Capter et stocker cinq millions de tonnes de carbone par an. C’est l’objectif affiché par les promoteurs de celle qui s’apprête à devenir la plus grande usine de ce type au monde. Un objectif d’autant plus ambitieux que des doutes subsistent quant à l’efficacité réelle de ces technologies nouvelles.


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    Contenir le réchauffement climatique n'ira pas sans une réduction rapide et drastique de nos émissionsémissions de gaz à effet de serre. Mais de plus en plus d'experts de la question, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climatGroupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) en tête, s'accordent à dire que, sans un coup de pouce supplémentaire, nous ne pouvons plus espérer limiter la hausse des températures à 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels.

    Et le petit coup de pouce en question, c'est celui que pourraient donner les technologies de captage et de stockage géologique du carbone -- celles que les experts appellent les CSC. « Il existe déjà des technologies qui fonctionnent bien », nous assurait il y a plusieurs semaines, Florence Delprat-Jannaud, la responsable du programme CSC de l'IFP ÉnergiesÉnergies nouvelles (IFPEN). Elle parlait alors surtout de technologies qui captent le dioxyde de carbone (CO2) dans les fumées des usines.

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    Le captage du CO2, un atout pour atteindre nos objectifs climatiques

    Un rapport publié début septembre par l'Institute for Energy Economics and Financial Analysis (IEEFA) soulignait toutefois que les résultats réels de ces technologies étaient loin de tenir leurs promesses. Les experts évoquent des objectifs atteints parfois à moins de 50 %. Pour des projets de captage de CO2 dans des fumées d'usines. Imaginez ce qu'il pourrait en être de projet de captage directement dans l'atmosphère où la concentration est encore bien plus faible...

    Le saviez-vous ?

    Les technologies de captage de dioxyde de carbone (CO2) sont capables de capter plutôt efficacement des concentrations de l’ordre de 10 %. Dans l’atmosphère, la concentration en CO2 est d’environ 0,04 %. C’est beaucoup trop si l’on parle réchauffement climatique. Selon de nombreux experts, c'est encore bien trop peu pour un captage efficace et économiquement viable.

    Pourtant, des usines captent déjà du CO2 en différents endroits du monde. Au total, il y a un an environ, une quinzaine d'unités pour quelque 9.000 tonnes de CO2 retirées de l'atmosphère par an. Et d'autres projets voyaient le jour. En septembre 2021, la plus grande usine de captage de CO2 dans l'atmosphère était lancée en Islande. Orca, comme l'ont baptisée ses promoteurs. Avec une capacité d'extraction de 4.000 tonnes de CO2 par an à elle seule.

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    Un record mondial qui devrait vite être battu grâce à sa petite sœur -- qui ne l'est pas si petite --, Mammoth, dont la constructionconstruction a démarré en juin de cette année. Son objectif : capter 36.000 tonnes de CO2 par an.

    Capter le CO2 dans l’atmosphère ne suffira pas

    Mais ce n'est rien à côté des ambitions affichées il y a quelques jours par CarbonCapture, une entreprise basée à Los Angeles (États-Unis). Son Bison Project -- qui doit commencer à opérer fin 2023 -- a pour objectif de capter pas moins de 5 millions de tonnes de CO2 par an. D'ici 2030. Mieux que ce qu'annoncent les promoteurs du projet Storegga (Écosse) et leur 500.000 à 1 million de tonnes de CO2 capté par an d'ici 2026. Le tout en profitant de nouvelles incitations mises en place par le gouvernement et qui rendent, tout à coup, les projets de captage et de stockage du CO2 un peu plus viables financièrement.

    Plus viables, d'autant que le modèle développé par CarbonCapture est évolutif : il est imaginé à partir d'unités modulaires de type container maritime, capables de s'adapter aux nouveaux matériaux absorbants, moins chers qui devraient être développés dans les années à venir. Alors que le coût de la tonne de carbone captée est aujourd'hui encore estimé par l'entreprise américaine à environ 700 dollars, il pourrait tomber à quelque 250 dollars d'ici 2030 -- à comparer au crédit d'impôtcrédit d'impôt pour le captage porté récemment de 50 à 180 dollars la tonne.

    Alimentées par des énergies renouvelables, les unités de captage de CO<sub>2</sub> dans l’atmosphère du <em>Bison Project</em> transformeront le gaz en un liquide qui sera ensuite injecté en sous-sol. © <em>Bison Project</em>
    Alimentées par des énergies renouvelables, les unités de captage de CO2 dans l’atmosphère du Bison Project transformeront le gaz en un liquide qui sera ensuite injecté en sous-sol. © Bison Project

    C'est le Wyoming qui a été choisi pour l'implantation de celle qui s'apprête donc à devenir la plus grande usine de captage de CO2 atmosphérique au monde. Parce que l'État jouit d'une intéressante disponibilité en ressources renouvelables -- indispensables pour faire fonctionner les unités modulaires de captage -- et d'un environnement propice au stockage du carbone en sous-sol -- après compression en un liquideliquide qui pourra être injecté dans des puits qui s'enfonceront à des centaines de mètres sous terre. Le Wyoming a aussi été durement frappé par la fermeture des mines de charboncharbon notamment. Et le Bison Project pourrait donc offrir, localement, de nouveaux emplois particulièrement bienvenus.

    Mais déjà, des voix s'élèvent pour tempérer les enthousiasmes. Des associations qui estiment que l'argentargent investi dans ce type d'usine serait mieux dépensé dans des technologies de production d'énergie renouvelables éprouvées.

    Rappelons pour finir qu'au cours de la seule année 2021, l'humanité a émis quelque 36 milliards de tonnes de CO2 ! Les premières estimations tablent sur des besoins en CSC de l'ordre de 10 milliards de tonnes de CO2 captées par an d'ici le milieu de notre siècle. Pour y arriver, il faudra multiplier les installations de type Bison Project. Et toute l'énergie nécessaire à les développer et les faire tourner...