L'arrivée au point de Lagrange L2 du télescope spatial James-Webb est l'aboutissement d'une épopée lancée il y a plus de 30 ans. Le nouvel observatoire ultra-performant a réuni au cours des décennies des centaines d'ingénieurs et de chercheurs du monde entier pour élaborer le futur de l'observation du cosmos.


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    Tout réussit au télescope spatial James-Webb. L'appareil s'est correctement inséré au point de Lagrange L2, le 24 janvier, après un mois de voyage depuis son lancement le 25 décembre 2021. Positionné à 1,5 million de kilomètres de la Terre, le James Webb Space Telescope (JWST) est annoncé comme une véritable révolution dans le domaine de l'observation céleste. Grâce à un budget colossal de 10 milliards de dollars, le JWST est le télescope spatial le plus puissant créé à ce jour. Mais si le James-Webb est la promesse d'un bond technologique, il est aussi un parangon de collaboration internationale. D'agences spatiales étatiques américaines à des compagnies privées européennes, le JWST est un véritable patchwork de savoir-faire en provenance du monde entier.

    Le télescope James-Webb est actuellement positionné à 1,5 million de kilomètres de la Terre, au point de Lagrange L2. © Lesia, Observatoire de Paris
    Le télescope James-Webb est actuellement positionné à 1,5 million de kilomètres de la Terre, au point de Lagrange L2. © Lesia, Observatoire de Paris

    L'ambition internationale du JWST

    Le projet du télescope spatial James-Webb, antérieurement nommé Next Generation Space Telescope, a été entrepris par la Nasa dans les années 1990. C'est à la fin de la décennie, en 1997, que l'agence spatiale fait appel à deux compagnies privées, exclusivement américaines : Ball Aerospace and Technologies, TWR Inc. En 1999, le concept préliminaire du télescope est étudié par TWR et Lockheed Martin. Les ébauches du JWST sont jusqu'alors strictement américaines. En 2004, l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne (ESA) intègre le projet, trois ans avant la Canadian Space Agency (CSA), qui se greffegreffe à la constructionconstruction du JWST en 2007. Chacune des deux agences a collaboré financièrement. Ainsi, sur 10 milliards de dollars, l'Europe a financé près de 300 millions d'euros. La CSA a participé à hauteur de 40 millions de dollars. Mais les deux agences ont aussi fourni différents instruments, intégrés au télescope et utiles à la mission d'observation du James-Webb.

    NirSpec, l'un des spectrographes équipés sur le JWST construit par un consortium. © ESA, EADS Astrium
    NirSpec, l'un des spectrographes équipés sur le JWST construit par un consortium. © ESA, EADS Astrium

    La construction de l'instrument NirSpecNirSpec (pour Near-Infrared Spectrograph, ou spectrographe d'infrarouge proche), qui servira à imager des observations spectroscopiques d'objets célestes dont le rayonnement se situe dans l'infrarouge proche, a été coordonnée par l'agence européenne. L'ESA s'est avérée être un acteur capital dans la conceptualisation et la production de MiriMiri (Mid-Infrared Instrument, ou instrument d'infrarouge moyen). Ce dernier est le fruit d'une collaboration avec le Jet Propulsion Laboratory (JPL), un instrument optique qualifié de « polyvalent » recevant les données d'astresastres émettant dans l'infrarouge moyen. L'agence spatiale canadienne s'est quant à elle chargée de la conception de deux outils capitaux pour le JWST : le Fine Guidance Sensor (FGS), qui permet à l'optique du télescope de « viser » des cibles (étoilesétoiles, galaxiesgalaxies, nébuleusesnébuleuses, planètes...) tout en effectuant une mise au point, et le Near-InfraRed Imager and Slitless Spectrograph (NirissNiriss). Le Niriss est un spectrographe à grand champ dans l'infrarouge proche, installé sur le FGS.

    Une affaire de compagnies privées 

    L'ESA l'indique sur son site en toute transparencetransparence : la création de NirSpec et Miri a été réalisée par des compagnies privées. L'institution a ainsi délégué la manufacture de NirSpec à Airbus Defence and Space. La firme aérospatiale a dirigé un consortium d'entreprises et de sous-traitants pour délivrer l'instrument à l'ESA. À l'instar de l'agence européenne, la Nasa a fait appel a des sociétés privées pour la création d'outils importants pour le télescope James-Webb. Corning, grande entreprise américaine spécialisée dans l'élaboration de verresverres et céramiquescéramiques, a manufacturé plusieurs optiques équipés sur l'observatoire spatial. D'autres grands noms de l'industrie américaine ont joint leurs efforts pour travailler à l'aboutissement du JWST. Northrop Grumman, comme Airbus en Europe, a chapeauté les tâches d'autres firmes telles que Ball Aerospace ou encore Harris Corporation, chacune étant dédiée à des tâches spécifiques (création d'optiques, relais de communication...).

    Les équipes travaillant sur le télescope James-Webb, dans la salle blanche de Northrop Grumman à Redondo, en Californie. © Northrop Grumman
    Les équipes travaillant sur le télescope James-Webb, dans la salle blanche de Northrop Grumman à Redondo, en Californie. © Northrop Grumman

    Il faudra cependant attendre quelques mois supplémentaires pour admirer le résultat de 30 ans de travaux de cet effort scientifique international. Pour l'heure, tout se déroule à la perfection pour le télescope James-Webb, positionné au point de Lagrange L2point de Lagrange L2. Les premières observations de l'observatoire spatial ultra-moderne devraient avoir lieu au cours du deuxième trimestre de 2022.