L'augmentation probable du trafic maritime associée à l'augmentation des températures et à l'acidification des océans va produire un véritable vacarme sous-marin, prédisent les chercheurs. Une perspective inquiétante pour la survie de l'écosystème marin, complètement dépendant de la communication sonore.


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    Les émissions de gaz à effet de serre vont-elles finir par assourdir la vie marine ? D'après une étude publiée dans la revue PeerJ, il semble que oui. En cause : la modification des températures et du taux d'acidité des océans qui influence la plus ou moins bonne circulation du son dans l'eau. La conjoncture actuelle - une acidification des océans associée à un réchauffement des eaux - favorise la propagation du son, et devrait donc conduire à une forte augmentation de l'intensité sonore de certaines zones, notamment en Atlantique Nord où l'augmentation attendue devrait être de 7 décibelsdécibels. Cela semble peu... sauf que l'échelle des décibels (dB) est presque exponentielle : à l'airair libre, un son de 10 dB est 10 fois plus intense que 0 dB, et un son de 30 dB l'est 1 000 fois plus ! Sous l'eau, une augmentation de 7 dB correspond à une multiplication par 5 du bruit actuel, en grande partie généré par le trafic maritime incessant et les canons à air utilisés pour les études sismiques. 

    La vie marine dépendante de la communication sonore

    « Cela perturbera le comportement de nombreuses espèces de poissons et de mammifères marins », déplore Luca Possenti, océanographe au Nioz (l'Institut royal néerlandais de recherche maritime) et principal auteur de l'article. Et pour cause : ceux-ci communiquent essentiellement par le son, faute d'une bonne visibilité sous l'eau. Prenez les cétacés, capables de communiquer à plus de 2 000 kilomètres de distance, les larves de moules, attirées par les bruits produits par leurs congénères dans des lieux propices à leur développement, ou même les vibrationsvibrations de carapace produites par les homards lorsqu'ils sont face à des rivaux ! Tous les habitants marins sont dépendants de leur capacité à entendre et à produire du son. 

    Orques, dauphins, baleines... utilisent les sons pour communiquer, se repérer et chasser. © Rolling Stones, Adobe Stock
    Orques, dauphins, baleines... utilisent les sons pour communiquer, se repérer et chasser. © Rolling Stones, Adobe Stock

    Un modèle basé sur les rapports du Giec

    Pour arriver à de tels résultats, les scientifiques de l'université d'Utrecht et de la Dutch Organization for Applied Scientific Research ont conçu un modèle mathématique en se basant sur les scénarios modéré et extrême établis par le Giec, sans pour autant s'écarter du terrain. Afin de mieux comprendre ces mécanismes, les équipes travaillent, en effet, à reproduire les sons générés par les animaux marins, notamment en brisant des sphères de verre. « On ignore encore beaucoup de choses sur les effets exacts des conditions sous-marines sur la vitesse du sonvitesse du son, précise Luca Possenti. Mais en raison des effets potentiellement profonds sur l'écosystème, ces connaissances sont essentielles si nous voulons comprendre les effets du changement climatiquechangement climatique sur la vie marine. »