Une équipe internationale d’astronomes vient de découvrir ce qui semble être une nouvelle étape possible dans l’évolution stellaire : des naines blanches avec une atmosphère de carbone pur. Elles ont été trouvées à l’aide du fameux Sloan Digital Sky Survey (SDSS).

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    Vue d'artiste de la surface de l'étoile H1504+65, qui se serait débarassé de son enveloppe d'hydrogène et d'hélium, laissant un noyau stellaire essentiellement nu. Crédit : obspm-M.S. Sliwinski and L. I. Slivinska

    Vue d'artiste de la surface de l'étoile H1504+65, qui se serait débarassé de son enveloppe d'hydrogène et d'hélium, laissant un noyau stellaire essentiellement nu. Crédit : obspm-M.S. Sliwinski and L. I. Slivinska

    Depuis les travaux d'Eddington, Chandrasekhar, Hoyle, Fowler, Martin Schwarzschild et Chushiro Hayashi, on pensait bien connaître la structure des étoiles et leur évolution stellaire basée sur un ensemble de réactions thermonucléaires. Il semblerait, une fois de plus, que la Nature ait plus d'un tour dans son sac... Faut-il encore s'en étonner ?

    Normalement, une étoile de moins de 15 masses solaires finit par brûler l'hélium qu'elle a synthétisé à partir de l'hydrogène dans son cœur, pour ne plus laisser que des "cendres" de carbone et oxygèneoxygène. Une fois  son combustiblecombustible nucléaire épuisé, et si elle a éjecté suffisamment de masse pour passer en dessous de la limite de Chandrasekharlimite de Chandrasekhar, elle se transforme en naine blanchenaine blanche, un astreastre extrêmement dense de la taille de la Terre environ. C'est, d'après les observations et la théorie, le destin de 3 à 4 % des étoiles.

    Toujours d'après la théorie et les observations réalisées jusqu'à aujourd'hui, les naines blanches possèdent un noyau de carbone et d'oxygène surmonté d'une couche d'hydrogène ou l'hélium. Lorsque la masse dépasse les 15 masses solaires environ, son destin est celui de devenir une supernova d'abord et une étoile à neutronsétoile à neutrons ou un trou noirtrou noir ensuite.

    Entre quelques masses solaires et une dizaine de masses solaires, la situation est moins nette car tout va dépendre de la quantité de matièrematière éjectée par l'étoile en fin de vie en raison de certaines instabilités. On pense toutefois que jusqu'à 8 masses solaires, c'est bien sous forme de naine blanche que l'étoile finira sa vie. Les grandes lignes de cette évolution stellaire sont décrites par le schéma ci-dessous. 

    Les deux grands types d'évolutions stellaires en fonction de la masse des étoiles. Crédit : Lesia

    Les deux grands types d'évolutions stellaires en fonction de la masse des étoiles. Crédit : Lesia

    Or, en étudiant le catalogue des données spectroscopiques d'environ 10.000 naines blanches récemment détectées par la campagne d'observation du Sloan Digital Sky Survey, les chercheurs ont d'abord trouvé des étoiles connues sous le nom de naines blanches DQ. Il s'agit d'étoiles avec une atmosphèreatmosphère d'hélium mais avec des traces de carbone. On pense que des mouvements convectifsmouvements convectifs dans la couche d'hélium, au dessus du cœur riche en carbone et oxygène, ont amené en surface le carbone observé.

    Patrick Dufour avait conçu un programme de simulation numériquesimulation numérique pour reproduire la signature spectrale de ce type d'atmosphère pour ces étoiles. Tout allait bien pour des étoiles dont la température de surface était comprise entre 5.000 et 12.000 K environ.

    Des étoiles au spectre énigmatique.

    Toutefois, lorsque, parmi ces nouvelles étoiles DQ, il a voulu analyser des atmosphères de températures plus élevées, jusqu'à 24.000 K, les choses ont commencé à se gâter.

    Son modèle numériquemodèle numérique qui marchait jusque-là plutôt bien était fortement mis en échec. Même en augmentant la proportion de carbone dans l'atmosphère, le désaccord obtenu était toujours important. En désespoir de cause et en contradiction avec toutes les prévisions théoriques, il se résigna à considérer un modèle avec une atmosphère de carbone pur.

    C'était la solution de l'énigme et, à sa grande surprise, les observations se mirent à coller à nouveau parfaitement avec son modèle !

    Avec James Liebert, Natalie Behara et G Fontaine, Patrick Dufour a identifié huit naines blanches dominées par une atmosphère de carbone parmi environ 200 étoiles DQ du SDSS.

    Un nouveau type d'évolution stellaire ?

    Pour le moment, il n'y a pas vraiment d'explication pour ce type de naines blanches, même si l'on peut émettre quelques hypothèses. Leur température est trop chaude pour que des mouvements convectifs soient à l'origine d'un très fort enrichissement de l'atmosphère jusqu'à ce qu'elles apparaissent comme constituées de carbone. Il se pourrait que ces étoiles aient suivi une évolution similaire à celle de HEAO A-2 1504+65. Il s'agit d'une étoile très massive dont la température de surface est de 200.000 K et ayant perdu toutes ses couches supérieures pour laisser à découvert son cœur de carbone et d'oxygène.