Découvrez comment l'utilisation de graphes révolutionne la surveillance et la traque des débris spatiaux, assurant ainsi la sécurité des orbites et des missions spatiales. Une approche innovante et efficace pour un environnement spatial de plus en plus encombré que nous explique Moriba Jah, professeur d'ingénierie aérospatiale à l'université du Texas à Austin et cofondateur et scientifique en chef de Privateer Space.


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    Depuis le lancement historique du premier satellite Spoutnik en 1957, l'exploration spatiale a provoqué une révolution majeure dans notre manière de vivre et d'interagir avec l'espace. Les satellites, qui étaient autrefois des symboles de la puissance d'une idéologie, sont aujourd'hui devenus des instruments cruciaux intégrés à notre vie quotidienne. Depuis l'orbite, ils ont considérablement élargi nos horizons en fournissant des services de communication, de navigation, d'observation de la Terreobservation de la Terre et de météorologiemétéorologie, qui ont profondément transformé notre façon de travailler, de nous divertir et même de nous déplacer. Ainsi, les satellites ne sont plus simplement des instruments technologiques, mais des « partenaires » indispensables dans notre existence moderne, soulignant l'importance vitale de la conquête spatiale dans notre vie de tous les jours.

    Cependant, cette utilisation intensive des satellites a également entraîné un problème inattendu à l'époque de SpoutnikSpoutnik : la multiplication des débris spatiaux, transformant l'environnement spatial autour de la Terre en un domaine saturé de fragments de toutes tailles et compliquant l'activité opérationnelle des satellites et des infrastructures orbitales.

    Voir aussi

    Pollution spatiale : une mission inédite d'approche et d'étude d'un gros débris spatial

    Actuellement, nous assistons à une nouvelle course vers l'espace, stimulée par l'avènement de la miniaturisation des technologies spatiales et la diminution des coûts d'accès. Ces phénomènes ont suscité un engouement croissant pour l'utilisation de l'orbite basse, avec de plus en plus d'acteurs, entreprises privées et agences spatiales, se lançant dans cette course à l'espace.

    Si nous ne prenons pas des mesures décisives, les activités humaines et satellitaires en orbite basse pourraient être gravement entravées par cette pollution. En effet, la multiplication des débris spatiaux, leur masse cumulative et la superficie qu'ils occupent sont en constante augmentation depuis le début de l'ère spatiale. À certaines altitudes, le syndrome de Kessler s'est déclenché, rendant leur utilisation problématique.

    Dans ce contexte, la gestion des débris spatiaux est devenue une priorité pour l'ensemble de la communauté spatiale. S'il est impératif de mettre en œuvre des stratégies de gestion des déchetsdéchets spatiaux, telles que le nettoyage actif des orbites les plus congestionnées et la conception de futurs satellites pour une désorbitation contrôlée, il y a de nombreuses autres initiatives visant à rendre l'espace plus sûr et durable.

    Parmi elles, citons celle de Moriba Jah et de son entreprise Privateer Space, qui font le pari de suivre et de recueillir des données sur les objets en orbite terrestre en développant Wayfinder, une base de donnéesbase de données de graphes qui permet de stocker et d'analyser des informations cruciales sur les débris spatiaux, contribuant ainsi à assurer la pérennité de l'espace.

    L'utilisation d'une base de données de graphes pour surveiller et réduire les débris spatiaux représente une approche novatrice et efficace. Cette technologie permet de traiter de grandes quantités de données spatiales, d'analyser les liens entre les divers objets en orbite et de faciliter la prise de décisions éclairées pour protéger notre environnement spatial.

    L'utilisation d'une base de données de graphes pour surveiller et réduire les débris spatiaux représente une approche novatrice et efficace

    En collaboration avec Neo4j, l'entreprise de Moriba, Privateer Space, a développé une base de données de graphes nommée Wayfinder2, qui suit plus de 26 000 objets en orbite proche de la Terre. Comme le déclare Moriba Jah, professeur d'ingénierie aérospatiale et d'ingénierie mécanique à l'université du Texas, « nous suivons plus de 50 000 objets dans l'espace, d'un téléphone portable à la Station spatiale internationale. Malheureusement, parmi ces 26 000 objets, ils n'existent que 3 500 à 4 000 objets qui fonctionnent et fournissent un service quelconque, comme la navigation de position ou la synchronisation avec les systèmes mondiaux de navigation par satellite. Le reste ? Tous ces objets sont des déchets ».

    La parole à Moriba Jah, professeur d'ingénierie aérospatiale à l'université du Texas à Austin et cofondateur et scientifique en chef de Privateer Space.

    Futura : Quelle est la valeur des graphes par rapport aux services de surveillance de l'espace des gouvernements ?

    Moriba Jah : Les organisations qui surveillent l'espace sont fréquemment myopes en ce qui concerne leurs données, capturant des informations sur les objets de façon incohérente peu détaillée. AstriaGraph et Wayfinder se positionnent comme une alternative en intégrant des données provenant de diverses sources, notamment les gouvernements, l'industrie et d'autres chercheurs. Nous utilisons Neo4j pour alimenter notre graphe de connaissances, qui visualise des détails tels que le positionnement et la fonctionnalité d'autant d'objets que possible dans l'espace. Pour ce faire, il met en correspondance les points de données (dans ce cas, les objets dans l'espace) et les connexions entre eux pour fournir la plus grande collection au monde d'informations multi-sources sur les objets dans l'espace. En les suivant de cette manière, nous sommes en mesure de prédire les conjonctions ou les collisions entre les objets.

    Futura : Combien d'objets Privateer Space surveille-t-il ?

    Moriba Jah : Nous suivons actuellement environ 50 000 objets. Environ 5 000 d'entre eux fonctionnent, et le reste n'est que des débris spatiaux.

    Futura : Comment le graphe surveille-t-il des informations clés telles que l'état des débris, leur axe de rotation et leur positionnement spécifique ?

    Moriba Jah : Actuellement, à plusieurs reprises au cours de la journée, nos équipes collectent les données manuellement à partir de sources externes. Ensuite, nous procédons à la mise à jour du graphe de connaissances Neo4j avec toutes les nouvelles informations, de manière qu'il fournisse une image précise de l'espace à tout moment. Au fil du temps, notre objectif est d'automatiser ce processus et de fournir des flux en direct aux utilisateurs.

    Futura : Comment vos graphes peuvent-ils rendre l'espace plus sûr, plus sécurisé et plus durable par rapport à Usstratcom ?

    Moriba Jah : L'espace peut sembler infini, mais l'étendue de l'espace orbital est limitée, et c'est là où nous sommes confrontés à une catastrophe environnementale alarmante. En illustrant l'ensemble de l'espace dans notre graphe de connaissances, nous faisons comprendre au grand public et aux décideurs politiques la quantité de débris présente dans l'espace. Ce faisant, nous visons à donner aux chercheurs, aux gouvernements, et à d'autres organismes les moyens de prendre les mesures nécessaires et d'agir sur cette question, avant qu'il ne soit trop tard.

    Futura : Qu’est-ce qu’une base de données graphes et à quelles fins est-elle utilisée ?

    Moriba Jah : Une base de données de graphes se concentre sur les connexions entre les données et stocke les nœuds et les relations plutôt que les tables ou les documents comme c'est le cas dans une base de données relationnelle. Cette dernière permet généralement aux utilisateurs d'interroger les relations entre les données à trois ou quatre niveaux plus profonds, mais il devient impossible d'aller plus loin. En plus, les bases de données relationnelles ont une structure rigide et la reconnexion des données nécessite généralement une réorganisation de la base de données. Une base de données de graphes n'en a pas besoin, parce que les relations sont déterminées en fonction de la requêterequête effectuée sur le graphe. Par conséquent, une base de données de graphes peut modéliser plus facilement des scénarios du monde réel, comme nous le faisons avec AstriaGraph et Wayfinder. »