Plus de 35 ans après la catastrophe de Tchernobyl, on ne connaît toujours pas toutes les conséquences à long terme sur le vivant. C'est ce sur quoi s'est penchée une équipe de chercheurs : en analysant le génome de 302 chiens vivant près du site de la centrale de Tchernobyl, ils ont constaté des différences notables avec d'autres chiens à travers le monde.


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    Le 26 avril 1986, le réacteur 4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl s'emballait lors d'un essai d'îlotage, provoquant son explosion et l'une des pires catastrophes nucléaires de l'histoire. Immédiatement après l'accidentaccident et pendant plusieurs jours, des grandes quantités de radioéléments volatils ont été libérées, et se sont déplacées à travers l'Europe, la Russie, et jusqu'en Amérique du Nord.

    Peu de temps après la catastrophe, les populations habitant près de la centrale ont été évacuées, laissant une grande quantité de leurs biens sur place, faute de temps. Y compris, parfois, leurs compagnons domestiques. C'est ce qu'explique une étude publiée dans Science Advancesqui s'est penchée sur des chiens habitant aux alentours de Tchernobyl depuis plus de 30 ans. Le but des chercheurs était d'évaluer les variations génétiquesgénétiques dues à une exposition prolongée et multigénérationnelle aux radiations.

    L'étude évoque notamment deux isotopesisotopes radioactifs connus pour avoir des conséquences directes sur la santé, le césiumcésium 137 et l'iodeiode 131. Mais si l'on connaît les conséquences sur de nombreux organismes vivants, « aucune étude génétique des populations d'organismes de Tchernobyl n'a inclus de mammifères de grande taille, tels que les canidés. »

    Après la catastrophe de Tchernobyl en 1986, les chiens vivant à proximité du site ont été modifiés génétiquement. © Fotokon, Adobe Stock
    Après la catastrophe de Tchernobyl en 1986, les chiens vivant à proximité du site ont été modifiés génétiquement. © Fotokon, Adobe Stock

    302 chiens évalués, jusqu'à 45 km de distance avec le site de Tchernobyl

    Pour ses recherches, l'équipe a ciblé la zone d'exclusion de Tchernobyl qui entoure la centrale dans un rayon de 30 kilomètres et couvre une surface totale de 2 600 km². Les auteurs expliquent qu'une procédure d'abattage des animaux abandonnés a été lancée peu après l'accident par le ministère ukrainien pour empêcher la propagation de contaminationcontamination radioactive, mais une partie d'entre eux aurait pu échapper aux chasseurs. Ensuite, des équipes de déminage, ou plus tard des touristes, les ont soignés.

    Ainsi, en 2017, plus de 800 chiens sauvages étaient recensés sur le site de la centrale ou à proximité. À ce moment-là, trois cliniques offrant des soins vétérinairesvétérinaires aux chiens ont ouvert à des emplacements stratégiques pour démarrer un échantillonnageéchantillonnage. Une directement sur le site de la centrale, une dans la ville de Tchernobyl située à 15 kilomètres, et une dans la ville de Slavutych, à 45 kilomètres de la centrale. Des prélèvements sanguins ont pu être effectués sur 302 chiens, dont 132 à l'intérieur de la centrale, 154 dans un rayon de 15 kilomètres, et 16 entre 15 et 45 kilomètres.

    Ici, un chien sauvage dans la zone d'exclusion de Tchernobyl. © Beata, Adobe Stock
    Ici, un chien sauvage dans la zone d'exclusion de Tchernobyl. © Beata, Adobe Stock

    15 structures familiales complexes uniques à la population de Tchernobyl

    De nombreuses analyses ont ensuite été effectuées par les chercheurs, qui ont comparé les profils génomiquesgénomiques avec ceux de 1 324 chiens à travers le monde, couvrant 162 races différentes et principalement d'origine européenne occidentale.

    Ils ont en particulier cherché à « mesurer l'accumulation de la variation génétique en présence d'une contamination radioactive continue ». Ils ont ainsi comparé les haplotypeshaplotypes (ensemble de gènesgènes situés côte à côte dans un chromosomechromosome) provenant des chiens de Tchernobyl et ceux des chiens témoins. 

    Un processus difficile, puisqu'il nécessite d'éliminer tous les autres facteurs d'influence, pour s'assurer que la cause d'une signature mutationnelle est bien d'origine radioactive. En effet, « il est formellement possible que certaines des premières cicatricescicatrices génétiques présentes chez les chiens vivant dans la région immédiatement après l'explosion qui ont été perdues dans les populations modernes soient maintenant remplacées par de grandes signatures d'ascendance de race pure », explique l'étude. 

    Les chiens analysés à Tchernobyl ont des différences génétiques marquées par rapport à d'autres chiens dans le monde. © Sergiy, Adobe Stock
    Les chiens analysés à Tchernobyl ont des différences génétiques marquées par rapport à d'autres chiens dans le monde. © Sergiy, Adobe Stock

    Malgré cela, les chercheurs ont noté 15 structures familiales complexes uniques à la population de Tchernobyl, même en les comparant avec des chiens d'Europe de l'Est qui partagent un grand nombre de caractéristiques communes. « La différenciation génétique par rapport aux autres chiens de race pure et en liberté suggère que les populations de Tchernobyl ont une signature génomique unique », détaillent les chercheurs.

    Ils ont aussi noté un fort mélange génétique, indiquant que les trois populations de chiens se sont reproduites entre elles. Compliquant d'autant plus l'attribution de changements à une contamination radioactive ! « L'analyse de la parenté montre que les relations génétiques entre les chiens reproducteurs libres à Tchernobyl sont complexes, avec de nombreux cas de reproduction sur plusieurs générations, ce qui rend difficile de déduire la parenté au-delà du premier degré », concluent les chercheurs.