Les récentes observations à basse altitude de Cérès, la première planète naine visitée, en composent un portrait de plus en plus net. Pourtant, les principales énigmes demeurent et de nouvelles surgissent...

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    Dans la grande famille des corps célestes sous la houlette du Soleil, il n'y en a pas deux qui se ressemblent. Tous partagent la même origine (à l'exception peut-être de lointaines comètes échangées avec d'autres étoiles...) et tous ont connu des évolutions différentes selon leurs masses, positions, entourages, compositions, etc.

    Au sein de la ceinture d'astéroïdes par exemple, non loin de nous, CérèsCérès occupe une « niche unique » selon Chris Russell, le directeur scientifique à l'université de Californie de la mission DawnDawn, la sonde spatiale qui visite ce sphéroïde de 940 km de diamètre depuis début mars 2015. « Cérès remplit une niche unique entre les corps glacés du Système solaireSystème solaire externe - avec leur surface gelée aussi dure que la pierre - et les planètes humides que sont Mars et la Terre, qui peuvent avoir à leur surface de la glace et de l'eau liquideliquide. »

    Planisphère de Cérès composé d’images en fausses couleurs réalisées à travers les filtres infrarouge (920 nm), rouge (750 nm) et bleu (440 nm) de l’un des spectromètres de Dawn. Au-delà de sa teinte apparente uniforme dans le visible, la planète naine affiche ici les différences <em>« subtiles »</em> de la réflectivité des terrains, trahissant une composition minéralogique variée. © Nasa, JPL-Caltech, UCLA, MPS, DLR, IDA

    Planisphère de Cérès composé d’images en fausses couleurs réalisées à travers les filtres infrarouge (920 nm), rouge (750 nm) et bleu (440 nm) de l’un des spectromètres de Dawn. Au-delà de sa teinte apparente uniforme dans le visible, la planète naine affiche ici les différences « subtiles » de la réflectivité des terrains, trahissant une composition minéralogique variée. © Nasa, JPL-Caltech, UCLA, MPS, DLR, IDA

    Une nouvelle énigme pour les chercheurs

    Dawn, qui a fêté le 27 septembre le huitième anniversaire de son lancement, poursuit sa campagne de cartographie de Cérès à 1.470 km d'altitude (désignée HAMO pour High Altitude Mapping Orbit). Même si les images ont une résolutionrésolution trois fois supérieures à celles de la phase précédente, les principales énigmes de la planète naineplanète naine, comme la nature des célèbres taches blanches dans le cratère Occator (mais aussi présentes dans de nombreux autres endroits) ou encore la montagne pyramidale culminant à 6 km, demeurent irrésolues. « Cérès continue de nous étonner et de nous intriguer à chaque fois que nous examinons la multitude d'images, de spectresspectres et maintenant les salves de particules énergétiques », a expliqué Chris Russell à la NasaNasa.

    En effet, les chercheurs qui observent et tentent de décoder les paysages de Cérès ont détecté, avec le spectromètrespectromètre à neutronsneutrons et rayons gammarayons gamma de Dawn, trois sursautssursauts d'électronsélectrons énergétiques qu'ils avouent ne pas savoir encore interpréter. « C'est une observation très inattendue pour laquelle nous sommes en train de tester plusieurs hypothèses », explique le directeur scientifique qui reconnait l'importance de cette découverte.

    Nouvelle carte topographique de Cérès avec les noms, récemment ajoutés, de plusieurs cratères et d'une montagne. En rouge et orange, les reliefs les plus élevés ; en bleu et vert, les moins élevés. © Nasa, JPL-Caltech, UCLA, MPS, DLR, IDA

    Nouvelle carte topographique de Cérès avec les noms, récemment ajoutés, de plusieurs cratères et d'une montagne. En rouge et orange, les reliefs les plus élevés ; en bleu et vert, les moins élevés. © Nasa, JPL-Caltech, UCLA, MPS, DLR, IDA

    La composition de Cérès et son histoire

    Ces nouvelles séries de survols qui ont débuté le 17 août dernier ont permis d'établir de nouvelles cartes de la planète naine qui ont été présentées cette semaine, à l'occasion de la Conférence européenne des sciences planétaires (European Planetary Science Conference, EPSC2015) qui se déroule à Nantes. L'une, constituée des images prises à travers des filtres infrarougeinfrarouge, rouge et bleu, présente en fausses couleurscouleurs les « subtiles » différences de réflectivité des matériaux qui affleurent à sa surface. Nous la devisons ainsi autrement que dans ses teintes naturelles, en apparence uniforme, ce qui permet de mieux repérer sous son maquillage, sa composition laquelle nous conte son histoire géologique. Les lieux les plus rouges sont les sites les plus réfléchissants dans l'infrarouge, le bleu pointe quant à lui une réflectivité accrue à de plus courtes longueurs d'ondelongueurs d'onde.

    La seconde carte est plus précise que les précédentes en matièrematière de topographie. Les couleurs indiquent les différentes élévations. Plus d'une douzaine de sites géologiques viennent de recevoir un nom, toujours en référence à des cultes, esprits ou divinités de l'agricultureagriculture dans le monde entier. Citons les cratères Jaja (Abkhazie), Ernutet (ancienne Égypte) ou encore, près du pôle nord, la montagne Ysolo (rites d'Albanie)...

    Les chercheurs sont frappés par la forme de la plupart des cratères de Cérès, très différents de ceux du gros astéroïde VestaVesta (530 km) visité par la sonde entre 2011 et 2012. « Les formes irrégulières de cratères sur Cérès sont très intéressantes, ressemblant à des cratères que nous avons vus sur RhéaRhéa, une lunelune glacée de SaturneSaturne, a commenté Carol Raymond, directrice scientifique adjointe de Dawn. Ils sont très différents de la forme en bol de Vesta. »

    La sonde spatiale Dawn poursuit sa mission de cartographie. Au cours de ce mois-ci, le vaisseau descendra progressivement jusqu'à seulement 375 km d'altitude qu'il atteindra en décembre. Son ultime campagne d'observation, à très haute résolution, est programmée jusqu'au minimum, le milieu de l'année 2016, a assuré l'équipe.