De nouvelles mesures de conductivité thermiques suggèrent que la Terre se refroidirait plus rapidement que ce que l’on croyait jusqu’à présent, laissant penser que l’activité tectonique de notre Planète pourrait s’arrêter plus rapidement que prévu.
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Depuis sa formation il y a 4,5 milliards d'années, la Terre ne cesse de dégager de la chaleur, et donc de se refroidir. Cette chaleurchaleur provient majoritairement de la désintégration radioactive des composants des différentes enveloppes terrestres. Trois autres sources d’énergie peuvent également être citées : la cristallisation progressive du noyau externe, les mouvementsmouvements gravitationnels des minérauxminéraux cristallisant à l'intérieur du noyau liquideliquide, et l'énergieénergie des marées internes à la Terre. L'ensemble produit un important flux de chaleur qui est essentiel à la génération de la convectionconvection mantellique, qui sous-tend l’activité tectonique et volcanique de notre Planète. On peut dire que c'est ce flux de chaleur qui fait que la Terre est géologiquement vivante. Cependant, ce flux de chaleur ne sera pas éternel.
En se refroidissant, la Terre épuise petit à petit son stock de chaleur interne. Viendra le jour (très lointain cependant) ou le flux de chaleur ne sera plus suffisant pour supporter la convection mantellique. Il est fort à penser qu'à ce moment-là, la Terre deviendra une planète « morte », et que la tectonique des plaques cessera. Si cette évolution à très long terme ne fait pas de doute, elle reste cependant difficile à quantifier. Car on ne sait actuellement pas exactement à quelle vitessevitesse la Terre se refroidit, ni combien de temps cela lui prendra pour épuiser ses réserves.
La bridgmanite, un minéral plus conducteur qu’on ne le pensait
Pour répondre à ces questions, il est nécessaire de comprendre comment la chaleur se transmet à l'intérieur de la Terre, jusqu'à la surface où elle est évacuée par l'activité volcanique, entre autres. L'une des zones clés semble être l'interface entre le noyau externe et le manteaumanteau. En effet, c'est à ce niveau que la bouillie cristalline liquide du noyau externe, composée d'un mélange de ferfer et de nickelnickel, est en contact direct avec les roches du manteau. Le gradientgradient thermique entre ces deux niveaux est très élevé et le flux de chaleur très important. À cette interface, le manteau est principalement composé d’un minéral nommé bridgmanite. Connaître la capacité de ce minéral à conduire la chaleur permettrait donc de mieux appréhender la vitesse de refroidissement de la Terre. Une équipe de chercheurs de l'ETH Zürich et de la Carnegie Institution de Washington ont ainsi reproduit en laboratoire les conditions régnant au niveau de l'interface noyau/manteau, afin de mesurer la conductivité thermiqueconductivité thermique radiative des bridgmanites au niveau de la base du manteau inférieur.
Les résultats montrent que la conductivité thermique moyenne à l'interface noyau/manteau serait 1,5 fois plus importante que ce que l'on estimait jusqu'à présent. Cette nouvelle valeur suggère que le flux de chaleur provenant du noyau pourrait être plus important que ce que l'on pensait. La réévaluation du flux de chaleur a deux conséquences. Premièrement, la convection mantellique générée doit être plus forte que ce que l'on supposait. Il en résulte que le manteau se refroidit plus efficacement, et donc plus rapidement que ce que prévoyaient les précédents modèles.
Vers une accélération du refroidissement de la Terre
Ces nouvelles données pourraient avoir des conséquences sur la duréedurée de vie de certaines activités tectoniques entraînées par la convection mantellique. Un refroidissement plus rapide du manteau pourrait notamment entraîner des modifications des phases minérales à l'interface noyau/manteau. En effet, lorsque la bridgmanite se refroidit, elle se transforme en un nouveau minéral, la post-pérovskite. Or, ce minéral conduit encore plus efficacement la chaleur que la bridgmanite. Ainsi, plus la Terre refroidit, plus la post-pérovskite va devenir le minéral dominant à la base du manteau, accélérant le transfert de chaleur vers la surface et donc accélérant le refroidissement.
Les résultats de l'étude publiée dans Earth and PLanetary Science Letters ouvrent donc de nouvelles perspectives sur l'évolution de la dynamique terrestre. À l'image de Mars et de MercureMercure, la Terre pourrait ainsi devenir inactive bien plus rapidement qu'on ne le pensait. Mais que l'on se rassure, si nous n'avons encore aucune idée du temps que cela prendra, la tectonique des plaques a encore une belle vie devant elle.