aux antibiotiques. Ce traitement expérimental a utilisé des bactériophages, des virus qui s’attaquent aux bactéries.


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    La mucoviscidose est une maladie génétique qui conduit à la production d'un mucus épais, entraînant des symptômes respiratoires et gastrogastro-intestinaux. Les patients souffrent souvent d'infections respiratoires, nécessitant des traitements antibiotiques. Différentes recherches cliniques dans le monde s'activent pour mettre au point de nouveaux traitements contre cette maladie grave.

    Le saviez-vous ?

    En France, d’après l’Inserm, 6.000 personnes souffrent de mucoviscidose et 200 enfants naissent chaque année avec cette maladie.

    En octobre 2017, Graham Hattfull, professeur à l'université de Pittsburgh, a reçu un courrier d'un collègue de Londres, lui exposant le cas de deux adolescents atteints de mucoviscidose : suite à une double greffe de poumonpoumon visant à améliorer leur capacité pulmonaire, ils avaient développé une infection à Mycobacterium. Cette bactériebactérie est de la même famille que celle qui est responsable de la tuberculosetuberculose.

    Or, pendant trois décennies, Graham Hattfull a constitué une banque de bactériophages, des virusvirus tueurs de bactéries. Les phages, ou bactériophagesbactériophages, peuvent servir à traiter des infections bactériennes grâce à la phagothérapiephagothérapie, une thérapiethérapie porteuse d'espoir face à la résistancerésistance aux antibiotiques.

    Le chercheur avait-il dans sa banque un phage pour venir en aide aux patients ? Le laboratoire de Graham Hattfull a reçu les échantillons bactériens des adolescents et l'équipe est partie à la recherche de phages qui tueraient leurs bactéries. En janvier, ils ont trouvé un phage qui apparaissait efficace pour l'un des deux patients, mais c'était malheureusement trop tard, il est décédé.

    L’université de Pittsburgh possède une bibliothèque de 15.000 échantillons de phages dans ses congélateurs. © <em>Graham Hatfull Lab</em>
    L’université de Pittsburgh possède une bibliothèque de 15.000 échantillons de phages dans ses congélateurs. © Graham Hatfull Lab

    Les chercheurs ont poursuivi leur travail pour la seconde patiente qui avait été opérée à l'hôpital Great Ormond Street de Londres au cours de l'été 2017. Âgée de 15 ans, elle prenait des antibiotiques depuis huit ans à cause de deux infections persistantes. Une semaine après la double greffe pulmonaire, les médecins ont observé des signes d'infection du foiefoie et une rougeur au niveau du site de l'opération. Des nodules sont apparus sous la peau de la jeune fille, à différents endroits du corps : bras, jambes... Ces petites poches remplies de bactéries signifiaient que l'infection, qui résistait aux antibiotiques, gagnait du terrain.

    Un traitement personnalisé avec des phages génétiquement modifiés

    Pour cette patiente, trois phages ont retenu l'attention des chercheurs, mais deux d'entre eux ne paraissaient pas efficaces. Aussi, les scientifiques ont modifié leur génomegénome pour qu'ils soient de vrais tueurs de bactéries, en retirant un gènegène qui permet au virus de se reproduire de manière inoffensive dans la bactérie. Sans ce gène, le virus se multiplie dans la bactérie et elle explose en libérant de nombreux phages.

    En juin 2018, la patiente a reçu en intraveineuse le cocktail de trois phages pour venir à bout de l'infection à Mycobacterium abscessus résistante. Dans les six mois qui ont suivi ce traitement à base de bactériophages, quasiment tous les nodules ont disparu, la cicatricecicatrice de l'opération se refermait et le fonctionnement du foie s'est amélioré. Le traitement a été bien toléré. La bactérie de la patiente n'a pas développé de résistance aux phages, mais les chercheurs ont quand même préparé un quatrième phage au laboratoire.

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    Antibiorésistance : la phagothérapie revient doucement en France

    Graham Hattfull a expliqué dans un communiqué que ce travail est le premier à démontrer l'innocuité et l'efficacité de bactériophages génétiquement modifiés. Graham Hattfull est le leader du programme SEA-Phages qui permet à des étudiants de récupérer et d'étudier des phages de l'environnement. Ce programme n'a pas été créé à but thérapeutique au départ, mais « maintenant, la collection de phages a réellement contribué à aider un patient. »

    Ces résultats sont parus dans Nature Medicine.