Une équipe d'astrophysiciens (1) de l'Observatoire de Paris et de l'Université de Genève (UNIGE) vient de fournir une nouvelle explication aux sursauts gamma, ces énigmatiques jets lumineux connus pour libérer l'énergie estimée à ce jour comme la plus puissante de l'Univers. Une étoile massive sur 10 000 meurt dans un sursaut gamma. Comment expliquer ce décès ? Sur la base de nouvelles observations, les chercheurs ont pu reconstituer les étapes d'un violent jeu de billard, dont les boules seraient des astres turbulents.

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    Les astrophysiciensastrophysiciens ne craignent pas les mystères. Parmi eux, le sursaut gamma, un phénomène qui prend l'aspect d'un éclairéclair surpuissant et qu'on interpréta comme le signe d'un essai nucléaire jusqu'en 1973 ! On sait aujourd'hui que ces sursauts sont liés à la mort des étoiles dites « massives », des astres dont la masse fait 30 à 100 fois celle de notre soleil. Les spécialistes conçoivent deux scénarios possibles pour ce décès en grandes pompes. L'un d'eux vient d'être affiné par des chercheurs de l'Observatoire de Paris et de l'Observatoire de Genève.

    Deux hypothèses pour une explosion unique

    Deux hypothèses prévalaient à l'émissionémission de rayonnement gamma qui se produit lors d'un sursaut du même nom. Il faut savoir que le phénomène signale la fin d'une étoile massive et que cette disparition s'achève dans tous les cas par un effondrementeffondrement de l'étoile et l'émission d'une énergieénergie considérable (le phénomène de supernova). Mais dans un cas sur 10000 l'explosion est spectaculaire, et comporte une émission gamma. On impute cette dernière à la rotation exagérément accélérée de l'étoile, qui perd son enveloppe et finit par s'effondrer sur elle-même -ou collapser. Un autre scénario tient pour responsable de cette explosion spectaculaire la fusionfusion de l'étoile avec une de ses pairs, fusion qui a lieu au terme d'un bal fou où les deux astres tourbillonnent. Ces deux cas de figure, qui fournissent les conditions théoriques d'apparition des sursauts gamma, font encore l'objet de débats. Ils sont cependant fortement renforcés par la découverte, récente, de supernovaesupernovae associées à ces événements. Les chercheurs ont étudié de nouveaux indices pour résoudre l'énigme.

    Un éloignement systématique

    En s'intéressant aux traces lumineuses qu'un sursaut gamma datant de 1998 a laissées dans la galaxiegalaxie ESOESO-184-G82, l'équipe franco-suisse a remarqué, à proximité, la présence de très nombreuses autres étoiles massives dans un amas stellaire compact. Ces étoiles, appelées Wolf-Rayet, ou WR (d'après les noms de deux astronomesastronomes de l'Observatoire de Paris), sont souvent en rotation rapide et finissent généralement leur vie en explosant comme supernova. Elles sont donc considérées comme d'excellentes candidates pour la production des sursauts gamma. Les images de la galaxie hôte du sursaut gamma ont montré de manière très étonnante que ce dernier n'avait pas eu lieu au coeur de l'amas, mais dans une région bien moins dense, située à près de 3000 années-lumièreannées-lumière de là (image ci-dessous). Intrigués par cet éloignement, les chercheurs ont examiné d'autres cas et ont systématiquement retrouvé une distance comparable, qui semble séparer les zones où s'est produit un sursaut gamma des groupements d'étoiles massives. Que s'est-il passé ?

    Image réalisée en 2001 par le Télescope Spatial de la galaxie ESO-184-G82, dans laquelle a été observé un sursaut gamma en 1998. L'image montre que la position du sursaut gamma, (accompagné d'une supernova) est située à 3000 années-lumière de la région contenant les étoiles massives.

    Image réalisée en 2001 par le Télescope Spatial de la galaxie ESO-184-G82, dans laquelle a été observé un sursaut gamma en 1998. L'image montre que la position du sursaut gamma, (accompagné d'une supernova) est située à 3000 années-lumière de la région contenant les étoiles massives.

    Quand les étoiles massives se chahutent

    Revenons à la ronde frénétique qu'exécute une étoile massive éjectée de son amas. Pour l'équipe de chercheurs, elle démarre avec les chocs que les étoiles massives infligent à l'une d'entre elles au sein d'un amas compact. La « malheureuse » se met à tourner de plus en plus vite sur elle-même, avant de se faire éjecter de ce «jeu de billard». Elle voyage durant 2 à 3 millions d'années, jusqu'à se retrouver à 3000 années-lumière du paquetpaquet stellaire où elle se trouvait initialement. Elle perd alors son enveloppe qui a été fragilisée dans l'aventure, puis finit par s'effondrer et mourir dans un sursaut gamma. Sa rotation rapide favorise une émission d'énergie (et de rayons gammarayons gamma) fortement dissymétrique.

    Le mystère dévoilé ?

    Ces rencontres inhabituelles fournissent une explication naturelle à la rareté des étoiles massives qui terminent leur vie sous forme d'explosions les plus brillantes qu'il soit donné d'observer dans l'UniversUnivers. Le principe de l'étoile voyageuse, sort renforcé par d'autres observations réalisées avec le Télescope SpatialTélescope Spatial. Il apporte une contribution importante à la compréhension des sursauts gamma, ces phares cosmiques permettant de baliser les confins de l'Univers, du fait de leur rayonnement surpuissant.

    (1) Equipe constituée de François Hammer, Hector Flores, Emeric Le Fl'och et Mathieu Puech pour l'Observatoire de Paris (GEPI) et Daniel Schaerer et Miroslava Dessauges pour l'Observatoire de l'Université de Genève