Le café aurait un effet sur la mémoire des bourdons, les poussant dans les pétales d'une fleur plutôt que d'une autre. Ce qui pourrait servir aux producteurs de fraises !


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    Certains nectars de fleurs sont naturellement enrichis de caféinecaféine. Une substance dont semble raffoler une partie, au moins, des insectes pollinisateurs. « Nous voulions voir si fournir de la caféine aiderait [le cerveaucerveau des bourdons] à créer une association positive entre telle odeur de fleur et une récompense en sucresucre », raconte Sarah Arnold, chercheuse au Natural Ressources Institute de l'université de Greenwich (Royaume-Uni), et coautrice de l'étude sur le sujet dans Current Biology

    Leurs résultats vont effectivement dans ce sens : les bourdons nourris avec un aliment contenant de la caféine et une odeur de fraise visitent davantage les fleurs - ici, des fleurs robotisées - émettant l'odeur en question. Pour tirer cette conclusion, les scientifiques ont entraîné 86 bourdons, divisé en trois groupes. Le premier recevait l'aliment caféiné. Le second n'avait que l'odeur de fraise avec un peu de sucre. Le dernier n'était ravitaillé qu'en sucre inodore.

    Les bourdons « doivent s'appuyer sur de nombreux indices, comme les odeurs, pour trouver de bonnes fleurs », rappelle Sarah Arnold. D'autant qu'ils n'ont pas une vision particulièrement nette à longue portée. En l'occurrence, plus de 70 % des bourdons stimulés à la caféine ont d'abord butiné les fleurs sentant la fraise, tandis que 60 % des bourdons ayant reçu l'odeur mais pas la caféine les ont visité d'abord. Chez le groupe n'ayant goûté que du sucre inodore, ce chiffre tombe à moins de 50 %.

    Le bourdon est un insecte pollinisateur, qui s'abreuve de nectar et nourrit ses larves avec du pollen. © Jolanta Mayerberg, Adobe Stock
    Le bourdon est un insecte pollinisateur, qui s'abreuve de nectar et nourrit ses larves avec du pollen. © Jolanta Mayerberg, Adobe Stock

    Un intérêt agricole

    Si la caféine semble bien améliorer la capacité des bourdons à reconnaître une fleur à partir de son odeur, cet effet serait temporaire. Lorsque les bourdons récoltaient le nectar de la « bonne fleur », ils n'étaient pas récompensés avec de la caféine - pour s'assurer qu'ils ne soient pas seulement intéressés par cette substance. Rapidement, ces insectes ont butiné presque aussi souvent les fleurs sans odeur de fraise que les autres. « À certains égards, ils désapprenaient aussi vite qu'ils apprenaient », souligne Sarah Arnold.

    L'engouement de ces scientifiques n'est pas uniquement théorique, car ce sujet concerne la pollinisation de précision. Sarah Arnold pense en particulier aux producteurs de fraises, qui achètent des bourdons pour butiner leurs plantes. Inévitablement, une partie d'entre eux s'égare vers les fleurs voisines. Avec cette technique caféinée, il serait possible d'apprendre aux bourdons à s'orienter uniquement vers les fraises. Et la chercheuse de conclure : « On laisserait les fleurs sauvages aux abeilles sauvages, et les producteurs rentabiliseraient plus leur investissement, c'est gagnant-gagnant. »