Les changements climatiques peuvent affecter la répartition et l’abondance de la vie marine. C’est une évidence. Pour en savoir plus, des chercheurs ont mené une évaluation intégrée à l’aide de plusieurs modèles. Leur conclusion : la biomasse d’animaux marins diminuera, quel que soit le scénario d’émission de CO2 avec des pertes plus importantes encore au sommet de la chaîne alimentaire.


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    Les chercheurs mettent en garde sur les impacts des changements climatiques sur la répartition et l'abondance de la vie marine depuis de nombreuses années. Cependant, prévoir l'ampleur de ces conséquences restait difficile jusqu'à présent, du fait des incertitudes des modèles utilisés. En utilisant une combinaison de plusieurs modèles climatiques et écosystémiques, une équipe internationale de chercheurs -- regroupés au sein du consortium international FishMIP -- est parvenue à présenter la première évaluation globale des effets du changement climatique sur les écosystèmes marins.

    L'étude révèle que la biomasse mondiale d'animaux marins, c'est-à-dire le poids total des animaux marins dans l'océan (poissons, invertébrés et mammifères marins), diminuera d'ici la fin du XXIe siècle, quels que soient les scénarios d’émission de CO2 envisagés par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climatGroupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). En cause : la hausse des températures et la diminution de la production primaire.

    La biomasse marine globale pourrait diminuer de 17 % d’ici 2100.

    Ainsi, si les émissionsémissions de gaz à effet de serregaz à effet de serre suivaient la trajectoire actuelle, la biomasse globale diminuerait de 17 % d'ici 2100 -- par rapport à la moyenne des années 1990-1999. Les chercheurs précisent toutefois que si le réchauffement planétaire se limitait à 2 °C sur cette période, la biomasse mondiale ne diminuerait que de 5 %.

    Les pourcentages d’évolution de la biomasse d’animaux marins par rapport à la fin du XXe siècle selon les régions du globe et selon deux scénarios d’émission de CO2 : forte atténuation des émissions pour RCP2.6 et poursuite sur un rythme actuel pour RCP8.5. © Heike K. Lotze et al., Dalhousie University
    Les pourcentages d’évolution de la biomasse d’animaux marins par rapport à la fin du XXe siècle selon les régions du globe et selon deux scénarios d’émission de CO2 : forte atténuation des émissions pour RCP2.6 et poursuite sur un rythme actuel pour RCP8.5. © Heike K. Lotze et al., Dalhousie University

    Le sommet de la chaîne alimentaire et certaines régions plus touchées

    L'étude suggère également que les impacts du changement climatique pourraient être plus graves aux niveaux les plus élevés de la chaîne alimentaire. Les poissons et les mammifères marins -- rendus plus vulnérables par le processus d'amplification trophique -- connaîtront des déclins plus importants que le phytoplanctonphytoplancton et le zooplanctonzooplancton.

    La cartographie des changements projetés dans l'océan mondial révèle aussi que la biomasse diminuera très fortement -- de 40 à 50 % -- dans de nombreuses régions océaniques tempérées et tropicales, où les populations humaines dépendent souvent directement des ressources marines et où la biodiversitébiodiversité marine est déjà fortement affectée par des effets des activités humaines. À l'inverse, de nombreuses régions polaires pourraient voir leur biomasse augmenter.

    Alors que près de 11 milliards d'humains peupleront la planète en 2100, les chercheurs appellent les décideurs à mettre en place des mesures pour une gestion durable des pêchespêches et pour la conservation des écosystèmesécosystèmes. « Les résultats de cette étude peuvent aider à anticiper l'évolution des ressources marines et éclairer les négociations internationales en cours sur le climat et la biodiversité », indique OlivierOlivier Maury, spécialiste de la modélisationmodélisation des écosystèmes marins à l'IRDIRD. « Ils constituent un point de départ pour que les gouvernements élaborent des stratégies de préventionprévention et d'adaptation. »


    Biodiversité : 49 % d'animaux marins en moins en 40 ans, selon le WWF

    Un rapport du WWFWWF tire la sonnettesonnette d'alarme sur l'état de la biodiversité des océans. Le réchauffement climatiqueréchauffement climatique, mais aussi la surpêchesurpêche et la destruction des milieux naturels, menacent ces écosystèmes pourtant essentiels à l'humanité. Pour Marco Lambertini, directeur général du WWF : « Nous conduisons collectivement l'océan au bord du précipice »

    Article de Marie-Céline RayMarie-Céline Ray paru le 17/09/2015

    L’Homme serait responsable du déclin des espèces marines. La surpêche, la pollution et le réchauffement climatique sont pointés du doigt. © Kim Seng, Flickr, CC by nc nd 2.0
    L’Homme serait responsable du déclin des espèces marines. La surpêche, la pollution et le réchauffement climatique sont pointés du doigt. © Kim Seng, Flickr, CC by nc nd 2.0

    Le WWF a rendu public son « Rapport Planète Vivante Océans 2015 » qui dresse un portrait particulièrement sombre de la biodiversité océanique. Le WWF y utilise l'indice planète vivante (IPV) qui mesure l'évolution des populations de vertébrésvertébrés. Il s'avère que l'IPV des populations marines a baissé de 49 % entre 1970 et 2012. La chute la plus importante a été constatée entre 1970 et le milieu des années 1980. Ensuite, l'indice est resté globalement stable, mais dans les années récentes, une nouvelle baisse est observée.

    Si en 40 ans, les populations de vertébrés marins ont diminué de moitié, ce déclin toucherait particulièrement les poissons consommés par l'Homme : ils ont eux aussi diminué de 50 %, voire parfois plus. Plus précisément, en ce qui concerne les poissons, sur 930 espècesespèces comptabilisées par l'IPV, il y a eu une réduction de moitié de l'effectif global entre 1970 et 2012 et le déclin touche notamment ceux que nous consommons, comme ceux de la famille des scombridés (maquereaux, thonsthons, bonitesbonites...), avec une chute de 74 % entre 1970 et 2010.

    Pourtant, l'Homme devrait prendre particulièrement soin de cette ressource car le poisson joue un rôle alimentaire et économique important. D'après le WWF, il représente ainsi la principale source de protéinesprotéines de trois milliards de personnes, tandis que la pêche et l'aquaculture font vivre 10 à 12 % de la population mondiale. Mais dans le monde, la consommation de poisson par habitant est passée de 9,9 kgkg dans les années 1960, à 19,2 kg en 2012, d'après la FAOFAO.

    Les récifs coralliens pourraient disparaître en 2050 si les températures continuent à augmenter au rythme actuel. © Wim Hertog, Flickr, CC by nc nd 2.0
    Les récifs coralliens pourraient disparaître en 2050 si les températures continuent à augmenter au rythme actuel. © Wim Hertog, Flickr, CC by nc nd 2.0

    Disparition programmée des récifs coralliens en 2050

    Certaines régions du globe sont plus touchées que d'autres comme l'Asie du sud-est, les zones tropicales et subtropicales, mais aussi la Méditerranée. De même, l'indice des poissons des eaux profondes de l'Atlantique nord a reculé de 72 % au cours des 40 dernières années. Parmi les écosystèmes aquatiques, les récifs coralliens sont réellement menacés de disparition : au cours des 30 dernières années, ils auraient perdu plus de la moitié des coraux durs constructeurs. Les projections sur les décennies à venir suggèrent qu'en 2050, si la température augmente toujours au rythme actuel, l'océan sera trop chaud pour ces récifs.

    L'océan pâtit aussi de la pollution, notamment par les plastiques : 250.000 tonnes de morceaux de plastiqueplastique flotteraient ainsi sur les océans et 8 millions de tonnes de déchets plastiques regagneraient l'océan chaque année.

    Pour arrêter le déclin du nombre des poissons, le rapport du WWF suggère de créer plus de zones protégées et des quotas de pêchequotas de pêche. Il souligne aussi l'effet nocif des subventions qui encouragent la surpêche. Actuellement seulement 3,4 % des océans sont protégés et la mise en place de mesures pour préserver le thon rougethon rouge a permis des résultats encourageants.