La vie telle que nous la connaissons ne peut pas se faire sans phosphore. Celui-ci est un composant essentiel de l’ADN et d’autres molécules biologiques. Pourtant, il est plutôt rare dans les océans et les lacs. Des scientifiques ont identifié des lacs riches en carbonate où le phosphore est abondant. Des conditions idéales pour la formation des première molécules complexes nécessaires à la vie.


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    Le phosphore est un élément primordial des molécules biologiques. Il entre dans la composition de l'ADNADN mais aussi de l'ATPATP, unité énergétique de base de notre organisme, et permet aux cellules de construire leur membrane. Il a tendance à se lier au calcium pour former des sels de phosphate de calcium, peu solubles. Le phosphore doit être libre dans l'eau pour entrer dans la formation de molécules prébiotiques. Bien que rare dans l'eau, il existe un écosystèmeécosystème sur Terre particulièrement riche en phosphore : les lacs situés dans des régions arides. Et si la vie avait débuté là-bas ?

    Une étude parue dans PNAS se concentre sur ces lacs, où l'on observe des eaux rendues riches en sels minérauxminéraux, notamment des carbonates, par l'évaporation. Ils ont prélevé des échantillons du Lac Mono en Californie, du Lac Magadi au Kenya et du lac Lonar en Inde. Les chercheurs y ont mesuré la concentration en phosphore : même si elle varie en fonction des saisonssaisons, elle peut tout même atteindre 50.000 fois la concentration de phosphore des océans. Et ce chiffre peut atteindre 1 million lors des saisons les plus sèches. Mais quel est lien entre les eaux riches en ions carbonate et le phosphore ?

    Cette figure présente, en abscisse, les sels carbonate de calcium en fonction du phosphore libre en ordonné. Chaque point coloré correspond à un lac riche en carbonate étudié. Les taux de phosphore libre mesurés dans les lacs Goodenough en Colombie-Britannique et les « <em>Last Chance Lakes</em> » en Utah sont les plus importants. © Toner et al., PNAS
    Cette figure présente, en abscisse, les sels carbonate de calcium en fonction du phosphore libre en ordonné. Chaque point coloré correspond à un lac riche en carbonate étudié. Les taux de phosphore libre mesurés dans les lacs Goodenough en Colombie-Britannique et les « Last Chance Lakes » en Utah sont les plus importants. © Toner et al., PNAS

    La compétition entre carbonate et phosphate

    Dans ces lacs, les ions carbonate sont en compétition avec les ions phosphate pour se lier au calcium. Il en résulte soit du carbonate de calcium ou du phosphate de calcium. Et ce sont les ions phosphate qui perdent la bataille car les ions carbonate ont plus d'affinités avec le calcium. Une partie du phosphate qui ne se fixe pas avec le calcium et reste donc libre dans l'eau. Les scientifiques ont confirmé leur hypothèse in vitroin vitro en testant différents ratios de carbonate et de phosphate. À chaque fois, des ions phosphate se retrouvent libres dans l'eau. « Les niveaux élevés de phosphate dans ces lacs et étangs auraient provoqué des réactions chimiques qui ont intégré du phosphore dans l'ARNARN, des protéinesprotéines et des graisses, tous nécessaires à la vie », a déclaré le coauteur David Catling, chercheur à l'université de Seattle.

    Une atmosphèreatmosphère riche en dioxyde de carbonedioxyde de carbone, comme la Terre l'a connue il y a 4 milliards d’années, est idéale pour que des lacs riches en phosphore se forment. Absorbé par l'eau, le dioxyde de carbone l'acidifie, ce qui facilite la dissolution des roches contenant du phosphore. Ces lacs ont pu donc être le théâtre de la chimiechimie prébiotiqueprébiotique qui a conduit à l'apparition de la vie.

    Les lacs riches en phosphore pourraient l'être aussi en cyanure, une source de carbone et d'azote pour les acides aminés

    Les chercheurs à l'origine de cette étude ont également publié, plus tôt cette année, un autre article suggérant que ces lacs pouvaient également contenir du cyanure qui, bien que mortel pour l'Homme, contient de l'azoteazote et du carbone, les molécules de bases des protéines et des bases nucléiques.