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Les scientifiques se sont intéressés au système immunitaire inné et ont découvert que celui-ci conservait en mémoire la trace des infections passées afin d'activer rapidement une réponse immunitaire plus efficace. La découverte du mécanisme et la compréhension de la fonction des cellules souches sanguines ouvriraient de nouvelles pistes thérapeutiques et vaccinales, notamment dans la lutte contre le Covid-19.
C'est un fait connu de longue date : le système immunitaire adaptatif a une mémoire. Ainsi, les lymphocytes deviennent spécifiques d'un agent pathogène particulier à éliminer après y avoir été exposés lors d'une infection et certains d'entre eux subsistent durablement dans l'organisme. Les principes de la vaccination reposent sur la connaissance de ces mécanismes immunitaires.
Plus récemment, des travaux ont suggéré que le système immunitaire inné, qui permet la défense de l'organisme de façon immédiate suite à une infection, a lui aussi une forme de mémoire. Des chercheurs ont, par exemple, montré que le système immunitaire inné continue d'être plus efficace en cas de réinfection malgré la durée de vie très courte des cellules immunitaires, comme les monocytes ou les granulocytes. Ils ont alors soupçonné que cette mémoire du système immunitaire inné était en fait inscrite dans les cellules souches sanguines, dont la durée de vie est très longue, et qui sont à l'origine de différentes cellules immunitaires matures.
Les propriétés surprenantes des cellules souches sanguines
Pour vérifier cette hypothèse, les chercheurs du Centre d'immunologie de Marseille-Luminy (CNRS/Inserm/Aix-Marseille Université) et du Centre des thérapies régénératives de l'Université technique de Dresde (Allemagne) ont effectué des travaux dont les résultats sont publiés dans Cell Stem Cell.
L'équipe a exposé des souris à une molécule de surface de la bactérie E. coli (lipopolysaccharide ou LPS), un agent pathogène largement utilisé pour mimer des infections en laboratoire. Ensuite, les chercheurs ont transféré des cellules souches sanguines prélevées chez ces animaux à d'autres souris non infectées et dont le système immunitaire avait préalablement été détruit. Le but était de reconstituer entièrement leur système immunitaire à partir de ces cellules souches.
Les chercheurs ont ensuite infecté des souris de ce groupe avec une bactérie vivante de l'espèce P. aeruginosa et ont constaté que le taux de mortalité n'était que de 25 %. Il atteignait en revanche 75 % chez des souris contrôles, dont les cellules souches n'avaient jamais été exposées à un agent pathogène. « Ce travail démontre de façon forte que les cellules souches sanguines ont une fonction de mémoire qu'on ne soupçonnait pas. Une première exposition à un pathogène les arme pour mieux affronter une prochaine infection », explique Sandrine Sarrazin.
Le rôle majeur de la protéine C/EBP
Ce mécanisme n'est pas spécifique d'un agent pathogène puisque, dans une autre expérience, une première exposition des cellules souches sanguines à un antigène viral a protégé les souris contre une exposition secondaire à P. aeruginosa. De manière surprenante, les scientifiques ont donc découvert que la protection apportée par cette mémoire du système immunitaire s'étend au-delà du seul agent infectieux utilisé pour la première infection.
Les chercheurs se sont ensuite intéressés à la manière dont cette mémoire était codée. En étudiant le génome des cellules souches sanguines des souris infectées, ils ont constaté des modifications durables dans son organisation spatiale. Ces changements étaient susceptibles de modifier l'expression de certains gènes impliqués dans la réponse immunitaire innée.
« Lors du premier contact avec l'agent pathogène, des gènes requis pour la réponse immunitaire sont en fait durablement mis en avant pour activer rapidement le système immunitaire lors d'une deuxième infection », explique Bérengère de Laval, première auteure de l'étude. Enfin, l'équipe a recherché des molécules impliquées dans ce changement de structure du génome et a découvert qu'une protéine appelée C/EBP bêta jouait un rôle majeur.
Des recherches pertinentes en période de lutte contre le Covid-19
Ces résultats résonnent tout particulièrement en cette période de pandémie du coronavirus SARS-Cov-2. Des observations récentes suggèrent que le vaccin BCG, connu pour induire lui aussi une mémoire immunitaire innée, agirait également au niveau des cellules souches sanguines et offrirait un certain degré de protection contre les infections respiratoires. Des études sont en cours pour tester son utilité contre le Covid-19.
Les découvertes de l'équipe pourraient éclairer les mécanismes en jeu dans cette protection au niveau moléculaire et ouvrir de nouvelles pistes vaccinales, y compris contre le Covid-19.
« Nos découvertes représentent une contribution majeure à la compréhension de la mémoire du système immunitaire et des fonctions des cellules souches du sang. Elles orientent en outre vers de nouvelles stratégies pour stimuler ou limiter la réponse immunitaire dans divers états pathologiques, et pourraient permettre d'affiner les stratégies de vaccination actuelles pour une meilleure protection face à divers agents pathogènes, y compris contre le SARS-CoV-2 », espère Michael Sieweke.
De la cellule œuf humaine à l'embryon Un spermatozoïde et un ovule se rencontrent avant de fusionner : ainsi naît la cellule œuf, ou zygote, la première cellule à l’origine de toutes les autres. Elle se divise une première fois, une deuxième fois, puis à une infinité de reprises. Sous l’influence des gènes, ces cellules naissantes vont peu à peu se différencier et se spécialiser afin de parvenir à cette diversité qui caractérise les organismes complexes que nous sommes. Taille : environ 100 µm ;Un seul noyau ;Première cellule de l’organisme. © Yorgos Nikas, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
La mitose ou division cellulaire Les cellules ont le pouvoir exceptionnel de se dédoubler par un phénomène nommé « mitose ». Au sein de la cellule mère, des mécanismes se mettent en jeu. Les chromosomes, contenant deux chromatides (donc portant deux fois la même information génétique), sont scindés en deux et répartis équitablement de part et d’autre. Les pôles de la cellule s’écartent et la membrane plasmique fissionne, donnant naissance à deux cellules filles contenant toutes deux le même patrimoine génétique. Taille variable en fonction des cellules ;Un seul noyau ;Dans tous les organes. © Paul J. Smith, Rachel Errington, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
La cellule souche embryonnaire et la pluripotence Les premières cellules de l’embryon doivent se montrer capables d’enfiler n’importe quelle tenue, car elles seront amenées un jour ou l’autre à devenir un globule blanc, un neurone ou une hématie (plus communément appelée « globule rouge »). Dans cet état primitif, les cellules souches embryonnaires sont donc pluripotentes (c'est-à-dire qu'elles peuvent se différencier). Des propriétés rares qui commencent à être exploitées en médecine dans le but de réparer, régénérer voire construire artificiellement des organes pour remplacer ceux qui deviennent défaillants. Taille : de 8 à 15 µm de diamètre ;Un noyau ;Embryon. © Annie Cavanagh, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
Les globules rouges, des cellules sans noyau La particularité des cellules eucaryotes, celles composant tous les organismes non bactériens, est de posséder un noyau au sein duquel est compacté l’ADN, la molécule qui porte l’information génétique. Cependant, il faut bien des exceptions pour confirmer la règle. Ainsi, les globules rouges, qui acheminent dioxygène et dioxyde de carbone dans le sang, perdent ce noyau au cours de leur différenciation et deviennent énucléés. Une particularité qui ne les empêche pas de survivre 120 jours dans nos vaisseaux. Taille : de 6,5 à 7,5 µm de diamètre ;Pas de noyau ;Sang. © Annie Cavanagh, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
Les spermatozoïdes, des cellules mobiles Dans un passé très lointain, toutes les espèces vivantes étaient aquatiques. À l’émergence de la reproduction sexuée, des cellules flagellées mâles nageaient jusqu’aux gamètes femelles. Nos ancêtres sont sortis de l’eau il y a bien des millions d’années, et ont commencé à développer la fécondation interne. Les femelles ont toujours opté pour une cellule fixe, tandis que les spermatozoïdes des mâles restent mobiles et partent à la conquête de l’ovule à travers des canaux, faisant d’eux des cellules bien particulières. De plus, les gamètes (aussi bien mâles que femelles) sont les seules cellules haploïdes du corps humain : elles ne disposent que de la moitié du patrimoine génétique d’un individu. Leur fusion aboutit à la cellule œuf, disposant donc d’un patrimoine génétique complet avec deux jeux de chromosomes. Taille : 5 µm pour la tête du spermatozoïde, avec un flagelle de 60 µm de long ;Un seul noyau, haploïde ;Testicules. © Anna Tanczos, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
Les cellules cancéreuses et la division anarchique Les cellules se divisent et meurent à un taux relativement constant. Ainsi, l’organisme contient en permanence un nombre identique de cellules. Le tout est sous le contrôle de gènes empêchant la prolifération incontrôlée. Cependant, ils sont parfois victimes de mutations et, dans un certain contexte, les cellules se mettent alors à se multiplier de manière anarchique et incontrôlée. C’est la tumeur, qui peut être bénigne (non cancéreuse) ou maligne (cancéreuse). Parfois, l’organisme parvient tout seul à s’en débarrasser. D’autres fois, malheureusement, ce n’est pas le cas. À l’image, on peut voir trois cellules impliquées dans un cancer du pancréas. Taille : variable ;Un seul noyau ;Différents organes. © Anne Weston, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
Les mélanocytes, ces cellules qui nous font bronzer grâce à la mélanine La peau est un organe particulier ; elle sépare l’intérieur du corps du milieu extérieur. Elle est donc la première barrière contre les agressions comme les rayons ultraviolets du soleil. Pour se préserver des dégâts que ceux-ci peuvent causer, les mélanocytes synthétisent la mélanine, une molécule qui colore notre peau d’une teinte bronzée, dans des vésicules particulières, les mélanosomes (en jaune sur la photo). Taille : environ 7 µm ;Un seul noyau ;Peau. © Allistair Hume, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
Les cellules ciliées de la cochlée, dans l'oreille interne L’audition est un phénomène complexe. Elle implique la vibration d’un tympan consécutive à l’onde sonore, qui va secouer trois osselets, activant à leur tour les cellules ciliées de la cochlée (située au niveau de l'oreille interne). Ces cellules possèdent des excroissances cytoplasmiques qui font penser à des cils. Cependant, ces structures, nommées « stéréocils », ne peuvent être comparées à ces appendices en ce sens qu’elles ne disposent pas de leur motilité. En revanche, elles ressemblent beaucoup plus aux microvillosités des cellules intestinales, même si elles sont plus courtes (quelques micromètres quand même). Parfois, ces stéréocils s’entremêlent à leur sommet. L’activation des cellules ciliées stimule les neurones du nerf auditif, permettant à l’information sonore de transiter jusqu’aux aires spécialisées dans l’audition. Taille : autour de 10 µm, en plus de stéréocils de différentes tailles (environ 1 µm) ;Un noyau ;Oreille interne. © Uri Manor, Leonardo Andrade, NIH, DP
Dans les îlots de Langerhans, les cellules bêta du pancréas sécrètent l'insuline Certaines cellules sont spécialisées dans la sécrétion. Les glandes sudoripares produisent la sueur, la glande mammaire génère le lait après l’accouchement, etc. Une partie du pancréas participe à la production d’hormones. Les cellules bêta pancréatiques (dont les noyaux apparaissent en bleu sur la photo), retrouvées dans les îlots de Langerhans, sécrètent l’insuline (ici colorée en vert), cette hormone célèbre qui abaisse les taux de sucre dans le sang. Le rouge marque la présence de son antagoniste, le glucagon, produit par les cellules alpha de ces mêmes îlots de Langerhans. Une fois larguée dans la circulation, cette hormone va augmenter la glycémie. Taille : environ 10 µm de diamètre ;Un noyau ;Pancréas. © Christin Suss, Jakob Suckale, Michele Solimena, Wikipédia, CC by-sa 3.0
Les ostéocytes, des cellules du tissu osseux Les ostéocytes se terrent dans les cavités du tissu osseux et contribuent à la synthèse de l’os. Ces cellules forment de longues excroissances lui permettant de communiquer avec d’autres ostéocytes. Elles ne se divisent pas et meurent donc sans laisser de descendance. Taille : de 15 à 30 µm de long, de 10 à 15 µm de large ;Un seul noyau ;Os. © Kevin McKenzie, University of Aberdeen, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
Les neurones du cerveau et leurs arborescences Le cerveau est l’un des organes les plus mystérieux du corps humain. Ses cellules, appelées neurones, transmettent l’information par des signaux électriques. Contrairement à la représentation classique des cellules, qu’on imagine bien rondes, les neurones présentent une morphologie tout à fait exceptionnelle. À une extrémité (en bas sur l’image), les dendrites forment une arborescence dense. Elles captent le message émanant d’un neurone voisin et le transmettent au corps cellulaire (le disque coloré), qui le répercute jusque dans l’axone, unique, qui va lui-même conduire l'influx nerveux jusqu'au pôle opposé. L’influx est ensuite transmis aux dendrites du neurone voisin à grande vitesse, et ainsi de suite. Taille : de quelques micromètres à 120 µm pour le corps cellulaire, jusqu’à plus d’un mètre pour l’axone ;Un noyau ;Systèmes nerveux central et périphérique. © Prof. M. Hausser, UCL, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
Les polynucléaires neutrophiles du sang et leur noyau plurilobé Les polynucléaires neutrophiles (PNN), aussi appelés granulocytes neutrophiles, sont capables de phagocytose, c'est-à-dire que ces cellules peuvent ingérer des particules étrangères – la phagocytose est un moyen de défense de l'organisme. Ils semblent présenter plusieurs noyaux, comme le montre cette image qui correspond à une coupe. Cependant, l'image est trompeuse : en réalité, les polynucléaires neutrophiles ne possèdent qu’un seul noyau, composé de différents lobes. Taille : 9 µm de diamètre ;Un noyau plurilobé ;Lymphe et sang. © University of Edinburgh, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
La drépanocytose, la maladie des globules rouges Les cellules aussi peuvent être difformes quand elles sont malades. C’est ce qui arrive aux globules rouges dans le cas de la drépanocytose, une pathologie génétique qui affecte notamment l’hémoglobine, la molécule chargée du transport des gaz. Du fait d’une séquence protéique anormale, l’hématie prend une forme de faucille (cellule orange) tout à fait différente de la forme saine (derrière, en rouge). Sans traitement, les malades meurent jeunes. Taille : de 6,5 à 7,5 µm de diamètre ;Pas de noyau ;Sang. © EM Unit, UCL Medical School, Royal Free Campus, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
Les ostéoclastes, des cellules osseuses à plusieurs noyaux Si les globules rouges perdent leur noyau au cours de leur différenciation, l’inverse se produit aussi dans le corps humain : des cellules peuvent en acquérir d'autres. C’est par exemple le cas des ostéoclastes. Ces cellules sont issues de lignées à l’origine de plusieurs souches de cellules du système immunitaire et sont chargées de détruire les tissus osseux vieillissants et malades. Elles se forment à la suite de la fusion de plusieurs de leurs ascendants. Ainsi, cette cellule sur l’image (au centre) possède neuf noyaux. Parfois, les ostéoclastes peuvent en avoir une cinquantaine. Taille : de 50 à 100 µm ;De quelques noyaux à 50 noyaux ;Lymphe et sang, avant de rejoindre l’os. © Robert M. Hunt, Wikipédia, DP
La phagocytose des neutrophiles, clé du système immunitaire Un organisme ne se fait pas que des alliés : il a aussi des ennemis microscopiques qui veulent vivre à ses dépens. C’est donc au système immunitaire d’intervenir et de s’en débarrasser. S’il dispose de plusieurs solutions, il utilise ses neutrophiles (et ses macrophages) pour avaler et digérer certains envahisseurs. Ainsi, sur cette image, le neutrophile (en jaune) avale des spécimens de la bactérie Bacillus anthracis (en orange), à l’origine de l’anthrax, aussi appelée maladie du charbon. À titre indicatif, la barre d’échelle représente 5 µm. Taille : 9 µm de diamètre ;Un noyau plurilobé ;Lymphe et sang. © Volker Brinkmann, Plos Pathogens, CC by 2.5
Les entérocytes, des cellules de l'intestin avec des microvillosités « Rien ne se perd, tout se transforme » : cette citation tronquée de Lavoisier qualifie bien les entérocytes, les cellules intestinales. Celles-ci disposent à leur pôle apical d’une armada d’excroissances cytoplasmiques appelées « microvillosités » (en 1 sur l'image). Bien pratique pour augmenter la surface de contact avec le tube de l’intestin, et ainsi récupérer un maximum d’éléments nutritifs passant à leur portée. Elles sont environ 60 par µm² et confèrent aux cellules une structure en brosse. Taille : 30 µm dont 3,5 µm de microvillosités ;Un noyau ;Intestin. © FUNDP, CC by-nc-nd 3.0
La mort des cellules humaines par apoptose La plus grande partie de notre corps se régénère en permanence. De nouvelles cellules apparaissent par mitose, et il faut bien que l’organisme contrebalance ces nouvelles populations en détruisant des tissus plus anciens. Ainsi, la plupart des cellules sont programmées pour mourir par apoptose, le suicide cellulaire. Cependant, elles peuvent aussi disparaître consécutivement à une agression. Virus, bactéries ou parasites sont capables de tuer. C'est aussi le cas de certains produits chimiques (comme des médicaments qui ont eu raison de cette cellule cancéreuse en train de mourir, en bas à gauche sur l'image) ou de paramètres physiques, comme la friction ou des températures élevées. Taille variable en fonction des cellules ;Un seul noyau ;Dans tous les organes. © Docteur David Becker, Wellcome Images, Flickr, CC by-nc-nd 2.0