Les physiciens utilisent depuis un certain temps des faisceaux de protons produits en accélérateurs pour analyser de façon non destructrice des objets intéressant les archéologues. Des chercheurs viennent de s’en servir pour déterminer la provenance des célèbres manuscrits de la Mer Morte.

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    Les manuscrits de la Mer Morte ont eu un retentissement mondial après-guerre lorsqu'on a découvert leur existence et que l'on a commencé à réaliser leur signification, aussi bien pour l'histoire du peuple hébreu que pour l'histoire des religions. Rappelons qu'il s'agit d'un ensemble d'environ 900 documents, essentiellement des parchemins, trouvés tout d'abord par des bergers dans des grottes de la région de Qumrân en 1947. Située sur les bords de la Mer MorteMer Morte, cette région aride en dessous du niveau de la mer a ainsi permis la conservation de textes en plusieurs langues, rédigés entre 200 av. J.-C et 70 ap. J.-C, et dont certains constituent les plus anciens textes bibliques parvenus jusqu'à nous. D'autres concernent ce qui semble bien être un groupe religieux.

    Sans que l'on en ait une preuve absolue, certains des manuscrits retrouvés décrivent la vie et la pensée d'un groupe que l'on pense être celui des Esséniens. Ils apportent un regard nouveau sur les courants religieux au sein du peuple hébreu à cette époque. Certains y voient même les racines du christianisme. Pour d'autres, il s'agit seulement de textes faisant partie des bibliothèques du Temple de Jérusalem et qui ont été mis à l'abri suite à l'invasion romaine et la destruction de ce temple. Le contenu des manuscrits de la Mer Morte est complexe et brûlant pour les archéologues et bien évidemment pas seulement pour eux.


    Une vidéo sur les manuscrits de la Mer Morte et Qumrân. Crédit : Infolive.tv.

    Probablement pour tenter d'y voir clair, un groupe de chercheurs du Laboratori Nazionali deldel Sud (LNS), parmi lesquels se trouve le physicienphysicien Giuseppe Pappalardo, a utilisé une méthode d'analyse nommée XPIXE, version portable de la méthode PIXE, qui a elle aussi été mise à contribution.

    A la base, la méthode dite de Particule Induced X-ray Emission (PIXE), que l'on connaît en français sous le nom de sonde nucléaire PIXE, s'apparente par son principe à la fluorescence X. Elle consiste à accélérer des protons à basses énergies (quelques MeV) pour bombarder les atomes qui se trouvent, par exemple, dans des objets précieux pour un archéologue (bijoux, tableaux, papiers...). Cette méthode est non destructrice et très sensible puisqu'elle peut mesurer des teneurs de quelques parties par million en certains éléments plus lourds que le sodium. 

    PIXE utilise des accélérateurs de particules bien moins complexes et puissants que ceux du LHC mais qui restent cependant encombrants. L'idée avec la méthode XPIXE est d'utiliser, pour une première détermination rapide, le rayonnement alpha émis par une source portable radioactive contenue dans un dispositif d'environ 30 cm : des noyaux de curium 244.

    Les noyaux d'héliumhélium constituant le rayonnement alpha excitent alors les couches internes des atomes contenus, par exemple, dans des peintures murales et des vases décorés. Ces atomes se mettent alors à émettre en rayons Xrayons X et les caractéristiques de ce rayonnement renseignent sur leur teneur dans l'objet analysé.

    Giuseppe Pappalardo et ses collègues du Laboratorio di Analisi Non Distruttiva (LANDISont utilisé à la fois la méthode XPIXE et la méthode PIXE pour analyser les taux de chlorechlore et de bromebrome présents dans 4 fragments de manuscrits d'environ 1 cm2 chacun. Ces derniers ne proviennent pas de textes bibliques mais bien d'un parchemin décrivant les règles de vie et la constructionconstruction du temple attribuées aux Esséniens.

    On sait que les parchemins en cuir doivent être lavés plusieurs fois lors de leur fabrication. Il se trouve que le rapport du brome sur le chlore mesuré dans les fragments étudiés est environ 3 fois supérieur à celui de l'eau de mer mais correspondrait assez bien à ce à quoi on doit s'attendre si l'eau sursalée de la Mer Morte a été utilisée. Il s'agirait donc bien de manuscrits fabriqués sur place.