On a souvent considéré que planter des forêts aidait à freiner le réchauffement global. Pourtant, l'impact de ces puits de carbone n'est pas le même partout. Dans les hautes latitudes, un reboisement pourrait même avoir l'effet inverse...
En absorbant le dioxyde de carbone dans l'atmosphère, les forêts contribuent à refroidir notre planète. L'évapotranspiration, par l'augmentation de la couverture nuageuse qui en résulte, a également un effet positif. Au contraire, à cause de leur couleur foncée, les forêts absorbent le rayonnement solaire et favorisent le réchauffement climatique. Et le bilan de ces trois facteurs n'est pas le même dans toutes les régions du globe.
C'est en intégrant ces trois paramètres dans leur modèle qu'une équipe de chercheurs du Lawrence Livermore National Laboratory, sous la direction de Govindasamy Bala, est arrivée à une conclusion surprenante : une déforestation à l'échelle planétaire entraînerait un léger refroidissement de notre climat. Ainsi, les expériences virtuelles de déforestation à grande échelle qu'ils ont menées indiquent que la destruction totale et soudaine des forêts aurait pour effet de freiner le réchauffement de la Terre (en 2100, -0.3 °C que le cas sans déforestation globale). Mais l'intérêt majeur de leur étude, publiée ce mois-ci dans les Proceedings of the National Academy of Sciences, est sans conteste de montrer que l'impact climatique des forêts dépend fortement de leur latitude.
« Notre étude prouve que seules les forêts tropicales sont fortement bénéfiques au ralentissement du réchauffement global », précise Bala. « En plus d'absorber le gaz carbonique, elles favorisent les nuages qui aident à refroidir la planète. En d'autres endroits, le réchauffement du à l'effet albédo annule ou excède le refroidissement attribué aux deux autres effets ». Planter des arbres aux moyennes latitudes, tel qu'aux Etats-Unis et dans la plus grande partie de l'Europe, n'aurait que des effets marginaux sur le climat. « Mais des arbres supplémentaires dans les forêts boréales du Canada, de la Scandinavie et de la Sibérie pourraient réellement être contre-productifs », ajoute-t-il. Dans ces régions, l'obscurité des arbres privilégie l'absorption de chaleur, là où des champs enneigés l'hiver auraient pu refléter les rayons du soleil.
Bien qu'il remette en question l'efficacité d'un reboisement dans les régions de moyennes et hautes latitudes, leur travail ne justifie en rien d'abattre des forêts entières. Ken Caldeira, co-auteur de l'étude et climatologue renommé, nous met en garde : « Préserver les écosystèmes est un objectif primaire de la prévention du réchauffement global, et la destruction d'écosystèmes pour prévenir ce réchauffement serait une stratégie perverse et contre-productive ».
A l'avenir, Bala et ses collègues souhaitent faire tourner des simulations plus détaillées. Le type de forêt, par exemple, a de l'importance : les aiguilles foncées des pins peuvent avoir un impact plus important sur le réchauffement que les feuilles plus claires des peupliers. Ils envisagent également d'étudier l'effet d'une déforestation tropicale appelée à se produire dans les scénarios pris en compte par le GIEC.
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