Des designers ont planché sur le thème de l’automobile telle qu’elle pourrait être dans cinquante ans. De la voiture fondante à celle qui avale la pollution, les perspectives envisagées ne manquent pas d’audace. And the winner is… une goutte d’eau ! Attention, ces projections un peu folles sont plus sérieuses qu’il n’y paraît…

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    En marge du salon de l'automobileautomobile de Los Angeles (le Los Angeles Auto Show), huit équipes de designers, qui travaillent habituellement pour des grandes marques d'automobiles, ont imaginé la voiture de 2057. C'est la quatrième année qu'est organisé le Design Challenge Robocar mais c'est la première fois que le thème impose de se projeter un demi-siècle dans le futur. Lors des précédentes éditions, les designers étaient restés plutôt sages. Pour le premier concours, deux concepts cars ont été déclarés « vainqueurs 2005 » (élus en fait en novembre 2004) : la Dodge Superbee (une sorte de buggy) et la Volkswagen MobileMobile Lounge (un monospace pour la famille). L'année suivante, le gagnant 2006 était un camping-car, le GMC Pad. L'année dernière, les jurés n'ont pas hésité à porter leur choix sur une version miniature et censément écologique du... Hummer, ce monstrueux 4x44x4 popularisé par la guerre du Golfe.

    Cette année, le vainqueur (présenté comme le « gagnant 2008 ») est la Volkswagen Splitstream. Ce curieux véhicule en forme de goutte d'eau roule sur deux roues (une de chaque côté). On ne nous dit pas comment elle tient en équilibre. Serait-ce à la manière du Segway, ce curieux engin de déplacement individuel ? Peu importe : l'exercice est réservé aux designers, pas aux ingénieurs. Ici, ce sont les principes qui comptent. Puisque les technologies de 2057 sont inconnues, autant laisser aller son imagination...

    Serrées les unes contre les autres en position verticale, des <em>Splistream</em> se déplacent au milieu de la ville… <br />© <em>Volkswagen/Audio Design Center Californie</em>

    Serrées les unes contre les autres en position verticale, des Splistream se déplacent au milieu de la ville…
    © Volkswagen/Audio Design Center Californie

    Le gagnant : une voiture à une place

    C'est pour répondre au problème de l'encombrement de la circulation que Volkswagen a imaginé cette voiture verticale dans laquelle on se tient pratiquement debout. Oui, mais alors pourquoi avoir imaginé un véhicule monoplace, comme on le voit sur les dessins ? Guidée par une multitude d'automatismes, dans la voiture et dans la route, la Splitstream roule redressée en ville, de sorte d'en tasser un grand nombre à la queue leu leu sur des pistes spéciales. Hors des agglomérations, ce véhicule peut emprunter des routes spéciales (que Volkswagen nomme déjà, justement, Splitstream). La voiture se couche à l'horizontale et accélère jusqu'à 400 kilomètres à l'heure...

    Chez Nissan, on imagine une voiture modulaire pouvant prendre quatre formes possibles, la 14, à prononcer One to the power of four. Sur la route, elle adopte une forme très allongée, plutôt proche de celle d'une Formule 1. Mais en ville, elle peut se recroqueviller ! Pliable également, la OnStar Ant, de General Motors, ressemble d'avantage à un origami, qui peut adopter de multiples configurations au gré des fantaisies et des besoins de ses passagers. Ne parlons pas du conducteur puisque cette voiture automatique n'en a plus besoin, tout comme la Nissan OneOne (à prononcer « wonwon »). Peut-être la plus réaliste des véhicules du challenge, cette voiture est plutôt un robot à roues complètement autonome, capable de faire les courses lui-même ou d'aller chercher les enfants à l'école.

    Ainsi fond fond fond la petite Mercedes…

    Il fallait bien des projets fous. L'équipe de Mazda s'y est attelée avec la Mori Motonari RX. Indescriptible, cette engin se moule autour du corps du conducteur et transmet directement à son système nerveux les informations des capteurscapteurs répartis sur la carrosserie. On peut ainsi littéralement sentir la route... Attention aux nids de poule ! Enfin, Mercedes a poussé le bouchon plus loin encore avec la SliverFlow, la première voiture qui se liquéfie pour occuper le moins de place possible dans le parking...

    La SilverFlow vient d’arriver à destination. Elle s’étale alors en une flaque, bien moins encombrante. Attention à ne pas se garer à proximité d’une bouche d’égout...<br />© <em>Mercedes-Benz Advanced Design of North America</em>

    La SilverFlow vient d’arriver à destination. Elle s’étale alors en une flaque, bien moins encombrante. Attention à ne pas se garer à proximité d’une bouche d’égout...
    © Mercedes-Benz Advanced Design of North America

    Bien sûr, pas la moindre ombre d'une solution technique n'est envisagée. Les designers ne nous parlent que pour rire de « particules micro-métalliques organisées par un champ magnétiquechamp magnétique », de « roues à nano-laserslasers » et de « tensiométrie programmable ». Une fois ces concepts imaginés, les ingénieurs n'ont plus qu'à les réaliser. Ils ont cinquante ans devant eux !

    En prenant ces études avec un peu de recul, on peut toutefois y repérer des tendances, finalement déjà inscrites dans les évolutions récentes : la robotisation de la conduite, la modularité des carrosseries et des aménagements intérieurs, la sécurité, le confort intérieur, la protection de l'environnement et l'allègement des structures. Toutes ces pistes sont déjà explorées depuis plusieurs années, comme en témoigne notre dossier sur la voiture du futur.

    L'électronique embarquée fait déjà partie de la voiture d'aujourd'hui et on sait qu'elle jouera un rôle plus important demain, comme l'expliquent dans ce dossier Brahim Chaib-Draa, professeur au département d'informatique et de génie logiciel de l'université Laval (Québec) et Francois Michaud, du département Génie électrique et Génie informatique de l'université de Sherbrooke. Selon eux, « d'un point de vue technologique, la voiture entièrement automatisée, qui conduit toute seule, est réaliste ».

    De même, le succès des véhicules hybrideshybrides, à moteurs électrique et thermique, témoigne d'une tendance lourde, qui génèrera bientôt une offre de modèles bien plus large qu'aujourd'hui. Ensuite, si l'on en juge par le nombre de recherches effectuées dans ce domaine, le relais pourrait être pris par l’utilisation de l’hydrogène, vecteur pour conserver l'énergieénergie utilisée dans un moteur électrique après conversion dans une pile à combustiblepile à combustible.

    Les études des ingénieurs et l'imagination débridée des designers pourront alors se rejoindre, au moins sur certains points !