La décomposition des restes humains produit des composés qui affectent la couleur et la réflectance des feuilles des plantes. Ces changements sont susceptibles d’être détectés par drone, ce qui permettrait de couvrir une large zone de recherche.


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    Les affaires criminelles où les victimes sont soigneusement enterrées dans une forêt pullulent dans les rubriques Faits divers des journaux. En mai 2019, le corps d'un homme de 26 ans avait, par exemple, été retrouvé dans un bois près d'Andalou, dans le Bas-Rhin, sur les indications du suspect. Mais, en l'absence d'aveu et d'idée précise sur l'emplacement du corps, la recherche peut s'avérer longue et laborieuse. Des scientifiques de l'université du Tennessee (États-Unis) ont découvert un nouvel outil à destination de la police scientifique : la botanique. Dans un article publié dans Trends in Plant Science, Neal Stewart et ses collègues affirment qu'il est possible de détecter les cadavres en examinant la couleurcouleur des feuilles des arbres. Encore mieux : ces changements subtils seraient repérables depuis le ciel par drone.

    Une « overdose » d’azote

    Le premier indice est celui engendré par la décomposition du corps. Un cadavre humain contient environ 2,6 kgkg de composés azotés, de quoi apporter une grande quantité de fertilisant aux plantes qui vont alors produire davantage de chlorophylle. « Si l'on considère une surface de décomposition d'environ 3 m2, la quantité d'azoteazote ajoutée à la rhizosphère est environ 50 fois supérieure au taux d'engrais azotés saisonnier recommandé pour les arbres et arbustes dans les zones tempérées des États-Unis », détaille l'étude. Le problème, c'est que les cadavres d'animaux en décomposition produisent le même effet reconnait Neal Stewart, surtout pour les gros mammifères comme les cerfs ou les daimsdaims. Mais les cadavres humains sont généralement enterrés plus profond, ce qui modifie la disponibilité des nutrimentsnutriments. Selon la rapidité de décomposition, on observe ainsi un changement de couleur et de réflectance des feuilles.

    Comment détecter un cadavre grâce aux plantes. © <em>Trends in Plant Science</em>, traduction et adaptation C.D pour Futura
    Comment détecter un cadavre grâce aux plantes. © Trends in Plant Science, traduction et adaptation C.D pour Futura

    Gros fumeurs et vêtements synthétiques

    Une autre piste possible est de détecter des composés chimiques spécifiques présents dans les cadavres humains. Les chercheurs mentionnent l'exemple du cadmiumcadmium, qui est présent dans les poumonspoumons des gros fumeurs ou bien chez les gens vivant à proximité de sites contenant des déchets dangereuxdéchets dangereux ou des usines libérant du cadmium. Ce dernier est métabolisé par la plante et affecte également la production de chlorophylle. Un troisième indice provient des substances contenues dans les vêtements et les chaussures qui, là encore, sont susceptibles de modifier la couleur des feuilles.

    Détecter la « signature » humaine par drone

    À présent, Neal Stewart et son équipe cherchent à identifier les métabolitesmétabolites les plus pertinents pour la détection de restes humains. Il a pour cela conçu un imageur de plantes capable d'analyser comment la réflectance ou la fluorescence des feuilles change avec le temps lorsque les plantes sont à proximité de restes humains. Une fois les spectresspectres de diagnosticdiagnostic compilés, les chercheurs pourront alors identifier ces changements par drone, ce qui permettra de couvrir une large zone de recherche en peu de temps, « et ainsi déterminer les meilleurs endroits pour envoyer une équipe de recherche », avance Neal Stewart.

    Les investigations se poursuivent dans la « ferme à cadavres » du laboratoire, un terrain d'un hectare près de la ville de Knoxville où les étudiants et chercheurs en médecine légalemédecine légale mènent leurs expériences sur les cadavres en décomposition. Un lieu particulièrement lugubre, mais rudement utile pour résoudre les affaires criminelles.