Les Alpes sont nées de la collision entre deux plaques tectoniques. L’intense déformation que l’on observe dans ce paysage montagneux en témoigne. Pourtant, on comprend encore mal comment cette déformation est liée à ce qui se passe en profondeur. Une étude récente, basée sur l’interprétation d’une « échographie » sismique des Alpes, apporte de nouvelles réponses.
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C'est bien connu, les Alpes sont une chaîne de collision, qui résulte de la rencontre entre deux plaques tectoniques : l'Eurasie et l'Adriatique (associée fréquemment à l'Afrique). Ce contexte tectonique a depuis longtemps été mis en évidence par toute une série d'observations. Les premières sont celles liées à la présence d'une subduction sous les Alpes. On retrouve en effet dans la chaîne de montagnes des roches volcaniques et métamorphiques typiques, qui indiquent que dans le manteaumanteau, l'une des deux plaques plonge sous l'autre. Mais les indices majeurs, qui sautent immédiatement aux yeuxyeux, ce sont les nombreuses structures de déformation que l'on observe un peu partout dans le paysage : plis, failles et chevauchements, qui affectent notamment des unités sédimentaires qui se sont précédemment formées au fond des océans. Les données GPSGPS modernes rendent de plus aujourd'hui clairement compte de cette collision et du soulèvement des Alpes, qui est toujours d'actualité.
Le défi d’imager l’intérieur des Alpes
Mais que se passe-t-il exactement en profondeur ? Comment cette rencontre titanesque entre deux plaques tectoniques est-elle accommodée dans la croûtecroûte et dans le manteau ? Pour répondre à cette question, plusieurs instituts de recherche français lancent à la fin des années 1980 une grande campagne d'imagerie sismique visant à obtenir une coupe en profondeur de la structure des Alpes. C'est le programme Ecors-Crop. Les données permettent d'observer l'approfondissement du MohoMoho sous la chaîne, l'architecture des grandes failles et le fait que c'est bien la plaque européenne qui est poussée sous la plaque adriatique. La qualité des données laisse cependant beaucoup de marges d'interprétation.
Un gigantesque poinçon tectonique
Une récente campagne de tomographie sismique (programme AlpArray) a cependant permis d'imager les structures profondes des Alpes avec plus de précision. Ces données présentent un modèle de vitessevitesse des ondes sismiquesondes sismiques sous la partie ouest de la chaîne, qui permettent notamment d'imager la profondeur du Moho en 3D. Pour rappel, le Moho marque l’interface entre la base de la croûte et le toit du manteau. Il est particulièrement visible sur les données de tomographie sismique car cette transition s'accompagne d'un important saut de vitesse des ondes sismiques.
L'interprétation de ces données, publiée dans la revue Communications earth and environment, montre clairement la présence du slabslab européen (la partie de la croûte s'enfonçant dans le manteau). Il apparaît que ce slab est surmonté par une portion de manteau adriatique froid et rigide, situé à une vingtaine de kilomètres de profondeur sous la plaine du Pô, dans la région de Turin (Italie). Poussé par la compression tectonique contre le slab européen qui, de fait, se verticalise, ce corps mantellique agit comme un gigantesque poinçonpoinçon, dont le moteur est la rotation dans le sens anti-horaire de la plaque adriatique. La comparaison avec la carte des déformations tectoniques en surface et des épicentresépicentres des séismesséismes révèle d'ailleurs que ce poinçon contrôle nettement la déformation de la plaque européenne contre laquelle il est appliqué.
Cette étude montre que la déformation que l'on observe dans les Alpes n'est pas uniquement liée à des processus superficiels en lien avec la compression des unités sédimentaires, mais aussi à l'architecture profonde de la chaîne.