Vénus a approximativement la taille de la Terre et elle possède une atmosphère avec des nuages. On pouvait donc croire qu'elle devait beaucoup lui ressembler, mais sa couverture nuageuse dissimulait un enfer que seul le radar de la mission Magellan avait percé il y a plus de 30 ans, montrant que la surface de Vénus était très volcanique, 60 fois plus que la Terre. On vient peut-être de comprendre pour la première fois pourquoi il en est ainsi.


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    Pendant la première moitié du XXe siècle, Mars n'était pas la seule planète du Système solaire sur laquelle les astronomesastronomes s'interrogeaient en ce qui concerne la présence de formes de vie et même carrément d'une civilisation intelligente technologiquement développée. En effet, VénusVénus avait clairement une atmosphèreatmosphère et sa masse et sa taille étant similaires à celles de la Terre, certains en déduisaient que la couverture nuageuse de la planète s'expliquait bien par la présence de vastes étendues d'eau, peut-être sous forme marécageuse. La seconde moitié du XXe siècle allait mettre un terme à ces espérances.

    Un événement marquant à cet égard a été le lancement le 4 mai 1989 à partir de la navette spatiale Atlantis, en orbite autour de la Terre, de la sonde Magellan de la Nasa. Après 462 jours de voyage et son insertion en orbite autour de Vénus, Magellan allait rapidement utiliser un radar sophistiqué pour cartographier sa surface. On en disposait déjà des aperçus depuis les missions soviétiques VeneraVenera des années 1980, mais on ignorait encore beaucoup de choses en raison de l'épaisse couche nuageuse dérobant en permanence cette surface au regard.

    Les volcans de Vénus vus par le radar de la sonde Magellan. © Nasa
    Les volcans de Vénus vus par le radar de la sonde Magellan. © Nasa

    85 000 volcans à la surface de Vénus

    Le radar allait révéler un monde profondément volcanique, mais sans que l'on puisse savoir si le volcanisme était toujours actif. Une chose était certaine, la surface de Vénus avait un très faible taux de cratérisation, ce qui impliquait qu'elle est très jeune, avec un âge inférieur à 1 milliard d'années d'après les premières estimations. On pouvait voir clairement aussi sur toute la planète d'impressionnantes formations d'origine volcanique, comme des volcansvolcans boucliers, des structures appelées pancakes, en forme de crêpes, et d'autres structures nommées corona et novanova, ainsi que des structures géologiques suggérant des flots de lavelave très récents. Mais aucune trace de tectonique des plaquestectonique des plaques comme dans le cas de notre Planète bleue, seulement des dizaines de milliers de volcans (on en compte aujourd’hui environ 85 000, soit 60 fois plus que pour la Terre).

    Pour les planétologues utilisant les modèles géophysiques et géochimiques testés dans le cas de la Terre et dont on pouvait transposer certaines des conséquences en raison de l'universalité des lois de la physiquephysique et de la chimiechimie, c'était le début d'une énigme. Vénus étant une planète rocheuseplanète rocheuse comme la Terre et de taille et masse similaires, qu'on en parlait parfois comme la jumelle de la Terre, pourquoi possédait-elle les marques d'un volcanismevolcanisme bien plus impressionnant ?

    Une équipe de chercheurs menée par des membres du Southwest Research Institute, aux États-Unis, pense enfin avoir trouvé la réponse comme elle l'explique dans un article publié dans Nature Astronomy.


    Une animation illustrant le bombardement cosmique au début de l'histoire de Vénus selon les dernières estimations. © Southwest Research Institute

    Naïvement, on pouvait déjà imaginer le scénario suivant : si Vénus est beaucoup plus volcanique que la Terre, c'est qu'elle contient beaucoup plus de chaleurchaleur. On sait que dans le cas de notre Planète, son stock de chaleur initiale découle de la combinaison de la chaleur dégagée par la désintégration de certains éléments radioactifs (acquis lors de sa formation par accrétionaccrétion) avec la chaleur libérée lors des collisions avec des corps célestes il y a environ 4,5 milliards d'années.

    Toutefois, Vénus s'étant formée dans une région du disque protoplanétairedisque protoplanétaire entourant le jeune SoleilSoleil peu éloigné de la Terre, si on la compare aux orbites des géantes gazeusesgéantes gazeuses, elle ne devrait pas avoir un contenu en éléments radioactifs très différent de notre Planète bleue.

    Restait la piste de différences dans la chaleur amenée par la conversion de l'énergieénergie gravitationnelle et cinétique des corps célestes entrés en collision avec Vénus lors de son processus de formation par accrétion.   

    Des collisions énergétiques qui ont « surchargé » le stock de chaleur de Vénus

    C'est précisément la piste explorée par les chercheurs qui ont modélisé ces impacts, comme l'explique le communiqué du Southwest Research Institute. Les planétologues pensent avoir montré que Vénus a probablement subi des impacts à plus grande vitessevitesse et à plus haute énergie que dans le cas de la Terre, produisant un noyau surchauffé qui a favorisé un volcanisme prolongé et capable de refaire récemment, à l'échelle du temps du Système solaire, la surface de Vénus.

    Pour être précis, le communiqué ajoute : « les légères différences dans les distances des planètes par rapport au Soleil ont modifié leurs histoires d'impact, en particulier le nombre et l'issue de ces événements. Ces différences surviennent parce que Vénus est plus proche du Soleil et se déplace plus rapidement autour de lui, ce qui dynamise les conditions d'impact » et indique qu'une partie de la distribution des caractéristiques orbitalesorbitales des corps célestes entrés en collision avec Vénus, lors de sa formation et peu de temps après, est « dominée par des impacteursimpacteurs provenant d'au-delà de l'orbite terrestre qui nécessitent des excentricitésexcentricités orbitales plus élevées pour entrer en collision avec Vénus plutôt qu'avec la Terre, ce qui entraîne des impacts plus puissants ».

    Toujours dans le communiqué, Raluca Rufu, une astrophysicienne en postdoctorat au SwRi et qui s'était déjà fait un nom en travaillant sur la théorie de l’origine de la Lune avec une collision géante, avec sa collègue Robin M. Canup, explique, quant à elle, que  « des vitesses d'impact plus élevées font fondre plus de silicatesilicate, fondant jusqu'à 82 % du manteaumanteau de Vénus. Cela produit un manteau mixte de matériaux fondus redistribués globalement et un noyau surchauffé ».

    Les simulations numériquessimulations numériques des collisions qui ont dû se produire avec Vénus et la modélisationmodélisation des conditions physique et chimique de l'intérieur de la planète en réponse à ces collisions, plus énergétiques qu'on ne le pensait avant, semblent bel et bien reproduire quantitativement et pas seulement qualitativement le volcanisme révélé par les sondes Magellan.

    On en saura sans doute bien plus à ce sujet avec les missions à destination de Vénus en préparation.


    Une présentation d'une des prochaines missions à destination de Vénus. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa's Goddard Space Flight Center