Dans les années 1950 le Bevatron accélérait des protons jusqu’à 6 GeV  en occupant environ 10.000 m2. Depuis, des progrès de miniaturisation ont été réalisés, et des physiciens de l’université du Texas viennent même d’accélérer des électrons à 2 GeV en leur faisant parcourir une distance de seulement quelques centimètres. D'ici dix ans, les synchrotrons X utilisés par les chimistes et les biologistes tiendront peut-être dans une pièce !

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    Depuis plus de 20 ans, on cherche à mettre en pratique les idées avancées dès les années 1970 par des physiciensphysiciens comme Toshiki Tajima et John Dawson. Pour eux, en utilisant la technique de l'accélération laser-plasma il doit être possible de miniaturiser considérablement les accélérateurs de particules. S'ils deviennent moins chers et moins encombrants, il serait possible de monter plus facilement en énergie afin d'explorer les arcanes de la matière et des forces fondamentales. Plus prosaïquement, on pouvait imaginer démocratiser l'accès aux faisceaux de rayons X produits aujourd'hui par des synchrotrons, comme Soleil près de Saclay, ou l'ESRF (European Synchrotron Radiation Facility) de Grenoble.

    Une vue du Bevatron, à Berkeley, en train d'être démonté. Le préfixe « Be » vient de « <em>billion electronvolt »</em>, c'est-à-dire milliards d'électronvolts en anglais. Le Bevatron a permis de découvrir l'antiproton. © Roy Kaltschmidt, <em>Berkeley Lab Public Affairs Department</em>

    Une vue du Bevatron, à Berkeley, en train d'être démonté. Le préfixe « Be » vient de « billion electronvolt », c'est-à-dire milliards d'électronvolts en anglais. Le Bevatron a permis de découvrir l'antiproton. © Roy Kaltschmidt, Berkeley Lab Public Affairs Department

    Des rayons X pour percer les secrets des réactions chimiques

    Ces accélérateurs géants permettent par exemple aux chimistes d'étudier des molécules interstellaires dans les météoritesmétéorites, en tentant de percer l'énigme de la chiralité, ou encore de l'effet Doppler rotationnel moléculaire. Les biologistes peuvent aussi s'en servir pour photographier des atomesatomes en pleine photosynthèsephotosynthèse. Mais ces instruments d'étude du monde moléculaire sont coûteux et nécessitent aux chercheurs de voyager, parfois très loin, pour repousser les frontières de la connaissance. L'idéal serait donc d'avoir des machines équivalentes moins onéreuses et plus petites, disponibles pour un plus grand nombre de scientifiques.


    Une vidéo de présentation du Texas Petawatt Laser. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle avec deux barres horizontales en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître, si ce n'est pas déjà le cas. En passant simplement la souris sur le rectangle, vous devriez voir l'expression « traduire les sous-titres ». Cliquez pour faire apparaître le menu du choix de la langue, choisissez « français », puis cliquez sur « OK ». © Université du Texas à Austin, YouTube

    Des physiciens de l'université du Texas à Austin viennent d'annoncer dans un article, publié dans Nature Communicationqu'ils avaient fait un pas de plus vers la réalisation de ce rêve. En utilisant les impulsions laserlaser du Texas Petawatt Laser pour faire  de l'accélération laser-plasma, ils ont réussi à franchir la barrière du GeVGeV devant laquelle butaient leurs collègues engagés dans la même voie de recherche depuis des années. Ils ont accéléré des électrons jusqu'à des énergies de 2 GeV sur une longueur de 2,5 cm seulement. Pour obtenir des énergies équivalentes il fallait des machines longues de quelques terrains de football. Comme le dit Mike Downer, l'un des physiciens impliqués dans cette performance, « cela représente un facteur de miniaturisation de l'ordre de 10.000 ».

    Des synchrotrons miniatures commercialisés dans dix ans

    Pour le chercheur, ce n'est qu'un début. D'ici quelques années, des dispositifs similaires atteindront les 10 GeV, c'est-à-dire précisément le seuil d'énergie nécessaire pour produire des rayons X avec des longueurs d'ondelongueurs d'onde suffisamment courtes pour intéresser les chimistes et les biologistes. « Je ne pense pas que nous ayons besoin d'une percée technologique majeure pour en arriver là. Tout ce dont nous avons besoin c'est de continuer à disposer de financements suffisants dans les années à venir (...) », poursuit le chercheur. Selon lui, « si on commercialise maintenant des lasers pétawatt, les compagnies finiront par faire de même avec les modules d'accélérateurs permettant d'atteindre 10 GeV. » De quoi permettre aux scientifiques de s'en emparer par la suite, « pour faire de nouvelles découvertes et produire des innovations ».