Elon Musk, qui vient de réussir un premier défi en amenant un satellite sur une orbite de transfert géostationnaire, s'apprête à en relever un autre : faire revenir le premier étage du Falcon 9 au sol par la seule puissance de ses moteurs. L'engin serait réutilisable, ce qui réduirait les coûts. Nouvel essai le 16 mars.

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    Sur les flancs du premier étage du Falcon 9, on distingue les jambes, repliées, nécessaires à son atterrissage sur la terre ferme. La réutilisabilité est l’une des stratégies étudiées par SpaceX dans un objectif plus vaste de rentabilité à terme. © SpaceX

    Sur les flancs du premier étage du Falcon 9, on distingue les jambes, repliées, nécessaires à son atterrissage sur la terre ferme. La réutilisabilité est l’une des stratégies étudiées par SpaceX dans un objectif plus vaste de rentabilité à terme. © SpaceX

    La société SpaceXSpaceX, qui compte sur le low cost pour s'imposer sur le marché très concurrentiel du lancement de satellites, mise sur la réutilisabilité pour amener le prix de son lanceur Falcon 9 sous les 50 millions de dollars. Sur son site, le Falcon 9 est actuellement proposé à 56,5 millions de dollars. La réutilisabilité, serpent de mer de l'industrie spatiale, n'a jamais convaincu les opérateurs de lancement. Certes, des études ont été menées : ArianespaceArianespace a un temps envisagé de réutiliser les boosters à poudre (EAPEAP) d'Ariane 5Ariane 5 et l'Esa a étudié des étages réutilisablesétages réutilisables. Mais tous, États-Uniens comme Européens et Russes, se sont rendus à l'évidence qu'en matière de lancement, la réutilisabilité était un non-sens économique.

    SpaceX mise sur cette technologie, car elle n'a pas le choix si elle veut s'imposer durablement sur le marché et devenir rentable. Pour les raisons expliquées dans un précédent article, et surtout pour baisser le coût de son lanceur. Car les prix affichés du Falcon 9 ne reflètent pas vraiment sa structure de coût. SpaceX ne pourra en effet pas proposer ad vitam æternam des prix artificiellement bas. S'il le peut aujourd'hui, c'est qu'il bénéficie de la manne financière de la Nasa et du ministère de la Défense états-unien.


    Essai du Grasshopper (sauterelle, en anglais), un prototype d’étage réutilisable à décollage et atterrissage verticaux testé dans les installations texanes de SpaceX, en octobre 2013. L'engin est monté à 744 m avant de redescendre. © SpaceX

    Récupérer le premier étage du Falcon 9, beau défi pour les ingénieurs

    La prochaine mission de SpaceX sera très intéressante à suivre. En effet, la société veut récupérer le premier étage du Falcon 9 après une descente à vitesse réduite, grâce à la puissance de ses moteurs. Son lancement est prévu le 16 mars. SpaceX enverra la capsule Dragon à destination de la Station spatiale internationaleStation spatiale internationale pour une troisième mission de ravitaillement après celles réalisées en octobre 2012 et mars 2013.

    L'idée est de rééditer le test précédent, qui n'avait pas réussi. L'objectif est de contrôler la descente du premier étage du Falcon 9, à la manière du Grasshoper présentée dans la vidéo ci-dessus sur une trajectoire de rentrée qui doit l'amener à se poser sur l'océan. Il s'agit de démontrer que l'étage peut être récupéré en sécurité et amené au-dessus d'un point donné en volant à la verticale. Les jambes du lanceur, bien que n'ayant aucune utilité pour amerrir, seront déployées pendant ce vol pour réduire la rotation de l'étage sur lui-même, comme un patineur réduit son mouvementmouvement tournoyant en ouvrant les bras.

    Une autre vue d'une des quatre jambes du système d'atterrissage du premier étage du lanceur Falcon 9. Un lancement pour tester la récupération du premier étage aura lieu le 16 mars prochain. © SpaceX

    Une autre vue d'une des quatre jambes du système d'atterrissage du premier étage du lanceur Falcon 9. Un lancement pour tester la récupération du premier étage aura lieu le 16 mars prochain. © SpaceX

    Trois minutes après le décollage, le premier étage se séparera de l'étage supérieur qui enverra la capsule Dragon sur une trajectoire de rendez-vous avec la Station. Après la séparationséparation, à la vitesse de Mach 6, le premier étage devra gérer son retour et ses moteurs ralentiront la descente pour se poser en douceur. Tout cela malgré les effets de la rentrée engendrés sur la structure de l'étage et le fonctionnement des moteurs, un autre point dur. Sur les neuf moteurs que compte l'étage, seuls trois seront vraisemblablement rallumés. Le temps de l'allumage devra être calculé au plus juste. Enfin, passer du régime des vitesses hypersoniques à celui des vitesses subsoniques induit également des contraintes dont il faut tenir compte pendant la rentrée.

    La récupération à terre pas encore à l’ordre du jour

    Un essai d'atterrissage sur la terre ferme n'est pas prévu dans l'immédiat, bien que SpaceX s'y prépare avec le prototype de l'étage réutilisable Grasshopper. Lors des prochains lancements de Falcon 9, les essais de récupération des étages se poursuivront au-dessus de l'océan tant qu'un certain nombre de phases du vol de retour ne seront pas complètement maîtrisées. Il s'agit d'éviter tout risque de perdre le contrôle de l'étage pouvant l'amener à dériver au-dessus de zones habitées ou industrielles et s'y écraser.

    Enfin, les autorités états-uniennes n'autoriseront le retour opérationnel d'un étage près du centre de lancementcentre de lancement de SpaceX que si la société démontre que l'étage emprunte une trajectoire de retour qui l'amène à son point d'atterrissage de façon très fiable. Pour le coup, des zones industrielles et habitées seront survolées. La récupération de l'étage n'a de sens que si l'engin parvient à se poser dans les installations où il sera préparé en vue d'une réutilisation future.