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Jusqu'à présent, les investigations sur le degré de toxicitétoxicité des scorpions étaient certainement données prioritaires à la vingtaine d'espèces identifiées comme mortelles pour l'Homme sur les 1.900 répertoriées dans le monde. Or, la quasi-totalité de ces espèces létales appartient à la famille des Buthidae où se classe précisément Buthus occitanus, le scorpion jaune du Sud de la France. L'an dernier, en Algérie, quatre personnes seraient décédées des suites d'une piqûre sur les 25.000 cas enregistrés. Qui plus est, une envenimation par la sous-espèce française Buthus occitanus Amoreux, dit scorpion languedocien ou occitan, a pu provoquer plusieurs cas de coma, notamment chez des enfants. Pour Marie-France Martin-Eauclaire, chercheuse à l'université Aix-Marseille, cet arachnide s'avère bel et bien dangereux pour notre espèce.
Dans une étude à des fins scientifiques mais aussi médicales parue dans Toxicon, cette spécialiste émérite du centre de recherche en neurobiologie et neurophysiologie de Marseille et ses collaborateurs ont collecté de 50 à 200 microgrammes de venin de quatre individus du Midi, près d'Orange (Vaucluse) et du massif des Maures (Var) -- avant de les relâcher --, puis en ont analysé les composants biochimiques.
Chasseur nocturne d'araignées et de scolopendres, le scorpion jaune se terre en journée sous des pierres, dans des lieux ouverts, chauds et secs. Son venin serait plus dangereux qu’on le croyait. © Alvaro Rodriguez Alberich, Wikimedia Commons, cc by sa 2.0
Le scorpion jaune, un arachnide doré dangereux mais rare
À leur grande surprise, le venin du scorpion Buthus occitanus Amoreux se révèle similaire, par la présence d'un large panel de toxinestoxines de type alpha, de celui d'espèces nord-africaines du genre Androctonus, responsables de 100 décès par an. Ces peptidespeptides bloquent les canaux ioniquescanaux ioniques responsables du passage des ionsions sodiumsodium (Na+)) et potassiumpotassium (K+) à travers la membrane des cellules nerveuses, musculaires ou encore glandulaires, et provoquent vomissements, diarrhéesdiarrhées, troubles cardiaques et neurologiques, voire la mort. « Le Buthus languedocien peut représenter un danger réel pour l'être humain au même titre que les spécimens d'Afrique du Nord », conclut donc la toxicologuetoxicologue dans la revue Science & Santé (page 6) de l'Inserm.
Un résultat étonnant pour cette espèce, puisque d'autres animaux du genre Buthus, comme Buthus eupeus en Russie et Buthus martensii en Chine, sont connus pour leur venin à très faible quantité en toxines de type alpha, et par conséquent considérés comme bien moins nocifs pour l'Homme.
En France, le faible nombre d'envenimations par Buthus occitanus Amoreux serait dû à l'isolement géographique des populations, qui privilégient des habitats peu fréquentés par l'Homme, comme la garrigue calcairecalcaire ou encore des terrains ruraux en friche. Il y a donc peu de chances de croiser l'aiguillon de l'animal, qui reste de surcroît une espèce protégée et soumise à la réglementation préfectorale.