Les écosystèmes et le système Terre, tout autant que les cellules vivantes en évolution et le cerveau humain, sont ce que les physiciens appellent des systèmes complexes. Ils sont caractérisés par l'aléatoire et le désordre et sont donc difficiles à comprendre. Le prix Nobel de physique 2021 récompense des contributeurs importants à l'étude de certains systèmes complexes emblématiques, notamment celui derrière le climat de la Terre mais aussi d'autres, derrière le fonctionnement des neurones.


au sommaire


    Le géologuegéologue, paléontologuepaléontologue et philosophe français Teilhard de Chardin, qui avait beaucoup discuté des concepts de noosphère et biosphèrebiosphère avec le géochimiste russe Vladimir Vernadsky, avait avancé au cours de la première moitié du XXe siècle qu'il y avait trois infinis dans l'Univers dont l'un avait encore été très peu exploré et très peu compris. Il y avait tout d'abord, bien sûr, l'infiniment grand et l'infiniment petit mais, selon lui, et pas du tout indépendamment des deux autres, il y avait l'infiniment complexe. Une physique véritablement complète se devrait de rendre compte de ces trois infinis et de leur imbrication.

    Pour lui, l'infiniment complexe était le domaine de la philosophie naturelle, comme on désignait encore il y a peu les sciences de la nature, où l'on tentait de comprendre des systèmes comme la biosphère, les cellules vivantes et bien sûr la conscience. Cette physique de la complexité est toujours en plein développement. Elle bénéficie de nos jours de la puissance des superordinateurssuperordinateurs et on espère aboutir à des percées spectaculaires en utilisant aussi l'intelligence artificielleintelligence artificielle (IA).

    Ce 5 octobre 2021, l'Académie royale des sciences de Suède a fait savoir qu'elle avait justement décidé de décerner le prix Nobel de physique 2021 à certains des explorateurs de l'infiniment complexe, auteurs, selon ses mots, de « contributions révolutionnaires à notre compréhension des systèmes physiques complexes ». Une moitié du prix Nobel a donc été attribuée conjointement à Syukuro Manabe, membre de l'université de Princeton aux États-Unis, et à Klaus Hasselmann, de l'Institut Max-PlanckPlanck de météorologiemétéorologie, à Hambourg en Allemagne. Le comité Nobel précise que les deux lauréats se sont illustrés en particulier, toujours selon ses mots, « pour la modélisation physique du climatclimat de la Terre, la quantificationquantification de la variabilité et la prévision fiable du réchauffement climatiqueréchauffement climatique ».


    Le prix Nobel de physique Giorgio Parisi est né en 1948 à Rome. Le documentaire que l'on voit ici, « Giorgio Parisi et la physique de la complexité » lui a été consacré en 2013. Giorgio Parisi s'est fait connaître au niveau international en particulier par ses travaux concernant les systèmes désordonnés et les exotiques verres de spin, une classe de modèles en mécanique statistique dont Parisi, lui-même, a fourni de nombreuses applications en théorie de l'optimisation, en biologie et en immunologie. Il a aussi fait des contributions dans le domaine de la physique des particules élémentaires, en particulier avec la chromodynamique quantique décrivant les quarks et le gluon et aussi avec la théorie des cordes. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en italien devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Campobianco Gian Luca

    L'autre moitié de la somme du prix Nobel de physique de cette année a été attribuée à Giorgio Parisi, de la célèbre université La Sapienza de Rome, en Italie, et cette fois-ci « pour la découverte des interactions entre l'état désordonné et les fluctuations dans les systèmes physiques de l'échelle atomique à l'échelle planétaire ». Comme l'explique le communiqué de la fondation Nobel, au cours des années 1980, Giorgio Parisi découvre des motifs cachés dans des matériaux complexes désordonnés, relevant de la théorie des systèmes complexes et de processus aléatoires, et que l'on trouve non seulement en physique mais aussi dans des domaines très différents allant des neurosciences au deep learningdeep learning. Parisi s'est notamment penché sur la mécanique statistique de ce que l'on appelle des verresverres de spin ou encore des glaces de spin qui sont des matériaux magnétiques particuliers, comme Futura l'avait expliqué dans un précédent article. Ces objets sont à la croisée des phénomènes de transition de phase et des théories développées pour comprendre le ferromagnétismeferromagnétisme comme ce que l'on appelle les modèles d'Ising. Remarquablement, verres, glaces de spinglaces de spin et modèles d'Ising ont des liens avec des méthodes relevant de la description du fonctionnement des neuronesneurones biologiques et des réseaux de neurones du deep learning ainsi que dans le cas des simulateurs et des ordinateurs quantiques.


    Un entretien avec le physicien et mathématicien allemand Klaus Hasselmann, déjà lauréat du prix Frontiers of Knowledge 2009 de la Fondation BBVA dans la catégorie « Changement climatique ». Klaus Hasselmann est né en 1931 à Hambourg, et il a obtenu en 1957 un doctorat de l'université de Göttingen, en Allemagne. Il est aujourd'hui Professeur au Max Planck Institute for Meteorology à Hambourg. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © BBVA Foundation

    Des pionniers de la modélisation du réchauffement climatique

    Il y a quelques années, Syukuro Manabe et Klaus Hasselmann, quant à eux, avaient déjà été lauréats du prix de la fondation BBVA, créée et financée par la Banco Bilbao Vizcaya Argentaria, un groupe bancaire multinational espagnol basé à Madrid et à Bilbao. Plusieurs interviews, en vidéo, leur avaient alors été consacrées et on peut les consulter aujourd'hui.

    Syukuro Manabe est l'un des géophysiciens du climat à qui nous devons une compréhension détaillée de l'effet de serreeffet de serre produit sur Terre en raison de l'augmentation des niveaux de dioxyde de carbonedioxyde de carbone dans l'atmosphèreatmosphère. Il a donc contribué à l'établissement des modèles avec forçage radiatif décrivant le climat et l'effet sur les transports dans l'atmosphère des augmentations de températures résultantes et ce dès les années 1960.

    Klaus Hasselmann va commencer à contribuer aux modèles climatiquesmodèles climatiques une décennie plus tard, en montrant pourquoi les systèmes dynamiques non linéairessystèmes dynamiques non linéaires derrière ces modèles, pouvant manifester des effets chaotiques rendant impossible la prédiction météorologique à long terme, rendaient tout de même possible des prédictions au niveau du climat sur des échelles de temps allant de décennies à des siècles.

    Il a également introduit des méthodes d'analyses des données concernant le climat qui ont permis de démontrer que le changement climatique en cours était bien dû aux émissionsémissions de gazgaz carbonique de l'humanité.

    Pour en savoir plus sur les travaux de ces trois hommes, le comité Nobel a mis en ligne des explications dans une version grand public et une version pour personnes cultivées en science.


    Entretien avec Syukuro Manabe, déjà lauréat du prix Frontiers of Knowledge 2016 de la Fondation BBVA dans la catégorie « Changement climatique », conjointement avec James Hansen. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © BBVA Foundation

    Syukuro Manabe, né le 21 septembre 1931 au Japon est un météorologue et climatologiste, pionnier de l'utilisation de l'informatique dans la simulation du réchauffement climatique. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © BBVA Foundation