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    L'Alsace a participé aux migrations celtiques vers le Midi qui se sont déroulées au début du Ve siècle et dont nous avons parlé (voir partie 1), ce qui expliquerait peut-être le relatif marasme démographique que l'on constate, si du moins on se fonde sur les découvertes archéologiques.

    La Tène Ancienne II & III (400-220 av. J.-C.)

    Dès le début du IVe siècle av. J.-C., une renaissance se produit, et l'étude plus précise de deux objets va nous le montrer.

    • Les colliers à disques

    Inventé à la fin du VIe siècle av. J.-C. ou au début du Ve siècle par les Celtes de la région de Weitbruch, près de Haguenau, le collier à disques a été transporté vers la Suisse à la faveur de la migration de ces peuples vers le midi.

    Collier à disques (début III<sup>e</sup> siècle av. J.-C.). © André Beauquel - Tous droits réservés, reproduction interdite 
    Collier à disques (début IIIe siècle av. J.-C.). © André Beauquel - Tous droits réservés, reproduction interdite 
    • Origine : Alsace
    • Date : début IIIe s. av. J.-C.
    • Diamètre : 16 cm environ

    Le collier à disques a évolué entre le Ve et le IIIe s. av. J.-C., passant d'un décor à 1 disque à un décor à 7 disques et on en connaît 18 en provenance de sa région d'origine, l'Alsace. Il est formé d'une tige de bronze ornée de trois renflements décorés de motifs en S. Une partie mobilemobile, comportant généralement trois disques séparés par des renflements ornés de motifs en S, s'emboîte dans la tige par l'intermédiaire d'une pointe. Chacun de ces trois disques est revêtu d'un cabochon d'émailémail rouge sang, de corailcorail ou d'ambre. Les Vosges marquent la limite occidentale de leur aire de répartitionaire de répartition. Au nord, l'exemplaire le plus éloigné du centre de fabrication se trouve au confluent du Rhin et de la Moselle. Au sud, ces colliers ne dépassent pas le St.-Gothard. En revanche, ils sont beaucoup plus répandus à l'est et atteignent la Pologne et la Roumanie.

    Il s'agit d'un collier à fermeture assurée par une pièce mobile. Le corps du collier est décoré de trois renflements ornés de motifs en S qui séparent des disques revêtus d'un cabochon d'émail rouge sang. Le modèle le plus tardif comporte sept disques, mais le plus ancien, mis au jour à Weitbruch dans un contexte hallstattien n'en a qu'un : ce serait le prototype et on constate aisément que d'Alsace il a été exporté en Suisse et surtout vers l'est, jusqu'en Roumanie et en Pologne.

    • Les colliers à masques

    Probablement originaire d'Étrurie où il aurait été introduit par des influences orientales, le collier à masques est porté par les populations situées au nord-ouest de Weibruch, alors que le collier à disques n'existe qu'au sud et à l'est.

    Collier à masques (forêt de Haguenau, début IV<sup>e</sup> siècle av. J.-C.). © André Beauquel - Tous droits réservés, reproduction interdite
    Collier à masques (forêt de Haguenau, début IVe siècle av. J.-C.). © André Beauquel - Tous droits réservés, reproduction interdite
    • Origine : forêt de Haguenau
    • Date : début IVe siècle av. J.-C.
    • Diamètre : 15 cm environ

    La région de Haguenau connaît six torques en bronze dont la partie qui précède chacun des tampons terminaux est ornée d'un masque humain stylisé. La fermeture est assurée par un téton. Ce type de collier est commun au domaine celtique du IVe s. av. J.-C., et son origine est à rechercher en Étrurie, où il fut introduit par des influences orientales. Il est vraisemblable que le port de ce bijou revêt une signification religieuse et s'il est circonscrit en ce qui concerne l'Alsace à la région située à l'ouest immédiat de Haguenau, il n'est pas rare en Sarre, en Champagne et en Suisse.

    Ces deux exemples locaux illustrent l'histoire des mouvements des Celtes aux IVe et IIIe s. av. J.-C. Les Romains sont battus sur l'Allia et Rome est prise par les Gaulois en -385. Les guerriers, après les combats, ramènent d'Italie un butin d'origine grecque ou étrusque (Waldalgesheim en Rhénanie, Reinheim en Sarre sont les exemples les plus frappants parmi d'autres). D'autre part, de plus en plus, des Celtes, au cours des IVe et IIIe siècles, se dirigeront vers l'Orient et même s'y installeront. Les colliers à disques jalonnent les étapes de ces expéditions. On ne s'étonnera donc pas de la richesse des sépulturessépultures des Celtes sénons près d'Ancône, non plus que de celles du nord des Alpes, dont les objets marquent un renouvellement total de l'art décoratif.

    On assiste à un véritable exode. Les régions du nord des Alpes se vident progressivement et massivement, surtout après la mort d'Alexandre qui entraîne une suite d'incessants combats auxquels participent les Celtes, enrôlés dans des troupes de mercenaires. La rareté des trouvailles archéologiques de la fin du IIIe siècle, en Alsace aussi bien que dans le Jura et le Palatinat, corrobore l'hypothèse de ce dépeuplement.

    Mais battus en -225 à Télamon en Étrurie, les Celtes se soumettent et beaucoup repassent les Alpes. Le monde celtique se replie sur lui-même et Rome étend peu à peu sa domination.