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L'exploitation du Cruiser OSR, un pesticide utilisé dans l’enrobage des semis de colza, a été interdite en France le 29 juin 2012. Son effet néfaste potentiel sur les populations d'abeilles a été reconnu par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) dans un rapport publié le 31 mai 2012. © Autan, Flickr, cc by nc nd 2.0
L'Autorité européenne de sécurité des alimentsAutorité européenne de sécurité des aliments (Efsa)) doit s'assurer de la qualité des denrées alimentaires vendues dans l'Union européenne. Elle remplit en plus une autre fonction tout aussi importante depuis quelques années : assurer la protection et la survie des abeilles. Le lien entre ces deux missions n'est pas évident de prime abord, mais il le devient lorsqu'on sait que 80 % des espèces de plantes exploitées commercialement dans le monde ont besoin de pollinisateurs pour se reproduire. Le problème intervient à ce niveau, puisque les populations d'abeilles s'effondrent.
Ce syndromesyndrome mondial pourrait avoir plusieurs origines, mais l'une d'entre elles revient souvent sur le devant de la scène depuis quelques mois : l'utilisation des pesticides de la famille des néonicotinoïdes. Ces substances affectent le système nerveux des insectes, au point de les paralyser puis de causer leur mort. Dernièrement, des études ont montré que des expositions à des doses non létales (ou sublétales) impactaient également la santé des abeilles et de leurs colonies, notamment car de nombreux insectes exposés partant en exploration sont incapables de revenir à leur point de départpoint de départ.
Trois substances principales sont utilisées en agriculture sous forme de granules ou en enrobage des semences : la clothianidine, l'imidaclopride et le thiaméthoxame. Devant cette situation, la Commission européenne a demandé une évaluation des risques associés à l'exploitation de ces produits aux scientifiques de l'Efsa, notamment pour savoir s'ils impactent les colonies, les larves ou encore le comportement des adultes. Les effets des expositions sublétales ont également été étudiés. Selon les conclusions de ce travail, les néonicotinoïdes présenteraient officiellement des risques élevés pour les abeilles sous certaines conditions.
Rayons de cire d'abeilles domestiques portant des œufs et des larves. Les parois des cellules ont été enlevées. Les larves (des faux-bourdons) sont âgées de 3 à 4 jours. Chez le bourdon terrestre, une exposition à l'imidaclopride provoque une diminution du nombre de larves en cours de croissance. Beaucoup de cellules restent vides. © Waugsberg, GNU 1.2
Chaque voie d’exposition aux néonicotinoïdes est à risque
Les scientifiques de l’Efsa n'ont pas réalisé de nouvelle étude. Leurs évaluations s'appuient sur l'analyse de données fournies par les industriels et des réseaux de surveillance, ainsi que sur les dernières informations publiées dans la littérature scientifique. Ces experts n'ont par ailleurs pas été en mesure de répondre à toutes les questions posées en raison du manque de données disponibles dans certains cas, les risques étant évalués pour trois voies d'exposition principales. Les abeilles peuvent en effet être contaminées en récoltant le nectar et le pollen des fleurs traitées, en étant exposées à la poussière émise durant les semis ou en consommant l'eau exsudée par les végétaux (c'est-à-dire par guttationguttation).
Les conclusions des évaluations se résument comme suit :
- au sujet de l'exposition au pollenpollen et au nectar, « des risques aigus ont été identifiés pour l'utilisation de la clothianidine et de l'imidaclopride sur certaines cultures qui attirent les abeilles. L'évaluation des risques pour le thiaméthoxame n'a pas pu être finalisée en raison de données insuffisantes », précise le communiqué ;
- dans le cas d'expositions à la poussière, « un risque pour les abeilles a été signalé ou n'a pas pu être exclu, avec certaines exceptions telles que l'utilisation sur les betteraves sucrières et les cultures sous serre, ainsi que l'utilisation de certains granules » ;
- seule l'évaluation des dangers liés à l'exploitation de maïsmaïs traité à la thiaméthoxame a été menée à terme pour le troisième vecteur d'exposition. Dans ce cas précis, « les études sur le terrain démontrent un effet aigu sur les abeilles exposées à la substance par la voie de la guttation ».
Cette première évaluation devra être complétée pour combler les lacunes mises en avant et surtout vérifier les risques encourus par d'autres pollinisateurs comme le bourdon. Il reste maintenant à savoir quels impacts vont avoir ces conclusions sur les autorités politiques nationales et européennes.