La capsaïcine qui donne son goût piquant aux piments et poivrons, pourrait être synthétisée dans la tomate, un légume beaucoup plus facile à cultiver, estiment des chercheurs brésiliens. Ces derniers envisagent même de transformer la tomate en «mini usine biologique» pour lui faire produire toute une série de substances.


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    Produire des tomates aussi pimentées que le piment rouge lui-même : c'est l'objectif d'une équipe de l'université de Viçosa, au Brésil, qui détaille son projet dans la revue Trends in Plant Science. Pour cela, ils comptent réveiller des gènesgènes endormis de la tomate pour lui faire fabriquer des capsaïcinoïdes, le composé chimique à l'origine du goût piquant du piment.

    Si la tomate pimentée intéressera certainement les fabricants de sauce et de ketchup, l'objectif des chercheurs est tout autre : la capsaïcinecapsaïcine présente en effet de nombreux intérêts thérapeutiques. Elle est, notamment, utilisée comme analgésiqueanalgésique (dans des crèmes, par exemple) et anti-inflammatoireanti-inflammatoire. Certaines études ont montré que le piment pouvait induire une perte de poids, améliorer la digestiondigestion et même avoir un effet préventif sur certains cancerscancers (poumonpoumon et prostateprostate). La capsaïcine est également l'ingrédient actif du gazgaz poivré employé dans les manifestions et les sprays d'auto-défense.

    Piment et tomate, deux anciens cousins

    Il faut savoir que le piment (espèce Vulgaris), d'un point de vue botanique, est un lointain cousin, séparé de la tomate, il y a 19 millions d'années. Il partage avec celle-ci, cependant, une grande partie de son patrimoine génétiquegénétique. « La tomate possède, en réalité, tous les gènes nécessaires pour fabriquer les capsaïcinoïdes, mais ils sont «silencieux» dans la tomate », explique Agustin Zsögön, le principal auteur de l'article.

    Il existe de très nombreuses variétés de piments et de poivrons qui produisent plus ou moins de capsaïcine. © Emmanuel Rezende Naves
    Il existe de très nombreuses variétés de piments et de poivrons qui produisent plus ou moins de capsaïcine. © Emmanuel Rezende Naves

    Deux procédés sont envisagés pour activer leur expression. Le premier fait appel aux activateurs transcriptionnels nommés TALE (transcriptional activator-like effectors), une suite de protéinesprotéines sécrétées par des bactériesbactéries qui a déjà montré son efficacité pour l'activation de certains gènes impliqués dans la biosynthèse des capsaïcinoïdes. La deuxième possibilité repose sur la technique CRISPRCRISPR-Cars9, des « ciseaux génétiques » qui permettraient d'insérer des promoteurs génétiques codant la transcriptiontranscription des gènes inactivés. Tout cela reste pour l'instant à l'état de théorie ; les chercheurs reconnaissent qu'ils n'ont aucune idée sur l'efficacité et le niveau de capsaïcinoïdes que l'on pourrait ainsi obtenir. Ces méthodes ont néanmoins fait leurs preuves dans de précédentes études et les chercheurs les jugent prometteuses.

    La voie de biosynthèse simplifiée de la capsaïcinoïde dans le piment. © <i>Emmanuel Rezende Naves et al, Trends in Plant Science, </i>2019
    La voie de biosynthèse simplifiée de la capsaïcinoïde dans le piment. © Emmanuel Rezende Naves et al, Trends in Plant Science, 2019

    Et pourquoi pas des tomates… à la vanille ?!

    Mais quel est l'intérêt de cultiver des tomates modifiées plutôt que d'utiliser simplement du piment ? « Le piment est très peu productif et difficile à cultiver, il est aussi très sensible aux conditions climatiques et aux maladies », atteste Agustin Zsögön. La tomate, à l'inverse, pousse rapidement. Sa productivité est 36 fois supérieure à celle du poivron et elle peut être cultivée sous serre, toute l'année.

    Au-delà des capsaïcinoïdes, les chercheurs envisagent de transformer la tomate en « mini fabrique » de différentes substances, comme la bixine, un colorant alimentairecolorant alimentaire orange, ou du betacarotène, un puissant antioxydantantioxydant. Interrogé par le magazine PopScience, Allen Van Deynze, biogénéticien à l'université de Davis de Californie, envisage, quant à lui, une tomate capable de produire... de la vanille. En effet, les capsaïcinoïdes sont dérivés de la vanillinevanilline et utilisent donc la même voie de synthèse à l'intérieur de la plante. Or, la vanille naturelle est extrêmement rare et chère (près de 1.000 euros, le kgkg). Le ketchup à la vanille, la saveur de demain ?