En ce début 2018, les astronomes viennent d'observer (indirectement) les premières étoiles de l'univers quand il était encore très jeune. Certaines sont toujours avec nous. En 2014, une équipe de chercheurs australiens a débusqué à seulement 6.000 années-lumière de nous une étoile âgée de 13,6 milliards d’années. Logiquement baptisée Mathusalem, elle est la plus vieille jamais observée. Ses caractéristiques racontent les conditions physiques qui régnaient lorsque l’univers n’avait qu’environ 200 millions d’années.

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    Article paru le 11 février 2014

    Dans le dernier numéro de la revue scientifique Nature, le professeur Stefan Keller et son équipe (Australian National University, ANU, à Canberra) exposent leur étonnante découverte de l'étoile la plus âgée connue à ce jour. Une étoile dite de « Mathusalem », née seulement deux centaines de millions d'années après le Big BangBig Bang. Soit un âge vénérable estimé à environ 13,6 milliards d'années. Le précédent record était détenu en 2013 par HD 140283, dont l'âge est estimé à 13,2 milliards d'années...

    Inutile de la chercher aux confins de l'univers : l'étoile SMSS J031300.36-670839.3 appartient à notre galaxie, la Voie lactée. L'équipe du professeur d'astrophysique a eu la chance de la débusquer dans notre voisinage, à quelque 6.000 années-lumière de notre Système solaireSystème solaire. Une distance relativement courte rapportée à l'échelle cosmique.

    Située à seulement 6.000 années-lumière du Système solaire, l'étoile SMSS J031300.36-2670839.3 est la plus âgée connue à ce jour. Elle serait née après l'explosion d'une étoile hypermassive, environ 200 millions d'années après le Big Bang. © <em>Space Telescope Science Institute</em>, AAP

    Située à seulement 6.000 années-lumière du Système solaire, l'étoile SMSS J031300.36-2670839.3 est la plus âgée connue à ce jour. Elle serait née après l'explosion d'une étoile hypermassive, environ 200 millions d'années après le Big Bang. © Space Telescope Science Institute, AAP

    Trouver une aiguille dans une botte de foin

    Pour le professeur Mike Bessell qui a collaboré aux investigations, « il y avait une chance sur un million de la trouver », ce qui revient vraiment « à trouver une aiguille dans une botte de foin » et ne fut rendu possible que grâce au télescope SkyMapper de l'observatoire de Siding Spring (Coonabarabran, Nouvelle-Galles du Sud) employé dans le cadre d'une cartographie de cinq années du ciel austral. C'est « le seul capable de trouver des étoiles pauvres en ferfer par leur couleurcouleur ». L'étoile candidate a ainsi été découverte dès la première année, parmi les 60 millions photographiées avec la caméra de 268 mégapixels (les champs imagés sont 29 fois plus grands que la Pleine LunePleine Lune) installée au foyerfoyer du télescopetélescope de 1,3 m de diamètre.

    Comme l'affirme Stefan Keller, « le signe révélateur que l'étoile est si âgée est l'absence complète de tout niveau détectable de fer dans le spectrespectre de l'étoile ». C'est une caractéristique propre aux ancêtres stellaires formés dans les premiers temps de l'univers. À cette période, l'hydrogènehydrogène abondait, tandis que l'héliumhélium et le lithiumlithium existaient en plus petite quantité. Aussi, quelques dizaines de millions d'années après le Big Bang, les éléments les plus lourds n'existaient-ils pas encore. Il a fallu attendre les toutes premières étoiles, vraisemblablement hypermassives, pour qu'elles en produisent, avant d'exploser en supernova. Si bien que « le taux de fer dans l'univers s'accroît avec le temps au fil des générations successives d'étoiles, rappelle l'astrophysicienastrophysicien. Nous pouvons utiliser l'abondance en fer d'une étoile comme "horloge" qualitative qui nous raconte quand l'étoile s'est formée. »

    Les professeurs Stefan Keller et Mike Bessel ont découvert avec leur équipe de chercheurs l'étoile la plus âgée connue en sondant le ciel de l'hémisphère sud en quête de candidats. © David Paterson, ANU

    Les professeurs Stefan Keller et Mike Bessel ont découvert avec leur équipe de chercheurs l'étoile la plus âgée connue en sondant le ciel de l'hémisphère sud en quête de candidats. © David Paterson, ANU

    La plus vieille étoile trahie par son taux de fer

    D'après l'étude, le candidat stellaire qui a été débusqué fut engendré après la désintégration d'une étoile 60 fois plus massive que notre Soleil. Aujourd'hui âgé de 13,6 milliards d'années, il renferme cependant un million de fois moins de fer que l'astreastre qui nous éclaire (le SoleilSoleil est âgé de 4,6 milliards d'années). La quantité de fer de SMSS J031300.36-670839.3 est à peine suffisante pour former un astéroïdeastéroïde de la taille de l'Australie, tandis que celle du Soleil est « équivalente à environ 1.000 fois la massemasse de la Terre ». Voici donc « une recette très différente qui nous en dit davantage sur la nature des premières étoiles et sur leur façon de mourir ».

    À la question de la disparition d'une grande partie des éléments lourds produits par la supernovasupernova, les scientifiques répondent qu'ils furent probablement emportés dans « le trou noirtrou noir formé au cœur de l'explosion ». L'âge et les caractéristiques physiquesphysiques de l'étoile furent récemment confirmés par des observations menées avec le télescope Magellan (6,5 m de diamètre) de Las Campanas, au Chili.