Une nouvelle étude révèle que considérer le problème de l’habitabilité des exoplanètes d’un point de vue thermodynamique pourrait permettre de cibler plus précisément les mondes sur lesquels une vie complexe a le plus de chance de s’être développée.


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    Une planète est dite « habitable » lorsqu'elle présente certaines caractéristiques que l'on pense favorables au développement d'une activité biologique. Ces caractéristiques se basent, bien sûr, sur ce que nous savons de l'origine de la vie sur Terre.

    Définition de la zone habitable circumstellaire

    Suivant notre connaissance des écosystèmesécosystèmes terrestres, une exoplanète présenterait ainsi des conditions d'habitabilité favorables si elle réunit trois critères essentiels : l'eau liquide, une source d'énergie et la présence de certains composés organiques (contenant du carbone) que l’on considère comme des « briques de base » du vivant. Si ce dernier critère est principalement dépendant de la nature des roches et de l'existence d'échanges géochimiques entre les différentes enveloppes planétaires, les deux premiers critères sont intimement associés à la position de la planète par rapport à son étoile, en regard des caractéristiques même de celle-ci. Ainsi est né le concept de « zone habitable circumstellaire ».

    Il s'agit de la région de l'espace, au sein d'un système planétaire, où la quantité d’énergie reçue par l’étoile est optimale et permet le maintien d’eau liquide. Cela ne signifie pas que toutes les planètes présentes dans la zone habitable de leur étoile possèdent nécessairement une vie extraterrestre à leur surface, mais que les conditions sont a priori favorables pour son apparition. Les planètes situées en dehors de cette zone seraient soit trop proches (et donc surchauffées), soit trop éloignées (et donc trop froides) pour voir se développer une activité biologique.

    Une nouvelle étude suggère cependant que cette définition de la zone habitable serait incomplète. Il manquerait la prise en compte d'un autre facteur clé : l'entropieentropie.

    Un schéma montrant l'évolution de la zone d'habitabilité (habitable zone, en bleu) autour d'une étoile. En abscisse, en échelle logarithmique, c'est la distance en unité astronomique (<em>distance from star</em>) ; et en ordonnée, la masse de l'étoile (<em>mass of star</em>) en masse solaire. Le cas du Système solaire est montré en haut, en comparaison avec le cas d'une naine rouge en bas. © ESO
    Un schéma montrant l'évolution de la zone d'habitabilité (habitable zone, en bleu) autour d'une étoile. En abscisse, en échelle logarithmique, c'est la distance en unité astronomique (distance from star) ; et en ordonnée, la masse de l'étoile (mass of star) en masse solaire. Le cas du Système solaire est montré en haut, en comparaison avec le cas d'une naine rouge en bas. © ESO

    Une haute entropie favoriserait l’émergence de la vie

    La notion d'entropie n'est pas évidente à appréhender. Il s'agit d'une grandeur physiquephysique abstraite qui intervient en thermodynamiquethermodynamique. De manière simplifiée, on peut dire que l’entropie donne une information sur le degré de désordre d’un système. Un système ordonné se caractérise par une entropie faible. Il dispose alors de l'énergie exactement suffisante pour maintenir son niveau d'ordre. À l'inverse, si ce système produit ou gagne de l'énergie, cela va entraîner du « désordre » et faire augmenter l'état entropique. Ainsi, un glaçon qui fond dans un verre représente un système où l'entropie augmente.

    Appliquons désormais ce principe aux êtres vivants. Pour soutenir les réactions chimiquesréactions chimiques qui leur permettent de vivre, les organismes ont besoin d'un certain apport énergétique. Mais ce processus est également émetteur d'énergie. L'activité biologique est donc source d'entropie pour l'environnement. Il apparaît ainsi que plus les formes de vie sont complexes et dynamiques, plus elles vont produire de l'entropie. De même, un haut niveau d'entropie, et donc de désordre, semble nécessaire à l'émergenceémergence de la vie.

    Considérer l’habitabilité d’un point de vue thermodynamique

    Dans un article publié dans la revue Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, Luigi Petraccone, de l'Université de Naples, définit ainsi la notion de « production d'entropie planétaire ». Les planètes ayant une haute production d'entropie planétaire seraient donc celles présentant les meilleures chances d'abriter et de supporter une biosphèrebiosphère complexe.

    Illustration d'une planète hycéanique. © Lucianomendez, <em>Wikimedia Commons</em>, CC by-sa 4.0
    Illustration d'une planète hycéanique. © Lucianomendez, Wikimedia Commons, CC by-sa 4.0

    L'étude révèle ainsi qu'au sein même de la zone habitable circumstellaire, la zone interne serait thermodynamiquement plus avantageuse pour le développement de la vie que la zone externe. L'auteur définit une « zone habitable entropique », qui restreint l'habituelle zone habitable en prenant en compte à la fois la présence d'eau liquide et une haute production d'entropie planétaire.

    Les résultats permettent ainsi de considérer les exoplanètes dites hycéaniques comme les meilleures candidates. Ces planètes chaudes possèdent de grandes quantités d'eau liquide et une atmosphèreatmosphère riche en hydrogènehydrogène. Elles peuvent atteindre la taille d'une mini-NeptuneNeptune.