Avec le réchauffement climatique, les chercheurs s'attendent à ce que la fonte de surface des plateformes de glace flottantes en Antarctique s'accélère. Mais les conséquences sur la stabilité desdites plateformes restent mal connues. L'étude réalisée par une équipe sur la disparition d'un lac de fonte pourrait apporter quelques réponses.
[EN VIDÉO] L’avenir de l’Antarctique se joue à Paris Du 14 au 24 juin 2021, la France accueille la 43e réunion consultative du traité de l’Antarctique (RCTA). Un traité destiné à protéger l’Antarctique et son environnement. Parmi les premières nations à s’être installées durablement sur ce continent blanc par le biais de la station Dumont d’Urville, la France y mène aujourd’hui encore des projets de recherche en étroite avec des équipes venues du monde entier. Avec l’Astrolab comme précieux outil de soutien logistique. © Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères
Nous sommes en hiver 2019. L'hiver de l'hémisphère Sud. Quelque part à l'ouest de l’Antarctique. Du côté de celle que les chercheurs appellent la plateforme de glace Amery. Une région qui draine d'énormes quantités d'eau et forment ainsi des lacs gigantesques à la surface de la banquise. Et ce fameux hiver 2019, les scientifiques ont assisté là à un phénomène rare : entre 600 et 750 millions de mètres cubes d'eau se sont évaporés d'un lac recouvert de glace.
Évaporés ? Façon de parler. En fait, des chercheurs de la Scripps Institution of Oceanography de l’université de Californie à San Diego (États-Unis) viennent tout juste de comprendre. « Nous pensons que le poids de l'eau accumulée dans ce lac profond a ouvert une fissure dans la plateforme de glace, une hydrofracture qui a permis à l'eau de s'écouler dans l'océan situé en dessous », explique Roland Warner, glaciologue, dans un communiqué.
Il ne restait alors plus, en lieu et place du lac, qu'une sorte de doline de glace. Une dépression semblable à un cratère s'étendant sur environ onze kilomètres carrés. Et contenant les restes fracturés de la couverture de glace. Le satellite ICESat-2 (Nasa) a été témoin de l'événement. Ses images montrent qu'au moment de la fracturation, la couverture de glace est tombée jusqu'à 80 mètres de profondeur. Même si en libérant toute cette eau dans l'océan, la plateforme flottante est remontée d'un coup. De plus de 35 mètres.
Vers un effondrement de la plateforme glaciaire ?
Les chercheurs ont déjà pu observer comment les petites plateformes de glace s'effondrent par hydrofracturation. Le phénomène avait pourtant rarement été observé sur une épaisseur de glace de quelque 1.400 mètres ! Mais, avec le réchauffement climatique, les modèles montrent que de plus en plus de lacs de fonte vont se former. Augmentant donc le risque d'hydrofracturation généralisée. Et faisant craindre un effondrement des plateformes glaciaires. Un effondrement qui serait responsable d'une élévation marquée du niveau mondial de la mer.
Les chercheurs soulignent tout de même qu'il est prématuré de conclure que le drainage de ce lac est lié directement au réchauffement climatique. Leurs données montrent que la quantité d'eau perdue cet hiver 2019 est plusieurs fois supérieure à l'apport annuel d'eau de fonte dans le secteur. Ce qui les amène à conclure que « cet événement brutal est apparemment le point culminant de décennies d'accumulation et de stockage d'eau de fonte sous un couvercle de glace isolant ».
Lors de la saison de fonte suivante, les glaciologues ont d'ores et déjà observé la formation d'un lac moins profond dans une zone soulevée de l'ancien lac. Ils ignorent toutefois si la doline se remettra à accumuler de l'eau ou si elle finira par l'écouler plus fréquemment vers l'océan. En 2020, la fissure s'est en tout cas brièvement rouverte. Et les chercheurs vont désormais suivre son évolution de près.
Glacier McDonald Montana Le glacier McDonald se situe dans le Montana, dans les Mission Mountains, une petite chaîne de montagnes faisant partie des Rocheuses. Ce glacier de petit gabarit (seulement 0,18 km²) est un survivant. Il se trouve le parc national de Glacier, où l'on comptait 150 glaciers en 1950. Ils n'étaient plus que 25 en 2010 et pourraient tous disparaître d'ici 2030 si rien n'est fait pour enrayer le changement climatique en cours.© 12019, Pixabay, DP
Patagonie Campo de Hielo Su, champ de glace sud La Patagonie abrite la troisième calotte glaciaire au monde, après l'Antarctique et le Groenland. On l'appelle le champ de glace sud, ou Campo de Hielo Sur en espagnol. Il recouvre 16.800 km² et se compose de dizaines de glaciers, dont le glacier Pío XI, aussi appelé glacier Brüggen, qui est le plus grand de la région. Il s'étale sur 1.265 km² et 66 km, ce qui en fait également le plus long glacier de l'hémisphère sud, l'Antarctique mis à part.Le champ de glace sud possède un petit frère, le champ de glace nord, qui s'étend sur 4.200 km². Tous deux sont les vestiges de la calotte de Patagonie qui recouvrait l'ensemble de la région (480.000 km²) durant la dernière période glaciaire.© Marcogrocha, Pixabay, DP
Glacier Schlatenkees dans les Alpes Avec une longueur de 6 km, pour une superficie de 9 km², le Schlatenkess est le plus grand glacier de la vallée du Tyrol oriental et le deuxième plus grand du groupe Venediger, une chaîne de montagne des Alpes centrales autrichiennes. Il est situé dans le parc national Hohe Tauern, à l'est du Grossvenediger, le principal sommet du groupe Venediger.© Rafael Brix CC BY-SA 3.0
Champ de glace en Patagonie Situé à la pointe du champ de glace sud de Patagonie, dans le parc national chilien Torres del Paine, le glacier Grey est un des plus spectaculaires de la région. Il mesure 6 km de largeur pour 30 m de hauteur. En 1996, il mesurait 28 km de long et recouvrait une surface de 270 km². Puis, telle la langue fourchue d'un serpent, le front du glacier se divise en deux avant de plonger dans le lac Grey, où des icebergs se détachent.Certaines parties du glacier Grey justifient la présence du mot « gris » dans son nom. Ce sont les moraines, des amas de terre et de débris rocheux charriés par le glacier tandis qu'il s'écoule vers le lac en contrebas.© Loreto Quijada, Wikimedia commons, CC BY-SA 4.0
Le glacier Viedma, Patagonie Le glacier Viedma est une des nombreuses merveilles du champ de glace sud de Patagonie. Il est situé à la frontière entre le Chili et l'Argentine, de sorte qu'il appartient à la fois au parc national chilien de Bernardo O'Higgins et au parc national argentin de Los Glaciares. Comme beaucoup de glaciers, Viedma se termine par un lac glaciaire du même nom, issu principalement de sa fonte, qui fait 80 km de long. Le front du glacier forme une falaise déchiquetée d'où des blocs de glace se détachent, puis dérivent jusqu'à ce qu'ils fondent.© Liam Quinn Wikimedia commons, CC BY-SA 2.0
Les glaces de la cordillère des Andes Les sédiments marins du bassin arrière-arc Crétacé ont été portés à des altitudes dépassant parfois 5.000 mètres lors de la formation des Andes. Ici, la cordillère des Andes, au Pérou. © IRD, Etienne Jaillard Reproduction et utilisation interdites http://www.indigo.ird.fr/fr
Le lac Grey de Patagonie, au Chili Le lac Grey (480 m d'altitude) et ses glaces dérivantes appelées tempanos. Photo prise dans la région de Magallanes, dans la province de Última Esperanza, en Patagonie, au Chili. © IRD, Denis Wirrmann Reproduction et utilisation interdites http://www.indigo.ird.fr/fr
Iceberg au large de Dumont d'Urville, en Antarctique Iceberg observé au large de Dumont d'Urville lors de la mission océanographique CADO (Coring Adélie Diatom Oozes, du 21 janvier 2003 au 17 février 2003) à bord du Marion Dufresne II dans l'océan Austral (observation par environ 66°30'S - 140°E). L'objectif de cette mission est d'extraire des carottes de sédiments marins en différents points du plateau continental au large de la Terre-Adélie afin d'étudier la régulation des climats récents (-10.000 ans). Référence : Journal du CNRS d'avril et mai 2003. © CNRS Photothèque, Xavier Crosta Reproduction et utilisation interdites http://phototheque.cnrs.fr/
La base antarctique Dumont d'Urville sur la Terre-Adélie Collecte de micrométéorites dans les régions centrales antarctiques. Arrivée de l'hélicoptère de la base polaire Dumont d'Urville sur le bateau l'Astrolabe qui réalise la liaison entre la Tasmanie et la Terre-Adélie (Antarctique). © CNRS Photothèque, Jean Duprat et Cécile Engrand Reproduction et utilisation interdites http://phototheque.cnrs.fr/