Plus grand que l'Angleterre, la France, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne réunies, le Cerrado est aujourd’hui l’un des écosystèmes les plus menacés au monde, dévasté à 50 % par la déforestation, l’agriculture intensive et l’exploitation minière. À croire que l’Homme ne supporte pas la beauté…

Zone de transition vers la forêt amazonienne, cette savane arborée est principalement située au Brésil dont elle couvre 22 % de la superficie. Le Cerrado s'étend des rives de l'océan Atlantique jusqu'au centre du continent, débordant sur le Paraguay et la Bolivie. C'est l’un des biomes le plus riche et le plus ancien au monde, 25 types de phyto-physionomies lui sont reconnus. Terre de contrastes paysagers, sans demi-mesure, ce territoire ne connaît que deux saisons, la saison sèche et la mousson brésilienne.

Cette région joue un rôle de collecteur et de distributeur d’eau où prennent naissance les plus importants bassins hydrographiques du Brésil. Neuf Brésiliens sur dix utilisent de l’électricité générée par l’eau du Cerrado. Les cascades et chutes d’eau sont caractéristiques de son paysage, notamment au parc national de la Chapada dos Veadeiros dans l'État de Goiás, classé au patrimoine mondial de l’Unesco avec celui d’Emas. On dit du Cerrado qu’il est une forêt à l’envers grâce à la nature du sol et aux racines des petits végétaux qui forment un réseau très profond, environ 70 % de la biomasse est souterraine.

Ce sont deux millions de kilomètres carrés de végétation, hautement convoitée et menacée par l’agriculture intensive : 50 % de son territoire a été converti par l’Homme qui en a fait, entre autres, son « grenier à soja ». Il ne reste, encore intacte, que 20 % de la végétation d'origine et moins de 3 % de sa superficie sont actuellement protégés par la loi alors que le Cerrado abrite près de 5 % de la biodiversité mondiale : pas moins de 160.000 espèces de plantes et animaux, endémiques ou en voie d'extinction, vulnérables ou menacées.

Tandis que la protection de la forêt amazonienne concentrait l’attention des médias internationaux, le Cerrado, avec son terrain plus facile à défricher, était en toute discrétion, entre 2002 et 2008, deux fois plus laminé que l’Amazonie. D’autant plus facilement que le foncier appartient majoritairement à des propriétaires privés.

Le Cerrado, inconnu jusqu’en 2000, a été propulsé sur la scène internationale lors de la conférence Climat de Copenhague en 2009. Requalifié en biome remarquable, il est devenu sujet de préoccupation environnementale majeur devant aussi réconcilier l’agro-business avec une agro-industrie durable et la protection des populations autochtones (Amérindiens, Quilombolas).

Malgré une reconnaissance tardive, aujourd’hui, le Brésil s’est engagé d’ici 2020 à réduire de 40 % la déforestation illégale avec un nouveau code forestier et a placé au centre de sa stratégie la lutte contre le changement climatique. Les dernières dispositions doivent encourager la création de réserves privées du patrimoine naturel. Marcio Cabral, dont les photos ont été souvent récompensées, nous emmène sur ces terres pour nous dévoiler la beauté irréelle, aussi extraordinaire que fragile.

© Marcio Cabral, tous droits réservés