Quand il s’agit d’infecter un hôte, le staphylocoque doré n’est pas à court de ressources. En utilisant une technologie de microscopie innovante, des chercheurs australiens ont observé en direct les ruses mises en œuvre par cette bactérie lorsqu'elle entame l'invasion d'une victime en commençant par la peau.

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    Le staphylocoque doré, ou Staphylococcus aureusStaphylococcus aureus, est une bactérie aux multiples facettes. Il est présent à l'état naturel chez environ 20 % des individus, principalement au niveau du nez, et ne cause souvent aucun dégât. Cependant, lorsque les défenses de l'hôte sont amoindries et qu'il aperçoit une ouverture vers l'intérieur de l'organisme, il peut devenir un adversaire redoutable.

    Ce pathogène possède un arsenal impressionnant de facteurs de virulence comprenant des toxines, des protéases, des nucléases mais aussi diverses protéinesprotéines lui permettant de s'accrocher aux tissus et d'échapper à la réponse immunitaire. Il est également passé maître dans l'art de s'adapter à son environnement. S'il trouve à boire et à manger, il peut rester paisiblement niché dans les narinesnarines. En revanche, lorsqu'il sent que ses réserves s'épuisent et qu'il est en position de force, il fabrique ses armes et part à l'attaque de son hôte.

    Les neutrophiles polynucléaires, capables de phagocytose, semblent présenter plusieurs noyaux, comme le démontre cette image qui correspond à une coupe. En réalité, ils n’en possèdent qu’un seul, composé de différents lobes. © <em>University of Edinburgh</em>, Wellcome Images, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Les neutrophiles polynucléaires, capables de phagocytose, semblent présenter plusieurs noyaux, comme le démontre cette image qui correspond à une coupe. En réalité, ils n’en possèdent qu’un seul, composé de différents lobes. © University of Edinburgh, Wellcome Images, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Les symptômessymptômes associés à une infection par le staphylocoque doré sont très variables. Ils peuvent être légers, comme c'est le cas pour les furoncles, ou beaucoup plus sérieux et peuvent conduire à une pneumonie ou à une méningiteméningite. Pour faire face à ce germegerme, les stratégies sont limitées et le corps médical se retrouve souvent face à une impasse. Au cours des années, ce « super-pathogène » a trouvé des parades contre la majorité des antibiotiques utilisés pour le combattre. Le Sarm, ou Staphylococcus aureus résistant à la méticilline, est devenu rapidement la terreur des hôpitaux et est responsable de 20.000 décès chaque année aux États-Unis, soit plus que le SidaSida et la tuberculosetuberculose réunis.

    Observer les bactéries et les cellules immunitaires en direct

    Les chercheurs ne perdent cependant pas espoir. Ils travaillent sans relâche pour mieux comprendre les tactiques d'attaque de cette bactérie menaçante et pour réussir à mieux la maîtriser. Grâce à une technologie innovante, une équipe de l'université de Sydney en Australie a pu observer les réactions de l'organisme et du staphylocoque lors de son entrée dans l'hôte. Leurs résultats sont publiés dans la revue Nature Immunology.

    « La peau est souvent la porteporte d'entrée dans l'organisme du staphylocoque doré, explique Wolfgang Weninger, le principal auteur de ces travaux. Il est donc important de comprendre ce qui se passe à ce niveau lorsque le germe pénètre dans l'hôte. » Pour ce faire, les scientifiques ont employé une méthode de microscopie de pointe, leur permettant d'observer les tissus vivants en direct et de manière très détaillée. Ils ont coloré génétiquement les bactéries en introduisant un gènegène fluorescent dans leur génomegénome et ont marqué les cellules immunitaires d'un échantillon de peau avec des anticorpsanticorps de différentes couleurscouleurs. À partir de là, ils ont pu observer l'entrée des bactéries dans la peau sous un microscope confocalmicroscope confocal multiphotonique. « Cette technologie nous permet de regarder directement ce qui se produit sous la peau, raconte le chercheur. On peut voir les bactéries, les cellules immunitaires, mais aussi toutes les structures de la peau comme les vaisseaux sanguins, les vaisseaux lymphatiques et les folliculesfollicules pileux. »

    Le staphylocoque doré bloque la migration des neutrophiles

    Leurs efforts ont été à la hauteur de leurs espérances et ils ont pu suivre les différentes étapes de l'infection en direct. Lors de l'entrée des staphylocoques dans la peau, les granulocytesgranulocytes neutrophilesneutrophiles sont les premiers à intervenir. Ils se déplacent dans les vaisseaux sanguins et arrivent sur le lieu de l'infection. Cette migration est guidée par des substances chimiques rejetées par les macrophages. Les bactéries ne se laissent pas surprendre si facilement et contre-attaquent rapidement. Elles libèrent une toxinetoxine, appelée hémolysine alpha, qui détruit les macrophagesmacrophages et perturbe le déplacement des neutrophiles. Profitant de ce moment d'égarement, les staphylocoques s'échappent et envahissent rapidement les tissus.

    Cette étude a permis d'analyser en détail les différentes étapes des prémices d'une infection par le staphylocoque doré. Même si de nombreux travaux sont encore nécessaires, ces informations pourront aider les chercheurs à élaborer un traitement contre cette bactérie dangereuse. Les scientifiques pourraient aussi appliquer cette méthodologie à d'autres espècesespèces bactériennes afin de comparer leurs tactiques d'invasion.