De nouvelles observations, effectuées à l'aide d'un réseau de radiotélescopes, ont permis une mesure de la distance de la nébuleuse d'Orion avec une précision inégalée. Conclusion : l'erreur des précédentes estimations était de 20 %.
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La détermination précise des distances est l'un des problèmes centraux de l'astronomie car c'est l'un des piliers de l'astrophysique. Le Very Long Baseline Array (VLBA) vient de confirmer ce que l'on soupçonnait : la nébuleuse d'Orion, l'un des objets les plus étudiés par les astrophysiciens, ne se trouve pas à 1.565 mais à 1.270 années-lumière !
C'est Copernic qui le premier a eu l'idée de transposer la méthode dite de la parallaxe, utilisée depuis Hipparque à l'échelle du système solaire, à l'échelle des étoiles. Les tentatives en ce sens restèrent vaines jusqu'au début du XIX ième siècle, lorsque Bessel réussit le premier, en 1838, à mesurer la parallaxe de 61 Cygni.
La méthode est simple, il suffit de mesurer le changement de position apparent d'une étoile sur la sphère céleste au cours de l'année. Comme on peut le voir sur le schéma ci-dessous, la simple mesure de l'angle p, la parallaxe, à deux positions sur l'orbite terrestre formant une base triangulaire, permet de connaître la distance de l'étoile à notre système solaire, si l'on connaît la distance moyenne Terre-Soleil, la fameuse Unité Astronomique (UA).
Toutefois, cette méthode ne fonctionne que pour des étoiles relativement proches, et non seulement elle perd en précision avec la distance, mais elle devient de plus en plus difficile à mesurer, car p devient de plus en plus petit. Il existe en fait toute une série de méthodes qui prennent le relais, en prenant appui les unes sur les autres, au fur et à mesure que l'on sonde l'espace profond. L'incertitude sur la valeur exacte des distances peu croître. Il est donc vital d'augmenter la précision sur les estimations de distances pour assurer de bonnes bases à tout l'édifice de l'astrophysique et de la cosmologie.
Or, en ce qui concerne par exemple la nébuleuse d'Orion et l'amas ouvert d'étoiles qu'il contient, l'erreur possible sur la distance de 1 .565 année-lumière était tout de même important, presque 17 % avant les dernières estimations que vient de fournir le VLBA. De fait, l'erreur commise a été de 20 % environ puisque qu'elle est maintenant estimée à 1.270 années-lumière à 6 % près.
Une mesure de parallaxe non plus dans le visible mais en radio
Cette nouvelle évaluation a fait de nouveau appel à la méthode de la parallaxe, mais avec une technologie indisponible du temps d'Hipparque et de Bessel : la synthèse d'ouverture interférométrique dans le domaine des ondes radio.
Il s'agit d'enregistrer des ondes radio en provenance d'une région du ciel à l'aide de plusieurs télescopes répartis sur Terre. Dans le cas du VLBA, 10 radiotélescopes entre Hawaï et les Caraïbes ont été utilisés. En faisant interférer les signaux de chacun de ceux-ci, on obtient la résolution équivalente à un radiotélescope ayant un diamètre de plusieurs milliers de kilomètres, ce qui permet de former des images radio des centaines de fois plus fines et plus précises que celles fournies en optique par Hubble.
Cette correction de la mesure est beaucoup plus qu'un détail. Comme l'expliquent les auteurs de l'étude concernant l'amas de la nébuleuse d'Orion M42, Geoff Bower, Karin Sandstrom, J.E.G. Peek, Alberto Bolatto, et Richard Plambeck, tous de l'Université de Californie, à Berkeley, si la nébuleuse est plus proche, cela veut dire que les étoiles qui la composent sont moins brillantes que ce que l'on croyait.
En s'appuyant sur la théorie de l'évolution stellaire, on en déduit qu'elles sont presque deux fois plus vieilles que ce que l'on pensait ! Cela a des répercussions sur la façon dont on analyse la formation des étoiles dans cette région de la Galaxie et donc aussi sur la façon dont on comprend la naissance et l'évolution des étoiles dans d'autres régions de l'Univers.