L'archéologie met souvent en exergue les pans d'histoire des plus brutaux que peuvent traverser des sociétés. Au cœur du Pérou, une équipe de chercheurs a découvert plusieurs dizaines de squelettes présentant un détail sordide : ils portent la marque de violents affrontements ayant causé leur mort, il y a 2 500 ans.


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    Au cœur des Andes centrales, les archéologues ont fait une découverte à glacer le sang. Dans la vallée de Caral-Supe, connue pour son foisonnement de sites précolombiens et classée au patrimoine mondial de l'Unesco, des excavations menées ces dernières semaines ont révélé des fosses abritant plusieurs dizaines de squelettes. Ces individus ayant vécu entre le VIe et le Ve siècle avant J.-C., auraient connu une mort particulièrement brutale. Une étude internationale publiée le 3 janvier dernier sur le site des Cambridge University Press rapporte que les squelettes portent les stigmatesstigmates de traumatismes violents, possiblement dus à des affrontements.

    Passionné·e d'archéologie ? Découvrez l'histoire du tombeau de Toutankhamon, et des morts étranges qui ont suivi sa mise au jour. © Futura

    Un air de violence en Amérique précolombienne

    Les 67 squelettes exhumés ont été étudiés sous toutes les coutures dans des laboratoires d'anthropologie et de médecine légalemédecine légale basés au Brésil. Les résultats sont formels : 80 % des individus présentent des blessures et des traumatismes graves infligés avant la mort. Plusieurs squelettes sont des enfants ou des adolescents. Les archéologues tentent désormais de résoudre cette scène de crime antique, les restes retrouvés datant de 500 à 400 avant J.-C. Les victimes auraient pu faire face à l'arrivée de criminels, qui auraient alors massacré la population d'une petite commune. Les corps auraient ensuite été enterrés selon les rites funéraires en pratique à cette période.

    Parmi les dizaines de squelettes retrouvés, nombreux sont ceux qui témoignent de la violence ayant provoqué la mort des individus. © Luis Pezo-Lanfranco
    Parmi les dizaines de squelettes retrouvés, nombreux sont ceux qui témoignent de la violence ayant provoqué la mort des individus. © Luis Pezo-Lanfranco

    Une époque méconnue de l’Amérique du Sud

    Pour les universitaires de la Fondation de recherche de São Paulo (FAPESP), cette découverte est une véritable aubaine. Outre les dépouilles, la campagne de fouilles a permis de recouvrer de nombreux artefacts, témoins matériels des conditions de vie des individus. Le massacre se serait produit à la fin de la culture Chavín, vers 500 avant J.-C., une période relativement peu documentée. Une ère de changements politiques et religieux, qui pourrait coïncider avec une forte instabilité dans la région. Ainsi, les individus découverts à Caral-Supe étaient relativement pauvres, comme peuvent l'attester les objets découverts dans les tombes. Les troubles socioculturels associés à des changements économiques auraient ainsi pu provoquer l'émergenceémergence de bandes criminelles dans les Andes.

    Les auteurs de l'étude évoquent un terme pour définir leurs recherches : bioarchéologie de la violence. Une découverte particulièrement morbide est ainsi devenue un élément clé pour comprendre la vie des peuples andéens d'il y a 2 500 ans. Le site EurekAlert révèle qu'une nouvelle étude devrait être publiée au cours des prochains mois. Basée sur les mêmes données, elle offrira de plus amples informations concernant les peuples de la vallée de Caral-Supe. Les universitaires espèrent ainsi lever le voile sur la fin de l'ère Chavín, et sur la vie méconnue des sociétés ayant traversé cette époque délicate.