Alors que la lutte contre le trafic d'ivoire d'éléphant s'intensifie, les braconniers se tournent désormais vers les bénitiers géants dont la coquille sculptée ressemble à l'ivoire. Une catastrophe pour cette espèce déjà menacée.
[EN VIDÉO] Air Shepherd : des drones pour lutter contre le braconnage En Afrique 100.000 éléphants ont été abattus entre 2010 et 2012. À ce rythme, le braconnage pourrait avoir raison de l’espèce d’ici 10 ans. Lutter contre cette activité illégale n’est pas chose facile mais l’utilisation de drones va peut-être changer la donne. Voici en vidéo une présentation du projet Air Shepherd.
Qualifié d'« or blanc », l’ivoire est recherché notamment en Chine pour fabriquer des objets sculptés. Interdit de commercialisation en Europe et dans la plupart des pays, l'ivoire provient principalement des défenses d'éléphants. Mais, avec l’intensification de la lutte contre le braconnage, les trafiquants se tournent désormais vers une autre source plus inattendue : les bénitiers géants. Cet énorme mollusque bivalve pouvant atteindre 250 kg pour 1,5 mètre de large, vit dans l'océan Indien et l'océan Pacifique, et peut vivre 100 ans et plus. Très recherché pour sa chair et déjà en danger d'extinction, le bénitier géant voit désormais se profiler une nouvelle menace : celle des trafiquants qui revendent ensuite sa coquille pour en faire des objets sculptés ressemblant à de l'ivoire d'éléphants.
Des saisies record
Aux Philippines, les autorités ont ainsi saisi plus de 133.000 tonnes de coquilles depuis 2016, selon un rapport de la Wildlife Justice Commission (WJC), une ONG néerlandaise qui s'intéresse aux crimes contre la vie sauvage. En 2019, un stock de 132.000 tonnes a été découvert au sud-est du pays. Revendu aux alentours de 2.000 pesos philippins la tonne (34 euros), les coquilles étaient destinées à la fabrication de bijoux, de produits cosmétiques ou de remèdes traditionnels, selon les autorités. En avril 2021, ce sont 200 tonnes de coquilles de bénitier fossilisées qui ont été découvertes par les autorités philippines, d'une valeur estimée à 21,6 millions d'euros. Un trafic bien entendu illégal étant donné que le bénitier géant, aussi appelé localement « taklobo », est une espèce protégée.
Une alternative attrayante pour les trafiquants
Depuis l'interdiction du commerce de l'ivoire d'éléphant par la Chine en 2017, la coquille de bénitier géant fait pourtant figure d'alternative intéressante pour les braconniers car son négoce est pour l'instant moins surveillé. La préférence du marché pourrait ainsi se déplacer de l'ivoire d'éléphant vers le bénitier géant, met en garde la WJC. « Nous savons qu'il existe un lien entre les deux et qu'ils font l'objet d'un trafic simultané », atteste dans le National Geographic Olivia Swaak-Goldman, la directrice générale de l'ONG. Huit saisies de coquilles de bénitier en Chine (soit un cinquième des saisies) comprenaient également de l'ivoire d'éléphant ou de narval. Le commerce de coquille serait aussi très intense sur Internet.
Le saviez-vous ?
Le bénitier géant, dont il existe sept espèces, figure depuis 1983 sur la liste II de la Cites (Convention on International Trade of Endangered Species), ce qui signifie que leur commerce n’est pas illégal dans l’absolu mais couvert par un permis d’exportation. La collecte et l'exportation de l'espèce sont interdites aux Philippines, les contrevenants encourant jusqu'à trois ans d'emprisonnement et des amendes de 3 millions de pesos (51.000 euros).
Les efforts de repeuplement menacés
Il est difficile d'estimer l'ampleur du trafic de bénitiers géants. La saisie massive d'octobre 2019 suggère que les stocks s'accumulaient depuis des années sans que personne ne s'en aperçoive. Selon la WJC, la pandémie aurait aussi favorisé le commerce illégal, certains pêcheurs ayant perdu leur moyen de subsistance habituel avec la perturbation des activités. « Les volumes saisis récemment sont alarmants », dénonce Elizabeth John du réseau Traffic qui traque le commerce illégal d'espèces sauvages. « Ce que nous pouvons dire à ce stade, c'est que la collecte massive de coquilles semble être le résultat d'une activité assez récente, peut-être au cours des dix dernières années ».
Ce trafic est, en tous cas, une catastrophe pour l'espèce, qui a déjà pratiquement disparu dans de nombreuses régions. Alors que des efforts de repeuplement avaient réussi à faire augmenter à nouveau les populations, ces derniers risquent d'être anéantis par ce nouveau négoce.
Un si gracieux poulpe « Un poulpe photographié dans le lagon de Mayotte lors d’une grande marrée basse. Cette photo a été prise dans seulement 30 cm d’eau. Elle fut primée en 2017 comme photo sous-marine de l’année. » © Gabriel Barathieu, tous droits réservésSélectionnée parmi 4.500 photos issues de 67 pays, cette image a été prise avec un 14 mn, un très grand angle qui accentue, ici, délicatement les proportions. La prise, en lumière naturelle, à 100 iso, a permis de révéler un doux contraste et des couleurs sublimes. L’objectif a ainsi pu capter ainsi tous les détails de la texture délicate, la transparence de l’eau et la fine granulosité du sable.Cette pieuvre commune (Octopus vulgaris), un céphalopode, est le plus évolué des mollusques, qui apparait à l’ère du Cambrien. L’évolution a donné naissance à la seiche et le calmar, le nautile étant un lointain cousin qui a conservé sa coquille. Jusqu’à présent, la pieuvre était considérée comme solitaire mais récemment, des chercheurs ont découvert au large de l’Australie, deux « cités » de pieuvres suggérant une organisation sociale communautaire.
L’incessant ballet de la raie manta « Face à face avec cette géante du lagon de Mayotte. Je l’ai vu arriver de loin, rasant le sable comme un avion de chasse. C’était le moment à ne pas louper. J’ai pris une grande inspiration et je suis descendu pour me coller au fond et lui faire face, sans bouger. C’est alors qu’elle est passée juste au-dessus de moi, comme un avion qui décolle. Magnifique ! » © Gabriel Barathieu, tous droits réservésNager au milieu des raies mantas, ces étranges poissons peu farouches, procure sans aucun doute une émotion intense longtemps gardée en mémoire. Le ballet majestueux et gracieux de ces poissons cartilagineux rajiformes est fascinant et… incessant car, pour se maintenir en vie, elle doit faire circuler l’eau dans ses branchies en permanence, moyennant quoi son espérance de vie serait d’au moins 50 ans.Deux sortes de raies mantas se distinguent : la raie manta des récifs, la plus tropicale avec des taches noires sur la face ventrale, et la raie manta océanique qui est plus grande pouvant peser jusqu’à deux tonnes et d'une envergure qui peut atteindre huit mètres.Bien que surnommée Diable de mer, en raison des sortes de cornes autour de sa bouche, la raie manta est inoffensive et se nourrit de plancton. Avec une rapide vitesse de fuite, les seuls prédateurs en mesure de l’inquiéter sont les grands requins. La raie est ovovivipare et a une maturité sexuelle tardive conjuguée à un taux de fécondité assez faible, de plus elle ne pond qu’un œuf à l’issue d’une gestation d’un an. Elle est aujourd’hui considérée par l’Union internationale pour la conservation de la nature comme une espèce vulnérable, également victime de surpêche, que ce soit pour la consommation ou pour de pseudo vertus thérapeutiques.Sur son site, Gabriel Barathieu donne de précieux conseils pour réussir vos photos en contre-jour.
En tête à tête avec un calmar « Un focus sur l’évent d’un calamar photographié lors d’une plongée de nuit ». © Gabriel Barathieu, tous droits réservésDifficile d’approcher en plein jour ces céphalopodes décapodes. Celui-ci était-il un petit calmar comestible ou un de ces mollusques géants qui peuplent les récits fantastiques et les films d’horreur ? Ces céphalopodes (dibranchiaux teuthoïdes) apparus au début du Jurassique n’ont conservé comme vestige de leur coquille qu’une structure interne dans le manteau, en forme de plume cornée. Les petits calmars, vivant aux bords des côtes, en surface, sont équipés de nageoires et sont sujets à bien des interrogations : volant en escadrille, ils se propulsent quelques secondes hors de l’eau en éjectant un jet d’eau, le tout en adoptant une allure aérodynamique.Petits ou grands, les calmars ont la faculté de changer la structure de leur peau et leur couleur (homochromie) pour se fondre dans leur environnement.Pour ce qui est du calmar colossal, les dernières données attestent un poids de 495 kilos et une dimension de 10 mètres pour le manteau, une vingtaine avec les tentacules. Ceux-là vivent dans les grands fonds, intriguant les chercheurs et la littérature s’en est délectée jusqu’à Jules Verne. Leurs globes oculaires peuvent mesurer 30 centimètres ; ils sont dotés d'une sensibilité qui leur permet de percevoir jusqu’à 120 mètres la bioluminescence des micro-organismes lorsqu'ils sont perturbés au passage d'un cachalot et d'échapper ainsi à ce prédateur.
La très élégante crevette arlequin « Une crevette arlequin (Hymenocera picta). Peut-être l’un des plus beaux animaux que la nature ait pu produire. La crevette arlequin vit toujours en couple. Elle se nourrit exclusivement d’étoiles de mer ». © Gabriel Barathieu, tous droits réservésVoilà une parure que ne renieraient pas les grands couturiers. Toutes pinces dehors et virevoltante avec sa carapace articulée, la crevette arlequin, photographiée au large du Mozambique, est un petit crustacé décapode d’environ 5 cm qui apprécie les eaux chaudes de l’océan Pacifique et de l’océan Indien jusqu’à 30 mètres de profondeur. Sa carapace (ou livrée) est blanchâtre ponctuée de gros pois bleus ou rouges et ses pattes sont striées de bandes assorties.Reconnaissable avec sa queue trapézoïdale, elle peut retourner sa proie sur le dos avec ses grosses pinces aplaties. Elle vit en symbiose avec le corail qu’elle débarrasse des parasites et des prédateurs comme l’étoile de mer dont elle se délecte avec un léger penchant sadique : toujours avec le même rituel, elle prend tout son temps pour la déguster en débutant par les bouts d’un bras et en remontant vers le centre prenant soin de la laisser en vie le plus longtemps possible pour une dégustation en couple qui peut durer des jours…
La minuscule crevette de Zanzibar « Une crevette de Zanzibar (Dasycaris zanzibarica) sur son corail fouet. De jour, elle a une tout autre allure. Mais, de nuit, les pigments blancs se rétractent dans les chromatophores au crépuscule et se dispersent à l'aube, d'où des changements dans les livrées chromatiques et dans l'aspect général des crevettes. La nuit, elles sont souvent plus transparentes et le jour plus colorées ». © Gabriel Barathieu, tous droits réservésCe minuscule corps translucide (2 cm) est une crevette de la vaste famille des Palaemonidae. Fines et élancées, elles vivent généralement sur un corail fouet, les bandes transversales blanches leur permettent de se camoufler dans un mimétisme parfait afin de se protéger des prédateurs.Pour plonger au-delà des 60 mètres, la législation française exige un niveau 3 et Nitrox confirmé pour débuter dans la pratique de la plongée TEK. Il reste beaucoup à découvrir, l’exploration de ces zones profondes ayant jusqu’ici été limitée en raison des contraintes liées à la plongée à l’air. Seules, la vue et la main d’un plongeur expérimenté peuvent recueillir d’aussi précieuses informations pour les scientifiques.
Le crabe porcelaine, merveille de la nature « Crabe porcelaine symbiotique (Neopetrolisthes maculatus) vivant exclusivement aux abords des anémones magnifiques. Les apparences sont trompeuses, il ne s’agit pas d’un vrai crabe ». © Gabriel Barathieu, tous droits réservésEt oui, ce crabe, évoluant au large de l'île de la Réunion, n’a que 3 paires de pattes. Du groupe des anomoures, le crabe porcelaine est aussi une merveille de la nature, reconnaissable à sa carapace beige, tachetée de pois rouges, à son corps aplati de 3 cm de diamètre environ et ses deux énormes pinces plates. Il se rencontre dans l'océan Indien et dans le Pacifique tropical. Il s’implante sur les grandes anémones du récif car c’est là, dans les tentacules, qu’il élit domicile, de préférence sur les plus urticantes qui, par leurs propriétés, repoussent les prédateurs. Il vit en couple mais chacun chez soi sur son anémone, sauf en période de reproduction, la femelle portant durant 4 semaines 1.600 œufs. Le crabe porcelaine est un filtreur, captant les particules en suspension pour s’en nourrir en agitant de fins filaments placés devant son orifice buccal et qu’il agite comme un éventail.
La crevette impériale sur son concombre de mer « Une crevette impériale (Zenopontonia rex) sur une holothurie rencontrée au pied du second tombant à une profondeur de 76 mètres ». © Gabriel Barathieu, tous droits réservésDans la zone mésophotique, au large de Mayotte, entre 50 et 150 m de profondeur, là où l’obscurité domine, l’exploration se fait difficile mais elle intéresse de plus en plus les scientifiques dont certains pensent qu’elle pourrait devenir la prochaine zone refuge d’espèces récifales en raison du réchauffement climatique.À Mayotte, le photographe nous donne à voir de très près cette belle crevette impériale qui ne mesure pas plus de 3 cm. Elle se reconnaît avec ses deux plaques frontales aplaties qui font office d’antennes, un rostre effilé qui prend naissance entre ses beaux yeux pédonculés et la couleur violet qui colore le bout de deux grosses pinces avant et ses pattes ambulatoires. Son corps est large et aplati, sa livrée est alternativement, selon le jour et la nuit, de couleur orange ou blanche en raison de la dispersion d'un pigment blanc dans les chromatophores tégumentaires. La crevette peut aussi changer sa couleur en adoptant celle de son environnement. Souvent observée en couple, c’est une nettoyeuse des fonds qui se nourrit de débris organiques et ne se rencontre que sur le corps des grosses holothuries et de gros mollusques opisthobranches.
La pieuvre, grande virtuose de la transformation « Focus sur l’œil d’un poulpe. On peut distinguer les millions de cellules (chromatophores) qui peuvent changer de couleur en une fraction de seconde ». © Gabriel Barathieu, tous droits réservés.C’est assurément, le plus intelligent des mollusques, outre ses huit bras, ses trois cœurs, son bec dur, il se distingue par un nombre de neurones impressionnant (500 millions) mais répartis dans les bras. Des bras et des ventouses qui, indépendamment les uns des autres, sans ou avec contrôle centralisé, peuvent goûter, sentir, toucher et… voir vraisemblablement. Les yeux de la pieuvre, munis de paupière, présentent à peu près la même structure que ceux des vertébrés. Ils sont relativement petits et ne disposent que d’un seul récepteur de lumière, la pieuvre ne peut donc pas distinguer les couleurs, pourtant elle est douée de « camouflage chromatique » changeant sa structure de peau et de sa couleur au gré de son humeur ou des dangers.Plusieurs hypothèses tentent d’expliquer cet état. Pour certains scientifiques, elle capterait la lumière en la décomposant en longueur d’onde. D’autres supposent que ce sont par les vibrations perçues sur sa peau. Son mode de perception des couleurs demeure un sujet d’étude et s'expliquerait par un cheminement de l’évolution pour le moins différent de celui des vertébrés.
Un crabe au large de l'île de Mayotte « Un petit crabe des crinoïdes (Tiaramedon spinosum) qui, en fin de compte, est une femelle avec des œufs ». © Gabriel Barathieu, tous droits réservésAussi curieux que cela puisse paraître, et malgré les apparences, c’est un crabe posé sur les crinoïdes, ces non moins étranges animaux marins qui ressemblent à des plantes aquatiques chevelues et dont les lointains cousins s’apparentent aux oursins et aux étoiles de mer. Petit mais costaud, il est hérissé de six pics épineux et saillants, y compris sur les pattes. Il lui faut bien cela pour se protéger car ce minuscule crustacé, photographié au large de l'île de Mayotte, est vraiment vulnérable. En effet, sa carapace ne mesure guère plus qu’un centimètre de diamètre. Il ne se rencontre que sur le corps dur des crinoïdes avec lesquelles il vit en symbiose et qui constitue un refuge idéal.
Un calamar ondulant « Un calamar photographié de nuit près des côtes de l’île de La Réunion ». © Gabriel Barathieu, tous droits réservésC’est un calamar des récifs, de la famille des loliginidés, pourvu de grandes nageoires qui ondulent comme un voile posé sur la longueur du corps. Un brin féérique, cette photo mais pourtant, ce céphalopode est naturellement translucide avec des reflets irisés bleuâtres, et est tacheté de points pouvant émettre une lumière par bioluminescence. Les yeux, démesurément grands, reflètent aussi une lumière métallique très vive.Grâce à ses photos macro et d’ambiance, Gabriel Barathieu contribue à faire avancer la connaissance scientifique. Dans le cadre du projet MesoMay, il récolte des données scientifiques, fait des relevés des récifs coralliens et collabore aux programmes de recherche et d’inventaires faunistiques qui ont déjà pu répertorier des espèces nouvelles pour Mayotte ou bien mentionner des espèces à des profondeurs où elles n’avaient jusqu’à présent jamais été observées. Toutes les données étant utiles aux scientifiques, Gabriel Barathieu, depuis 2017, plonge le long de la pente externe du récif corallien de Mayotte jusqu’à 120 mètres et en ramène des relevés géomorphologiques révélant des tombants et des cavités impressionnantes.