au sommaire
Les prix IgNobel, la science autrement... © Annals of Improbable Research
Chaque année depuis 1991, la cérémonie de la remise des IgNobel (à prononcer à l'anglaise, donc, phonétiquement, ignoble) est un événement mondial et prisé par les meilleurs scientifiques. C'est pourtant eux, en première apparence, dont se moquent les organisateurs, par ailleurs éditeurs de la revue Annals of Improbable Research, qui « fait rire puis réfléchir ».
La remise des prix a lieu traditionnellement au Sanders Theatre de l'Université de Harvard et il est désormais d'usage que de véritables prix Nobel remettent les trophées. Cette année, c'est-à-dire jeudi 1er octobre, pour la dix-neuvième édition, ils n'étaient pas moins de neuf à venir récompenser les heureux récipiendaires des IgNobel 2009.
Sans les citer tous, Futura-Sciences ne peut manquer l'IgNobel de chimie décerné aux Mexicains Javier Morales, Miguel Apátiga et Victor M. Castaño qui ont découvert comment fabriquer des diamants avec de la tequila. Amusante, la trouvaille n'a rien d'anecdotique car elle ouvre la perspective de recouvrir une surface d'un film protecteur de grande dureté.
A la Newcastle University, Catherine Douglas et Peter Rowlinson ont travaillé, eux, sur un sujet bucolique et démontré que le simple fait de donner un nom à une vache... augmente la production de lait. Pour cette conclusion, les deux chercheurs britanniques ont reçu le prix de Médecine vétérinairevétérinaire (les organisateurs de l'IgNobel s'autorisent à créer des prix en fonction des circonstances). Sans doute les bons éleveurs ne seront-ils pas étonnés d'un tel résultat, expliqué par Catherine Douglas dans un communiqué de la Newcastle University, qui n'a pas manqué de relater l'affaire. « Nous avons montré qu'en améliorant les relations entre l'homme et l'animal ou en donnant davantage d'attention aux individus, par exemple en leur donnant un nom ou en s'occupant d'eux quand ils grandissent, vous réduisez le niveau de stressstress. » Or, poursuit la chercheuse, « le stress conduit à une production de cortisolcortisol, une hormonehormone qui inhibe la production de lait ».
Comment les ancêtres des femmes ont géré leur centre de gravité
Risque-t-on l'arthrose en faisant craquer ses doigts ? Donald L. Unger, un médecin de Thousand Oaks (Californie), a conduit l'expérience sur lui-même... pendant soixante ans. Durant toutes ces années, le docteur a consciencieusement fait craquer ses articulationsarticulations digitales de la main gauche mais pas de la main droite. Et pas d'arthrosearthrose à gauche ni à droite... La question est sérieusement posée depuis longtemps et d'autres effets de cette maniemanie (qui augmente la pression du liquide synovialliquide synovial jusqu'à faire naître des bulles de gaz dissous) ont été notés, comme une fatigue des ligaments.
Loin du boson de Higgs ou de la théorie des branes, l'IgNobel de physiquephysique a été décerné à Katherine Whitcome, Liza Shapiro et Daniel Liebermande (Etats-Unis), qui se sont penchés sur la femme enceinte et se sont demandés pourquoi elle ne bascule jamais vers l'avant. Avec un tel décalage du centre de gravitégravité, l'équilibre devrait être difficile et pourtant les chutes sont rares... Ces chercheurs ne sont pas médecins ni physiciensphysiciens mais anthropologues et s'intéressent à l'apparition de la bipédie chez les HomininésHomininés.
Marcher sur deux pattes plutôt que sur quatre impose une série d'adaptations, au niveau du genou, de la hanche ou des cervicales. Mais la femelle a un problème de plus quand son ventre s'arrondit. Les chercheurs démontrent que les espècesespèces de la lignée humaine ont trouvé une astuce : augmenter la cambrure du bas du dos (lordose) et renforcer les vertèbres lombairesvertèbres lombaires chez les femelles. Les AustralopithèquesAustralopithèques avaient déjà trouvé le truc, affirment les auteurs. Une question accessoire (non posée par les auteurs) pourrait être soulevée. Puisque cette cambrure semble présenter chez l'homme actuel un facteur d'attraction pour la femme, serait-il possible que cette préférence s'appuie sur un goût ancestral pour des femelles qui portent les futurs bébés de manière plus sûre ?
Prawo Jazdy, ou l'insoutenable légèreté de l'être
D'une manière plus décalée, le prix IgNobel de la Paix a récompensé un groupe de chercheurs suisses de l'Université de Berne qui ont planché, expériences à l'appui, sur les mérites comparés d'une bouteille pleine (de bière précisent les auteurs) et d'une bouteille vide pour frapper un crâne humain. Au laboratoire, les vides cassent sous un effort de 40 joulesjoules, contre 30 pour les pleines (de bière). Conclusion, il vaut mieux se faire assommer par une bouteille pleine. Mais, dans les deux cas, ces énergiesénergies dépassent ce que peut encaisser une boîte crânienneboîte crânienne. Mieux vaut donc ne pas se faire assommer du tout.
Les auteurs de l'étude ne sont pas des hooligans mais des médecins légistes et leur but étaient d'évaluer les dégâts auxquels on doit s'attendre après une bagarre où ce genre d'arme improvisée est souvent employé. Au passage, on note le risque élevé de fracture du crânecrâne fatale après un tel choc, contrairement à ce que montrent nombre de films de cinéma.
Finissons par l'IgNobel de littérature, attribué... à la police irlandaise. L'affaire a fait largement parler d'elle au début de cette année quand a été résolu le mystère du chauffard insaisissable. Prawo Jazdy, contrevenant multirécidiviste au code de la route, avait été arrêté plus de cinquante fois par la police mais les adresses relevées par les policierspoliciers étaient toujours différentes. Il a fallu une longue enquête et même une annonce dans un journal irlandais pour trouver le coupable... qui n'existait pas. Prawo Jazdy est en fait la traduction polonaise de permis de conduire.
« Rire puis réfléchir » disaient-ils...