C'est sur une population de neurones bien ciblée que des scientifiques se sont intéressés, cherchant un lien avec le Covid-19 long et les déficiences cognitives de longue durée, telles que la perte de mémoire ou de la concentration. Chez les hommes, les patients atteints de cette infection, lorsqu'elle touche le cerveau, présentaient des dosages hormonaux anormaux, soit une baisse du taux de testostérone. En conséquence de cette petite étude, les chercheurs s'interrogent sur ce déficit hormonal qui pourrait être la cause de cette affection de longue durée.

 


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    Les conséquences sur le cerveau d'une infection par le SARS-CoV-2, responsable de la Covid-19 sont de plus en plus documentées par la littérature scientifique. Des chercheurs et chercheuses de l'Inserm, du CHU de Lille et de l'Université de Lille, au sein du laboratoire Lille neuroscience et cognition, en collaboration avec leurs collègues de l'Imperial College London, se sont intéressés plus spécifiquement aux conséquences de cette infection sur une population précise de neurones connue pour réguler la reproduction sexuelle via l'hypothalamushypothalamus (les neurones exprimant l'hormonehormone GnRH). Leurs résultats, suggèrent que l'infection peut entraîner la mort de ces neurones et être à l'origine de certains symptômessymptômes qui persistent dans le temps. Les résultats de cette étude sont publiés dans la revue eBioMedicine.

    De nombreuses études scientifiques ont documenté les conséquences sur le cerveau d'une infection au SARS-CoV-2. Parmi les effets qui ont été identifiés, une proportion significative d'hommes présente des taux de testostéronetestostérone faibles qui persistent dans le temps. Au-delà de quatre semaines, on peut parler alors de « Covid long ».

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    Une équipe de recherche de l'Inserm, du CHU et de l'Université de Lille, étudie depuis de nombreuses années le rôle de certains neurones exprimant une hormone appelée GnRH (Gonadotropin-Releasing HormoneGonadotropin-Releasing Hormone). Ces neurones contrôlent depuis l'hypothalamus tous les processus associés aux fonctions reproductrices : la pubertépuberté, l'acquisition des caractères sexuels secondaires et la fertilité à l'âge adulte.

    Image illustrant l’infection par le SRAS-CoV2 (immunoréactivité pour la protéine S en blanc) dans les neurones olfactifs exprimant la protéine marqueur olfactive (OMP, en rouge) dans l’épithélium nasal humain. © Vincent Prévot, Inserm
    Image illustrant l’infection par le SRAS-CoV2 (immunoréactivité pour la protéine S en blanc) dans les neurones olfactifs exprimant la protéine marqueur olfactive (OMP, en rouge) dans l’épithélium nasal humain. © Vincent Prévot, Inserm

    Ces mêmes scientifiques avaient par exemple précédemment identifié qu'un dysfonctionnement des neurones à GnRH dans un modèle animal de la trisomie 21trisomie 21, pouvait avoir des conséquences sur l'altération des fonctions cognitives associées à cette maladie. Dans une nouvelle étude, ils ont voulu tester l'hypothèse selon laquelle une infection par le SARS-CoV-2 peut avoir des conséquences délétères sur cette population de neurones régulateurs de la reproduction.

    Le virus pénètre les neurones à GnRH et altère leurs fonctions

    En s'appuyant sur les dosagesdosages hormonaux (testostérone et LHLH) réalisés trois mois et un an après l'infection chez un petit groupe de 47 hommes, les scientifiques ont constaté que le contact avec le virusvirus pouvait altérer les fonctions des neurones à GnRH, entraînant une chute du taux de testostérone chez certains patients quelques temps après l'épisode infectieux.

    Les scientifiques ont ensuite voulu vérifier si l'infection des neurones à GnRH et les anomaliesanomalies hormonales observées après l'infection pouvaient être associées à des déficits cognitifs. Ils ont pour cela répertorié les symptômes cognitifs rapportés par les patients de la cohortecohorte, qui ont subi des tests approfondis à 3 mois, puis 1 an après l’infection.

    Résultats : la proportion de patients signalant des troubles de la mémoire ou de l'attention, quelle que soit leur fréquence ou leur gravitégravité, mais aussi des difficultés de concentration, avait tendance à être légèrement plus élevée chez les patients qui présentaient des dosages hormonaux anormaux, caractérisés par une baisse du taux de testostérone.

    « Bien qu'il s'agisse de mesures effectuées sur un petit échantillon de patients et uniquement masculins, ces résultats sont très intéressants et mériteraient d'être approfondis dans le cadre d'autres études menées à plus grande échelle », explique Waljit Dhillo, professeur à l'Imperial College London, dernier coauteur de cette étude.

    Pour compléter leurs analyses, les chercheurs ont enfin étudié le cortexcortex de patients décédés des suites de la Covid-19. Ils ont identifié la présence du virus au niveau de l’hypothalamus et ont constaté la mort d'une partie de la population de neurones à GnRH.

    « Ces résultats peuvent être inquiétants sur plusieurs points au regard du rôle de ces neurones dans la reproduction et de leur implication dans certaines fonctions cognitives. Ils pointent la nécessité d'optimiser et de généraliser le suivi médical des personnes atteintes de symptômes persistants suite à une infection par la Covid-19 », conclut Vincent Prévot, directeur de recherche à l'Inserm, co-dernier auteur de cette étude. L'étude incite aussi à poursuivre les travaux sur les conséquences neurologiques du Covid long.