La théorie décrivant l’accélération des électrons tueurs dans la magnétosphère terrestre expliquerait aussi l’accélération des électrons ultra-relativistes dans la magnétosphère de Jupiter, selon des chercheurs anglais et américains. En bonus, c’est une énigme vieille de plus de 50 ans qui semble résolue : l’origine des intenses émissions radios de Jupiter.

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    Aurores sur Jupiter causées par des particules chargées observées par Hubble. Crédit : Nasa

    Aurores sur Jupiter causées par des particules chargées observées par Hubble. Crédit : Nasa

    C'est en 1955 que deux jeunes radioastronomes, Ken Franklin et Bernie Burke, découvrirent par hasard que JupiterJupiter était une intense source de rayonnement radio. Peu de temps après, en 1959, suite à la découverte de la ceinture de radiation terrestre par Van Allen, Frank Drake, que l'on connaît pour sa célèbre équation et qui est à l'origine du programme Seti, étudia les émissions radio de Jupiter. A partir de leur spectre, il en conclut que ces ondes étaient probablement émises par des électrons capturés dans un puissant champ magnétique. Ses déductions furent confirmées en 1973, quand la sonde spatiale Pioneer 10 passa près de Jupiter et y détecta un énorme champ magnétique ainsi qu'une intense ceinture de radiation.

    Le champ magnétique de Jupiter est 14 fois plus puissant que celui de la Terre, allant de 4,2 Gauss à l'équateuréquateur à 10 à 14 Gauss aux pôles, ce qui en fait le plus intense du système solairesystème solaire (à l'exception des taches solairestaches solaires). Selon toute vraisemblance, il proviendrait des mouvementsmouvements de la couche d'hydrogènehydrogène métallique située à grande profondeur à l'intérieur de la planète et qui, par sa rotation rapide (Jupiter fait un tour sur lui-même en moins de dix heures), agit comme une immense dynamodynamo. Dans les conditions de hautes pressionspressions qui règnent à l'intérieur de Jupiter, non seulement l'hydrogène deviendrait solidesolide mais aussi se comporterait comme un métalmétal conducteur.

    Alors que l'axe magnétique de Jupiter, comme celui de la Terre, est légèrement hors de l'axe de rotation, et que Jupiter et la Terre tournent dans le même sens, la polarité magnétique de Jupiter est opposée à celle de la Terre

    Il n'est pas difficile de montrer que des mouvements rapides d'électrons dans le champ magnétique de Jupiter provoquent une forte émission dans le domaine radio, dite émission synchrotron, expliquant bien les observations de DrakeDrake.

    Oui, mais quelles sont précisément les causes et les caractéristiques de ces mouvements rapides d'électrons ? 

    (1) Les gaz volcaniques de Io sont ionisés et forment un tore de plasma froid dense autour de Jupiter. (2) La rotation rapide de Jupiter modifie les  flux de champs magnétiques et excite des modes d’ondes dits <em>whistler</em>. (3) La résonance gyro-magnétique des particules avec les ondes accélère les électrons à des énergies relativistes (atteignant des mega-électron-volts). (4) Un mécanisme de diffusion radiale transporte des électrons vers la planète et les accélère à des énergies encore plus élevées (via des accélérations betatron et Fermi secondaires, voir le texte). (5) Un intense rayonnement synchrotron est émis par les électrons ultra-relativistes près de la planète (jusqu'à 1,4 Rj, rayon de Jupiter). Crédit : <em>Nature Physics</em>

    (1) Les gaz volcaniques de Io sont ionisés et forment un tore de plasma froid dense autour de Jupiter. (2) La rotation rapide de Jupiter modifie les flux de champs magnétiques et excite des modes d’ondes dits whistler. (3) La résonance gyro-magnétique des particules avec les ondes accélère les électrons à des énergies relativistes (atteignant des mega-électron-volts). (4) Un mécanisme de diffusion radiale transporte des électrons vers la planète et les accélère à des énergies encore plus élevées (via des accélérations betatron et Fermi secondaires, voir le texte). (5) Un intense rayonnement synchrotron est émis par les électrons ultra-relativistes près de la planète (jusqu'à 1,4 Rj, rayon de Jupiter). Crédit : Nature Physics

    Pendant 30 ans, les planétologues pensaient que les mécanismes impliqués étaient très probablement ceux d'accélération dits Betatron et Fermi .

    Aujourd'hui, Richard Horne du British Antarctic Survey (BAS) et ses collègues des universités de Los Angeles et de l'Iowa sont parvenus à la conclusion que, sans écarter les précédents, le mécanisme principal devait être le même que celui à l'origine des électrons tueurs de la magnétosphèremagnétosphère terrestre.

    En dépouillant les enregistrements de la sonde GalileoGalileo, ils ont en effet découvert les mêmes ondes électromagnétiquesondes électromagnétiques basses fréquencesfréquences que celles observées autour de la Terre et qui sont responsables des vitessesvitesses ultra-relativistes (presque celle de la lumièrelumière) des électrons tueursélectrons tueurs.

    Les calculs montrent alors bien que ces ondes basses fréquences baptisées whistler sont bien capables d'accélérer les électrons pour en faire les sources de rayonnement synchrotronrayonnement synchrotron observées. L'énergieénergie de ces ondes proviendrait des émissions volcaniques de la lunelune IoIo à l'origine de gazgaz ionisés plongeant vers Jupiter. En conjonctionconjonction avec la rotation rapide de Jupiter, ces courant de matièrematière ionisée dans la magnétosphère de Jupiter exciterait les modes whistler qui à leur tour accéléreraient les électrons.

    Comme les conditions physiquesphysiques régnant dans l'atmosphèreatmosphère et dans la magnétosphère de Jupiter sont différentes de celles de la Terre, les chercheurs comptent en apprendre plus sur toutes les facettes des mécanismes produisant les électrons tueurs. On pourra ainsi améliorer la qualité de la météorologiemétéorologie spatiale, un progrès important pour mieux protéger les satellites, qui sont vulnérables aux flux d'électrons tueurs autour de la Terre.